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Procédure et contentieux administratifs
Substitution de base légale et police sanitaire
Mots-clefs : Substitution de base légale, Office du juge ; Code de la consommation ; Code de la santé publique ; Police sanitaire ; Médecin ; Interdiction d’exercice
Le juge de l'excès de pouvoir peut, sous réserve de certaines garanties, procéder d'office à la substitution de la base légale retenue par un préfet pour fonder une mesure d’interdiction d’exercice de la médecine.
Le préfet peut-il mettre en demeure un médecin de cesser l’exercice de la chirurgie en se fondant sur le Code de la consommation ? Non, répond le Conseil d’État dans un arrêt du 25 septembre 2009.
Pour la Haute juridiction administrative, les dispositions de l'article L. 221-8 du Code de la consommation permettant de prendre des mesures d'urgence en matière de sécurité des produits et des services, ne donnent pas compétence au préfet pour prononcer la suspension du droit d'exercer, dès lors qu'il existe un autre fondement légal (art. L. 4113-14 CSP).
Le juge fait ici application d’une jurisprudence établie (CE 3 décembre 2003, Préfet de la Seine-Maritime c. El Bahi, n° 240267) selon laquelle le pouvoir d'appréciation du juge lui permet de substituer un autre texte qui a servi de base légale à une décision attaquée sous réserve que la personne visée par la décision bénéficie des garanties de procédure identiques à celles dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Il convient que la substitution de base légale ne prive pas l'intéressé de la protection qui lui est due. Or, les conditions d'une substitution de base légale n'étaient pas remplies en l'espèce : le préfet n'a pas fait bénéficier au médecin suspendu des garanties prévues par l'article du Code de la santé publique. La décision prise par le préfet mettant en demeure le médecin de cesser immédiatement toute activité chirurgicale est donc annulée par le Conseil d'État.
CE 25 septembre 2009, M. V., n°311597
Références
■ Substitution de base légale
« Technique contentieuse qui permet au juge administratif de régulariser une décision dépourvue de base légale, prise en dehors du champ d’application de la loi, sur le fondement d’un texte qui n’est plus applicable, ne l’est pas encore, ou sur une base légale erronée. Ce mécanisme, initié par l’arrêt Valley, vise spécifiquement à procéder à la régularisation des motifs de droit d’une décision pour fournir à l’acte une base légale, correcte ou réelle. La substitution doit être possible, c’est-à-dire qu’un autre texte législatif ou réglementaire autorise l’édiction de l’acte dans les mêmes conditions : du point de vue de la procédure à suivre, quant au pouvoir d’appréciation conféré à l’autorité administrative et aux garanties reconnues à l’administré (CE S. 3 déc. 2003, Préfet Seine-Maritime c/ El Bahi, Rec. 479). Le juge dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour opérer la substitution. »
Source : V. Van Lang, G. Gondouin, V. Inserguet-Brisset, Dictionnaire de droit administratif, 5e éd., Sirey, coll. « Dictionnaire », 2008.
■ Code de la consommation
Article L. 221-8 : « Les mesures prévues au présent titre ne peuvent être prises pour les produits et services soumis à des dispositions législatives particulières ou à des règlements communautaires ayant pour objet la protection de la santé ou de la sécurité des consommateurs, sauf, en cas d'urgence, celles prévues aux articles L. 221-5 et L. 221-6. »
■ Code de la santé publique
Article L. 4113-14 (rédaction applicable à la date de la décision attaquée) : « En cas d'urgence, lorsque la poursuite de son exercice par un médecin, un chirurgien-dentiste ou une sage-femme expose ses patients à un danger grave, le représentant de l'État dans le département prononce la suspension immédiate du droit d'exercer pour une durée maximale de cinq mois. Il entend l'intéressé au plus tard dans un délai de trois jours suivant la décision de suspension.
Il informe immédiatement de sa décision le président du conseil départemental compétent, qui saisit sans délai le conseil régional ou interrégional lorsque le danger est lié à une infirmité ou un état pathologique du professionnel, ou la chambre disciplinaire de première instance dans les autres cas. Le conseil régional ou interrégional ou la chambre disciplinaire de première instance statue dans un délai de deux mois à compter de sa saisine. En l'absence de décision dans ce délai, l'affaire est portée devant le Conseil national ou la Chambre disciplinaire nationale, qui statue dans un délai de deux mois. À défaut de décision dans ce délai, la mesure de suspension prend fin automatiquement (…).
Le médecin, le chirurgien-dentiste ou la sage-femme dont le droit d'exercer a été suspendu selon la procédure prévue au présent article peut exercer un recours contre la décision du représentant de l'État dans le département devant le tribunal administratif, qui statue en référé dans un délai de quarante-huit heures (...). »
■ CE 3 décembre 2003, Préfet de la Seine-Maritime c. El Bahi, n° 240267, Lebon 479, concl. Stahl, AJDA 2004. 202, chron. Donnat et Casas.
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