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Droit des obligations
Responsabilité des parents du fait de leur enfant mineur
Mots-clefs : Enfant, Mineur, Responsabilité de plein droit, Fait non fautif, Causalité directe, Force majeure, Faute de la victime, Irrésistibilité, Imprévisibilité, Discernement
La responsabilité de plein droit des père et mère du fait de leur enfant mineur ne peut être écartée qu’en cas de faute de la victime ou de cause étrangère, revêtant le caractère imprévisible et irrésistible de la force majeure.
Un cycliste participant à une randonnée organisée sur une voie réservée à cet effet, était entré en collision avec un enfant de 10 ans, qui se déplaçait en rollers sur la piste. Blessé, le cycliste assigna les parents du mineur en vue d’obtenir une indemnisation, au nom de la responsabilité des père et mère du fait de leur enfant mineur, une des responsabilités du fait d’autrui prévues par l’article 1384 du Code civil. La cour d’appel avait refusé de faire droit à sa demande, relevant la faute d’imprudence du cycliste qui roulait à vive allure et avait empiété — selon l’enquête de la gendarmerie — sur une partie de la chaussée qui ne lui était pas réservée.
Au visa de l’article 1384 alinéas 1er, 4 et 7 du Code civil, la deuxième Chambre civile casse l’arrêt d’appel. Reprenant un principe bien établi, elle énonce « que pour que la responsabilité de plein droit des père et mère exerçant l’autorité parentale sur un mineur habitant avec eux puisse être recherchée, il suffit que le dommage invoqué par la victime ait été directement causé par le fait, même non fautif, du mineur ; que seule la cause étrangère ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité ».
On sait, depuis l’arrêt Bertrand (Civ. 2e, 19 févr. 1997), que la mise en cause de la responsabilité des parents pour le fait de leur enfant mineur est de plein droit, sauf à démontrer l’existence d’une faute de la victime ou d’une circonstance extérieure, devant nécessairement dans les deux hypothèses présenter le caractère de la force majeure, c'est-à-dire avoir été imprévisible et irrésistible, caractère qui doit s’apprécier au regard des parents responsables.
Tel n’est pas le cas en l’espèce selon la Haute cour, qui relève que le mineur avait empiété sur un espace réservé aux randonneurs à vélo, et que l’action fautive de la victime cycliste qui roulait un peu rapidement, même en la considérant comme constituée, n’avait pas été imprévisible et irrésistible, et ne revêtait donc pas le caractère de la force majeure.
Soulignons que cette définition jurisprudentielle de la responsabilité du fait du mineur est critiquée par une partie de la doctrine (v. Précis Dalloz, p. 823), qui considère qu’il est devenu trop aisé de mettre en cause les parents, alors que la prise en compte de la faculté de discernement de l’enfant, au cas par cas, permettrait une responsabilisation plus progressive des infans.
Il semble par ailleurs que l’arrêt, motivé au visa des alinéas 1er, 4 et 7 de l’article 1384, vise à généraliser la solution à tous les cas de responsabilité du fait d’autrui (artisans, instituteurs, parents).
Civ. 2e, 17 février 2011, F-P+B, n° 10-30.439
Références
■ Responsabilité du fait d’autrui
« Responsabilité délictuelle que la loi fait peser sur les père et mère du fait de leurs enfants mineurs, sur les commettants du fait de leurs préposés, sur les instituteurs et artisans du fait de leurs élèves et apprentis. À côté de ces cas légaux, la jurisprudence a posé un principe général de responsabilité à la charge de la personne ou de l'organisme dont le devoir est d'organiser, de diriger et de contrôler l'activité de l'auteur du dommage. »
« Au sens large, tout événement imprévisible et insurmontable empêchant le débiteur d’exécuter son obligation; la force majeure est exonératoire.
Au sens étroit, la force majeure s’oppose au cas fortuit ; elle est un événement non seulement imprévisible et insurmontable mais encore d’origine externe, absolument étranger à la personne du débiteur (force de la nature, fait du prince, fait d’un tiers).
La Cour de cassation n’exige plus la condition d’extériorité, en matière contractuelle du moins ; elle admet qu’il y a force majeure lorsque le débiteur a été empêché d’exécuter par la maladie, dès lors que cet événement présentait un caractère imprévisible lors de la conclusion du contrat et était irrésistible dans son exécution. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
« On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.
[…]
Le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux.
[…]
La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité. […] »
■ Civ. 2e, 19 févr. 1997, Bertrand, n° 94-21.111, Bull. civ. II, no 56 ; GAJC 11e éd., 2008, Dalloz, coll. « Grands arrêts », nos 208-209 (tome II) ; D. 1997. Jur. 265, note Jourdain ; ibid. 1997. Somm. 290, obs. D. Mazeaud ; JCP 1997. II. 22848, concl. Kessous et note Viney ; RCA 1997. Chron. 9, par Leduc ; Gaz. Pal. 1997. 2. 572, note Chabas ; ibid. 1998. 1. 171, note Puill ; Dr. fam. 1997, no 83, note Murat (1re esp.) ; LPA 15 sept. 1997, note Lebreton.
■ Lequette Y., Simler P. et Terré F., Droit civil. Les obligations, 10e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2009, p. 823.
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