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Droit des obligations
Responsabilité du notaire et devoir de conseil concernant les incidences fiscales d’une vente
Mots-clefs : Obligation de conseil, Acte authentique, Notaire, Avocat, Acte d’avocat, Obligation d’information, Charge de la preuve
Le notaire est tenu d’informer son client les incidences fiscales d’une vente dont il a dressé l’acte authentique, sous peine de voir engager sa responsabilité civile pour un manquement à son obligation d’information.
En l’espèce, un notaire avait dressé l’acte authentique relatif à la vente d’un bien. Cet acte comportait la liste faite par le notaire des déductions fiscales auxquelles pouvait prétendre l’acheteur. Peu de temps après son achat, ce dernier avait revendu le bien. Le même notaire avait rédigé l’acte de la seconde vente, omettant de préciser que le nouvel acheteur ne pouvait pas bénéficier des déductions fiscales précitées. Ce dernier avait logiquement fait l’objet d’un redressement fiscal.
Il agissait donc en responsabilité contre le notaire, pour manquement à son obligation de conseil, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil. La cour d’appel avait rejeté les prétentions du demandeur, car elle estimait que si dans la première affaire, le notaire était intervenu en tant que conseil des parties, il s’était borné la seconde fois à conférer un caractère authentique au contrat de vente.
Tel n’est pas l’avis de la Cour de cassation, pour qui le notaire, qui est « tenu professionnellement d’éclairer les parties sur les incidences fiscales des actes qu’il a reçus ainsi que de s’assurer de leur validité et de leur efficacité, ne peut décliner le principe de sa responsabilité en alléguant qu’il n’a fait qu’authentifier l’acte établi par les parties ». La première chambre civile applique ici une jurisprudence bien établie concernant l’étendue de l’obligation de conseil du notaire, qui comporte les incidences fiscales des opérations auxquelles il apporte son concours (v. par ex. Civ. 1re, 15 avr. 1980). De plus, les juges refusent d’exonérer de leur responsabilité les notaires qui prétendent « qu’ils se sont bornés à donner la forme authentique aux déclarations reçues » (Civ. 1re, 4 janv. 1966).
Toutefois, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière, le notaire pourra s’exonérer de toute responsabilité s’il rapporte la preuve qu’il a effectivement mis en garde le client sur les risques que comportait l’opération (v. par ex. Civ. 1re, 19 déc. 2006). Tel n’était pas le cas en l’espèce, et cette solution est d’autant plus logique que le notaire devait connaître la spécificité des déductions fiscales accordées au premier acquérant, et qu’il ne pouvait dès lors pas plaider la méconnaissance de celle-ci alors que la seconde vente avait eu lieu moins d’un mois après la première.
Rappelons que le régime de responsabilité du notaire est très critiqué par la doctrine, qui regrette « une impression d'incertitude quant à la nature — délictuelle ou contractuelle — de cette responsabilité. » (Précis Dalloz, n° 455).
Civ. 1e, 28 avr. 2011, n° 10.14-809
Références
« Écrit établi par un officier public (notaire par ex.), sur support papier ou électronique, et dont les affirmations font foi jusqu’à inscription de faux et dont les grosses, revêtues de la formule exécutoire, sont susceptibles d’exécution forcée. »
« Officier public et officier ministériel chargé de conférer l’authenticité aux actes instrumentaires et de conseiller les particuliers. Il est tenu de s’assurer de l’efficacité de l’acte auquel il prête son concours et doit veiller à l’accomplissement des formalités nécessaires à la mise en place des sûretés qui en garantissent l’exécution.
La profession de notaire peut être exercée à titre individuel ou à titre d’associé, dans le cadre d’une société d’exercice libéral (SEL), d’une société civile professionnelle. Elle peut l’être également en qualité de salarié d’une personne morale ou physique titulaire d’un office. »
« Devoir légal pesant sur le professionnel, vendeur de biens ou prestataire de services, d’informer son partenaire sur les caractéristiques de la chose commercialisée ou de l’opération projetée au moyen, notamment, de mentions informatives et de documents annexes. Outre de nombreux textes imposant une telle obligation dans des domaines précis (démarchage, crédit, capitalisation, voyages…), le Code de la consommation édicte, à titre de principe, une obligation précontractuelle d’information dans un souci de protection du consommateur et dispose qu’en cas de litige, il appartient au vendeur de prouver qu’il a exécuté cette obligation. »
Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
■ Terré, Simler, Lequette, Droit civil. Les obligations, 10e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2009, p. 455.
■ Civ. 1re, 15 avr. 1980, n° 78-16.143, Inédit.
■ Civ. 1re, 4 janv. 1966, Bull. civ. I n° 7.
■ Civ. 1re, 19 déc. 2006, Bull. civ. I n° 556 ; D. 2007, AJ 304, obs. Gallmeister; LPA 15 mai 2007, Perruchot-Triboulet.
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