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[ 15 février 2010 ] Imprimer

Droit de la responsabilité civile

Responsabilité médicale : faute distincte du défaut d’information

Mots-clefs : Responsabilité médicale, Obligation d’information (manquement, réparation, perte de chance), Faute distincte (acte médical illicite, préjudices directs, certains et exclusifs, réparation)

Les préjudices découlant de façon directe, certaine et exclusive d’une intervention chirurgicale mutilante, non justifiée et non adaptée, ouvrent droit à réparation.

Après une intervention chirurgicale jugée mutilante, inutile et inadaptée à sa pathologie, une femme rechercha la responsabilité de son médecin. La cour d’appel limita son indemnisation en retenant qu'« en raison de la violation de son devoir d'information par le médecin, celle-ci avait perdu une chance d'éviter l'opération chirurgicale incriminée ».

Statuant au visa des articles L. 1142-1 du Code de la santé publique et 16-3 du Code civil, la Cour de cassation censure cette décision par un arrêt du 28 janvier 2010. Rappelant qu’« en vertu du premier de ces textes, le médecin répond, en cas de faute, des conséquences dommageables des actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'il accomplit et, en vertu du second, qu’il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou, à titre exceptionnel, dans l’intérêt thérapeutique d’autrui », la première chambre civile estime que ces textes ont été méconnus dès lors que les préjudices dont la demanderesse « avait été victime découlaient de façon directe, certaine et exclusive d'une intervention chirurgicale mutilante, non justifiée et non adaptée, de sorte qu'ils ouvraient aussi droit à réparation ».

La cour d’appel n’est pas censurée pour avoir réparé le manquement à l'obligation d'information sur le terrain de la perte de chance de ne pas les subir (sur ce point, la jurisprudence est constante ; v. not. Civ. 1re, 6 déc. 2007) mais pour ne pas avoir alloué une autre somme à la victime. Or, pour la Cour de cassation, une faute distincte (consistant à avoir porté atteinte à l’intégrité physique du patient sans nécessité médicale) pouvait être relevée à l’encontre du médecin ; elle ouvrait, per se, droit à réparation dès lors que les dommages qu’elle avait causés en découlaient, de façon directe, certaine et exclusive.

Civ. 1re, 28 janvier 2010

Références

Perte d’une chance

« Préjudice résultant de la disparition, due au fait d’un tiers, de la probabilité d’un événement favorable et donnant lieu à une réparation partielle, mesurée sur la valeur de la chance perdue déterminée par un calcul de probabilités. »

Source : Lexique des termes juridiques 2010, 17e éd., Dalloz, 2009.

Article 16-3 du Code civil

Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale pour la personne ou à titre exceptionnel dans l'intérêt thérapeutique d'autrui.

Le consentement de l'intéressé doit être recueilli préalablement hors le cas où son état rend nécessaire une intervention thérapeutique à laquelle il n'est pas à même de consentir.

Article L. 1142-1 du Code de la santé publique

« I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute.

Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.

II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret. »

Civ. 1re 6 déc. 2007, D. 2008. Jur. 192, note Sargos ; JCP 2008. II. 125 n° 3, obs. Stoffel-Munck ; RTD civ. 2008. 303, obs. Jourdain.

 

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