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Droit du travail - relations collectives
Requalification d'un contrat de gérance-mandat en contrat de travail
Mots-clefs : Fonds de commerce, Gérance-mandat (situation du gérant), Requalification, Contrat de travail (lien de subordination, caractérisation)
Un contrat de gérance-mandat est requalifié en contrat de travail lorsque le prétendu gérant-mandataire travaille sous l'autorité et le contrôle du prétendu mandant.
L'arrêt du 8 juin 2010 offre une nouvelle illustration de l'indisponibilité du contrat de travail (v. déjà, Ass. plén., 4 mars 1983). En l'espèce, une société (Sté B.) avait confié la direction de plusieurs de ses hôtels à des gérants par le biais de « contrats de gérance-mandat ». Dix-sept mandataires-gérants saisirent le conseil de prud'hommes pour obtenir la requalification de leurs contrats en contrats de travail.
Le contrat de gérance-mandat, consacré par la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur de petites et moyennes entreprises unit, d'une part, un gérant-mandataire qui gère un fonds de commerce ou un fonds artisanal, moyennant le versement d'une commission proportionnelle au chiffre d'affaires et, d'autre part, un mandant qui reste propriétaire du fonds et supporte les risques liés à son exploitation. Ce contrat fixe aux gérants mandataires une mission de gérance d'un fonds, tout « en leur laissant toute latitude […] de déterminer leurs conditions de travail, d'embaucher du personnel et de se substituer des remplaçants dans leur activité à leurs frais et sous leur entière responsabilité » (art. L. 146-1 C. com.). C'est cette liberté dans l'organisation du travail, c'est-à-dire l'absence de lien de subordination entre le mandant et le gérant mandataire, qui permet de distinguer le contrat de gérance-mandat du contrat de travail.
Ce contrat n'est cependant pas à l'abri d'une requalification, lorsque l'autonomie du mandataire-gérant fait défaut (Soc. 16 janv. 2008). Tel était le cas en l'espèce : les gérants mandataires travaillaient sous l'autorité et le contrôle direct du mandant (ils devaient impérativement respecter les normes et standards de la chaîne, ne disposaient d'aucune liberté en matière de fixation des prix et de choix des clients, de procédure d'accueil, de promotion, de publicité et de tenue de la comptabilité, risquaient d'être sanctionnés en cas de non-respect des instructions). La Cour de cassation approuve ici les juges du fond d'avoir déduit l'existence d'un contrat de travail de l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur ayant le pouvoir de donner des ordres, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
Aux mandants, donc, d'être vigilants lors de la rédaction du contrat de gérance-mandat qui, comme le rappelle le code du commerce, doit laisser au gérant-mandataire une liberté — effective — dans l'organisation de leur travail.
Soc. 8 juin 2010, F-D, n° 08-44.965
Références
« Personne physique ou morale chargée de gérer un fonds commercial ou artisanal moyennant le versement d’une commission proportionnelle au chiffre d’affaires.
Le gérant-mandataire est immatriculé au Registre du commerce et des sociétés ou au Répertoire des métiers; il n’est pas salarié. De son côté, le mandant demeure propriétaire du fonds et supporte les risques de l’exploitation (à la différence de l’hypothèse de la location-gérance).
Le contrat de gérance-mandat fixe la mission et les pouvoirs exacts du gérant-mandataire. »
Source : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010
■ Article L. 146-1 du Code de commerce
« Les personnes physiques ou morales qui gèrent un fonds de commerce ou un fonds artisanal, moyennant le versement d'une commission proportionnelle au chiffre d'affaires, sont qualifiées de "gérants-mandataires" lorsque le contrat conclu avec le mandant, pour le compte duquel, le cas échéant dans le cadre d'un réseau, elles gèrent ce fonds, qui en reste propriétaire et supporte les risques liés à son exploitation, leur fixe une mission, en leur laissant toute latitude, dans le cadre ainsi tracé, de déterminer leurs conditions de travail, d'embaucher du personnel et de se substituer des remplaçants dans leur activité à leurs frais et sous leur entière responsabilité.
Le gérant-mandataire est immatriculé au registre du commerce et des sociétés et, le cas échéant, au répertoire des métiers. Le contrat est mentionné à ce registre ou à ce répertoire et fait l'objet d'une publication dans un journal habilité à recevoir des annonces légales.
Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux professions régies par le chapitre II du titre VIII du livre VII du code du travail. »
■ Loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur de petites et moyennes entreprises
■ Ass. plén., 4 mars 1983, D. 1983. Jur. 381, concl. Cabannes ; D. 1984. IR 164, obs. Béraud ; Soc. 17 avr. 1991, Bull. civ. V, n° 200 ; 19 déc. 2000, D. 2001. IR 355 ; GADT, 4e éd., n° 3 ; RJS 2001. 203, n° 275 ; Dr. soc. 2001. 227, note Jeammaud.
■ Soc. 16 janv. 2008, D. 2008. AJ 477, obs. Chevrier ; JCP E 2008, n° 30, p. 30, note Béal et Terrenoire ; Lettre distrib. févr. 2008, p. 4 ; Tourisme & Droit, mars 2008. 23, obs. Chevrier.
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