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Droit des obligations
Responsabilité de la SNCF pour violation de son obligation de ponctualité
Mots-clefs : Responsabilité civile (contractuelle), Obligation de ponctualité (manquement), SNCF, Préjudice
Dans un arrêt du 22 septembre 2010, la cour d’appel de Paris retient la responsabilité de la SNCF dans le cadre de son obligation de ponctualité, en raison d’un retard de 19 minutes sur un train de banlieue.
Ce n’est pas la première fois que la SNCF engage sa responsabilité pour manquement à son obligation de ponctualité. Dans un arrêt de 1996, la cour d’appel de Paris l’avait déjà condamnée pour des retards répétés sur une même ligne (Paris, 4 oct. 1996). Mais la présente décision s’en distingue quelque peu dans la mesure où était en cause, cette fois, un retard unique.
En l’espèce, un avocat qui devait se rendre en train à Nîmes pour plaider une affaire emprunta un train de banlieue pour se rendre à la gare de Lyon. Le train arriva à destination avec un retard de trente minutes, et l’intéressé rata sa correspondance.
Pour retenir la responsabilité contractuelle de la SNCF pour manquement à son obligation de ponctualité (art. 1147 C. civ.), les juges d’appel raisonnent en plusieurs temps. Ils affirment d’abord avec netteté que la SNCF est débitrice d’une obligation de ponctualité, « tant pour les trains de grandes lignes que pour les trains de banlieue », dont la justification réside dans son cahier des charges. Cette obligation étant une obligation de résultat, la responsabilité de la SNCF est engagée dès lors qu’un retard est constaté, ce qui était bien le cas en l’espèce.
Les juges relèvent ensuite l’importance du retard et ses conséquences, non pas pour caractériser le manquement de la SNCF à son obligation mais pour permettre l’établissement du dommage dont l’avocat demandait réparation. Ainsi, le retard constaté était « important pour un court trajet » et il a empêché l’avocat « de prendre son train pour Nîmes, l’empêchant ainsi d’atteindre à temps le tribunal administratif où il devait plaider ».
La responsabilité de la SNCF étant engagée, restait à s’interroger sur une éventuelle exonération. Celle-ci est écartée par les juges, qui excluent la force majeure, de même que l’éventuelle faute de la victime : le fait d’avoir prévu dix-sept minutes pour effectuer la correspondance ne constitue pas une imprudence dès lors que le changement de trains s’effectuait dans la même gare.
La discussion engagée par les parties sur un manquement de la SNCF à son obligation d’information est également écartée, cette question n’ayant « aucune incidence sur la survenance du préjudice ».
En conséquence, la victime obtient l’indemnisation de son préjudice. Outre le prix d’un aller-retour Paris-Melun (11,12 €), l’avocat se voit allouer plusieurs sommes : une au titre de la rémunération convenue pour la plaidoirie (1000 €), une au titre du manque à gagner (825 €, soit trois heures à 275 € HT l’heure), une au titre de la perte de crédibilité vis-à-vis du client (1000 €), et, enfin, une dernière au titre du préjudice moral subi (500 €). Des sommes modestes car proportionnées aux dommages subis, mais susceptibles d’« inspirer » d’autres usagers…
Paris, 22 sept. 2010, RG n° 08/14438
Références
« Au sens large, tout événement imprévisible et insurmontable empêchant le débiteur d’exécuter son obligation; la force majeure est exonératoire.
Au sens étroit, la force majeure s’oppose au cas fortuit ; elle est un événement non seulement imprévisible et insurmontable mais encore d’origine externe, absolument étranger à la personne du débiteur (force de la nature, fait du prince, fait d’un tiers).
La Cour de cassation n’exige plus la condition d’extériorité, en matière contractuelle du moins; elle admet qu’il y a force majeure lorsque le débiteur a été empêché d’exécuter par la maladie, dès lors que cet événement présentait un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et était irrésistible dans son exécution. »
« Obligation en vertu de laquelle le débiteur est tenu d’un résultat précis. Ainsi le transporteur de personnes s’engage envers le voyageur à le déplacer d’un endroit à un autre; ce qui est demandé c’est l’arrivée à la destination prévue. L’existence d’une telle obligation permet au créancier de mettre en jeu la responsabilité de son débiteur par la simple constatation que le résultat promis n’a pas été atteint, sans avoir à prouver une faute. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Paris, 4 oct. 1996, JCP 1997. II. 22811, note G. Paisant et P. Brun
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »
■ Rép. civ. Dalloz, V° « Responsabilité contractuelle », par G. Légier.
■ F. Terré, Y. Lequette, Ph. Simler, Droit civil, Les obligations, 10e éd. Dalloz, coll. « Précis », 2009, n°577 s.
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