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Droit des obligations
Règle du non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle : illustration
Mots-clefs : Responsabilité délictuelle, Responsabilité contractuelle, Non-cumul (principe de), Inexécution, Chaine de contrats, Demande principale, Demande subsidiaire, Litige
L’action en responsabilité délictuelle est recevable lorsque cette dernière a été faite à titre subsidiaire et qu’aucun lien contractuel n’existe entre le demandeur et le défendeur.
Une entreprise confie la construction d’un immeuble à usage industriel à une société de conception de bâtiments. Cette société de conception, dans le cadre du chantier, sous-traite à une troisième entreprise un lot relatif au bardage de l’immeuble. Ce sous-traitant se fournit lui-même auprès d’une quatrième personne, fabricant de panneaux de tôles.
Des défauts apparaissent rapidement sur ces matériaux, et le maître de l’ouvrage agit alors en responsabilité et indemnisation contre le sous-traitant et son fournisseur. Le demandeur estime être en présence d’une chaîne de contrat, lui permettant d’engager la responsabilité contractuelle des défendeurs. En cours d’instance, le demandeur invoque toutefois subsidiairement la responsabilité délictuelle des défendeurs prévue par l’article 1382 du Code civil, en constatant qu’il n’y a pas de liens contractuels directs entre lui et le défendeur.
La cour d’appel juge irrecevables les demandes du maître de l’ouvrage, sur le fondement du principe de non-cumul des responsabilités délictuelle et contractuelle, principe bien établi par la jurisprudence (v. Civ. 11 janv. 1922, GAJC ; Civ. 2e, 9 juin 1993). Ce principe a en effet des conséquences lourdes sur la procédure applicable devant le tribunal pour la partie qui cherche à obtenir réparation (V. Prétentions des parties et office du juge, p. 888, Précis Dalloz). Les juges du fond ont considéré en l’espèce que les modifications opérées par le demandeur concernant la responsabilité à engager modifiaient les prétentions respectives des parties, et justifiaient leur irrecevabilité (art. 4 C. pr. civ.).
Au visa de l’article 1382 du Code civil, la troisième chambre civile casse l’arrêt d’appel, et conclut à la recevabilité de l’action en responsabilité délictuelle, du fait de l’inexistence de liens contractuels directs entre le demandeur et le défendeur et du caractère subsidiaire de la demande.
Cette décision est conforme à la jurisprudence de la chambre commerciale, qui avait décidé que « la règle de non-cumul des responsabilités contractuelle et délictuelle ne recevant application que dans les rapports entre contractants […] une cour d'appel, qui n'a pas reconnu à une société la qualité de partie au contrat […] est dès lors tenue de statuer sur sa demande fondée sur la responsabilité délictuelle » (Com. 9 juill. 2002).
Civ. 3e, 28 avr. 2011, n° 10-13.646, FS-D
Références
« Obligation de réparer le préjudice résultant soit de l’inexécution d’un contrat (responsabilité contractuelle), soit de la violation du devoir général de ne causer aucun dommage à autrui par son fait personnel, ou du fait des choses dont on a la garde, ou du fait des personnes dont on répond (responsabilité du fait d’autrui) ; lorsque la responsabilité n’est pas contractuelle, elle est dite délictuelle ou quasi délictuelle. »
« Stricto sensu, l’expression est réservée à l’hypothèse où chaque contrat du groupe est translatif de propriété. Lorsque les contrats successifs sont de même nature, la chaîne est dite homogène (suite de ventes intervenant entre fabricant et grossiste, puis entre grossiste et détaillant, enfin entre détaillant et client). Lorsque les contrats sont de nature différente, la chaîne est hétérogène (ex. : succession d’une vente et d’un contrat d’entreprise : vente de matériaux à un entrepreneur qui construit une maison pour un particulier). La notion de chaîne de contrats est invoquée pour permettre à un membre quelconque de la chaîne d’agir en responsabilité contractuelle contre une personne qui est partie à un autre contrat de la chaîne. La Cour de cassation n’admet une telle action contractuelle directe qu’en présence d’une série de contrats emportant transfert de propriété, ce qui permet de préserver l’effet relatif des conventions puisque le demandeur exerce l’action même qui lui a été transmise avec la chose. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
■ Article 4 du Code de procédure civile
« L'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. Toutefois l'objet du litige peut être modifié par des demandes incidentes lorsque celles-ci se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant. »
■ Civ. 11 janv. 1922, GAJC, 12e éd., Dalloz, coll. « Grands arrêts », 2008.
■ Com. 9 juill. 2002, Bull. IV n° 122.
■ Terré, Simler, Lequette, Droit civil. Les obligations, 10e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2009, p. 870 s., 888.
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