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[ 21 mai 2012 ] Imprimer

Droit du travail - relations individuelles

Suite et (presque) fin de l’affaire Viveo : pas de nullité du plan de sauvegarde de l’emploi pour absence de motif économique

Mots-clefs : Contrat de travail, Licenciement, Plan de sauvegarde de l’emploi

La procédure de licenciement ne peut être annulée en amont, pour cause d’absence de motif économique. Seule la défaillance du plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l’emploi peut entrainer cette nullité.

L’affaire a débuté en 2010, lorsque la société Viveo, rachetée par un concurrent, soumet à son comité d’entreprise un projet de restructuration impliquant la suppression de 64 emplois, ainsi qu’un plan de sauvegarde de l’emploi établi à cet effet. Estimant l’entreprise en bonne santé, à la suite de la lecture du rapport de l’expert, le comité d’entreprise décide de contester cette procédure. Motif invoqué ? L’absence de cause économique.

Après l’échec de sa demande en référé, il saisit le TGI qui le déboute à son tour. Mais dans un arrêt 12 mai 2011 (pôle 6, 2e ch., n° 11-01547), la cour d’appel de Paris crée la surprise en  en faisant droit à la requête du comité d’entreprise. Elle déclare nulle la procédure ainsi que tous les actes subséquents. Les juges du fond estiment en effet que l’absence de motif économique « vide de sa substance cette consultation et prive de fondement légal le projet économique du chef d’entreprise ».

Cette décision, en rupture avec la jurisprudence antérieure, a défrayé la chronique et a fait l’objet de nombreuses réactions, la question étant de savoir si le défaut de motif économique peut, ab initio, frapper de nullité la procédure et donc les licenciements programmés par l’entreprise. L’enjeu est de taille, sur un plan juridique mais également économique puisque confirmer l’arrêt de la cour d’appel reviendrait à créer un nouveau cas de nullité, non expressément prévu par les textes. Le Code du travail (art. L. 1235-10) ne prévoit en effet la nullité de la procédure que dans l’hypothèse de l’insuffisance du plan de reclassement.

Par un arrêt très attendu en date du 3 mai 2012, la chambre sociale met fin aux débats. Elle casse l’arrêt d’appel au visa de l’article L. 1235-10 du Code du travail en en rappelant les termes  : « la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel ». Elle ajoute que « la validité du plan est indépendante de la cause économique du licenciement ».

Deux sanctions doivent donc être distinguées :

– d’un côté la nullité pouvant frapper la procédure de licenciement en cas d’insuffisance du plan de reclassement ;

– et de l’autre, les dommages-intérêts, pouvant être accordés aux salariés en aval, en cas d’absence de caractère réel et sérieux du motif économique.

Attendons à présent la position de la cour d’appel de Versailles, devant laquelle l’affaire sera réexaminée prochainement…

Soc. 3 mai 2012, n°11-20.741, FS-P+B+R+I

Références

■ V. A. Lyon-Caen, « La nullité de la procédure de licenciement collectif pour défaut de motif économique », Dr. ouvrier 2011.537 ; G. Couturier, « Nullités du licenciement : les audaces de la cour d’appel de Paris », Sem. soc. Lamy 2011, n°1509, p. 10 ;  P. Lokiec, « L’affaire Viveo, Le dernier acte ? », D. 2012. 1277.

■ Code du travail

Article L. 1233-61

« Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. 

Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. »

Article L. 1235-10

« Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciements concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, la procédure de licenciement est nulle tant que le plan de reclassement des salariés prévu à l'article L. 1233-61 et s'intégrant au plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas présenté par l'employeur aux représentants du personnel, qui doivent être réunis, informés et consultés. 

La validité du plan de sauvegarde de l'emploi est appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou l'unité économique et sociale ou le groupe. 

Le premier alinéa n'est pas applicable aux entreprises en redressement ou liquidation judiciaires. »

 

Auteur :S. B.


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