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[ 26 novembre 2012 ] Imprimer

Droit pénal général

Retour sur la notion de peine complémentaire : pas de confusion avec la mesure à caractère réel

Mots-clefs : Peine, Peine complémentaire, Urbanisme, Mesure de remise en état

En vertu de l’article 131-11 du Code pénal, seules les peines complémentaires peuvent être prononcées à titre principal. Dès lors, une cour d’appel ne peut prononcer au titre de la peine, la mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers ou la réaffectation du sol, prévues par l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme, qui constituent des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite, et non des sanctions pénales.

Dans sa partie générale, le Code pénal distingue entre peines principales et peines complémentaires prévues pour chacune des trois catégories d'infractions. Si l'article 131-11 du Code pénal autorise le juge à prononcer, à titre de peine principale, des peines qui ne sont encourues qu'à titre complémentaire, faut-il encore que la mesure ordonnée ait la qualification de peine.

Après avoir déclaré une prévenue coupable d'avoir exécuté des travaux non autorisés par un permis de construire, la cour d'appel a ordonné la démolition de l’ouvrage, à titre de peine principale, dans un délai de six mois passé lequel sera encourue une astreinte, mesure prévue par l'article L. 480-5 du Code de l’urbanisme.

Sur un moyen de cassation relevé d’office, la chambre criminelle casse l'arrêt pour que la cour de renvoi prononce une peine légalement justifiée en rappelant, au terme d’un attendu de principe classique, qu'il résulte de l’article 131-11 du Code pénal que seules les peines complémentaires peuvent être prononcées à titre principal. Or, la démolition de la construction illicite n'est pas une peine (ni principale ni complémentaire) mais « une mesure à caractère réel destinée à faire cesser une situation illicite » (Crim. 20 mars 2001 ; Crim. 2 oct. 2007 ; et déjà sous l’empire de l’ancien Code pénal, Crim. 8 juin 1989).

La mise en conformité des lieux ou des ouvrages, la démolition de ces derniers ou la réaffectation du sol, prévues par l'article L. 480-5 du Code de l'urbanisme sont des mesures à caractère réel destinées à faire cesser une situation illicite et peuvent être ordonnées à titre de réparation civile. N’ayant pas pour objet la sanction d’un comportement et/ou le reclassement de l’auteur, elles ne peuvent pas devenir une peine principale, car elles n’ont pas la qualification de « peine ».

Crim. 6 nov. 2012, n°12-82.449 F-P+B

Références

 Garé, Ginstet , Droit pénal. Procédure pénale, 7e éd. Dalloz , coll. « HyperCours », 2012, chapitre 10.

 Peine

[Droit pénal]

« Sanction punitive, qualifiée comme telle par le législateur, infligée par une juridiction répressive au nom de la société, à l’auteur d’une infraction en rétribution de la faute commise, l’intimidation et la réadaptation du délinquant étant les autres objectifs poursuivis.

On distingue, selon leur gravité, les peines criminelles, les peines correctionnelles et les peines contraventionnelles en fonction de la classification des infractions et, selon leur nature, les peines de droit commun et les peines politiques. La peine politique est une sanction propre à certaines infractions qui sont réputées, de ce fait politiques. Aujourd’hui, la seule peine politique spécifique est la détention criminelle à perpétuité et à temps. (…) »

 Peine complémentaire

[Droit pénal]

« Sanction qui s’ajoute, ou peut s’ajouter, à la peine principale selon qu’elle est obligatoire ou facultative pour le juge. »

Source : S. Guinchard, T. Debard, Lexique des termes juridiques 2013, 20e éd., Dalloz, 2013.

 Article 131-11du Code pénal

« Lorsqu'un délit est puni d'une ou de plusieurs des peines complémentaires mentionnées à l'article 131-10, la juridiction peut ne prononcer que la peine complémentaire ou l'une ou plusieurs des peines complémentaires encourues à titre de peine principale.

La juridiction peut alors fixer la durée maximum de l'emprisonnement ou le montant maximum de l'amende dont le juge de l'application des peines pourra ordonner la mise à exécution en tout ou partie, dans des conditions prévues par l'article 712-6 du code de procédure pénale, en cas de violation par le condamné des obligations ou interdictions résultant des peines prononcées en application des dispositions du présent article. Le président de la juridiction en avertit le condamné après le prononcé de la décision. L'emprisonnement ou l'amende que fixe la juridiction ne peuvent excéder les peines encourues pour le délit pour lequel la condamnation est prononcée, ni celles prévues par l'article 434-41 du présent code. Lorsqu'il est fait application des dispositions du présent alinéa, les dispositions de l'article 434-41 ne sont pas applicables. »

 Article L. 480-5 du Code de l'urbanisme

« En cas de condamnation d'une personne physique ou morale pour une infraction prévue aux articles L. 160-1 et L. 480-4, le tribunal, au vu des observations écrites ou après audition du maire ou du fonctionnaire compétent, statue même en l'absence d'avis en ce sens de ces derniers, soit sur la mise en conformité des lieux ou celle des ouvrages avec les règlements, l'autorisation ou la déclaration en tenant lieu, soit sur la démolition des ouvrages ou la réaffectation du sol en vue du rétablissement des lieux dans leur état antérieur. 

Le tribunal pourra ordonner la publication de tout ou partie du jugement de condamnation, aux frais du délinquant, dans deux journaux régionaux ou locaux diffusés dans tout le département, ainsi que son affichage dans les lieux qu'il indiquera. »

 Crim. 20 mars 2001Bull. crim. no 73 ; Dr. pénal 2001. 105, obs. Robert ; RSC 2001. 803, obs. Bouloc, et 818, obs. Robert.

 Crim. 2 oct. 2007Dr. pénal 2007. 162, obs. Robert.

 Crim. 8 juin 1989RSC 1990. 103, obs. Boulan.

 

Auteur :C. L.

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