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[ 31 mars 2011 ] Imprimer

Procédure pénale

Sursis avec mise à l’épreuve (SME) : appel contre un refus d’autorisation de séjour à l’étranger

Mots-clefs : Sursis avec mise à l’épreuve, Maintien des liens familiaux, Déplacement à l’étranger, Refus d’autorisation, Recours (appel), Droit à un recours effectif

L’appel contre un refus d’autorisation de déplacement à l’étranger fondé sur le maintien des liens familiaux doit être ouvert dès lors que l’absence de recours priverait le condamné de la possibilité de contester cette atteinte et méconnaîtrait son droit à un recours effectif garanti par l’article 13 de la CEDH.

Une personne condamnée à un an d’emprisonnement avec sursis et mise à l’épreuve pendant deux ans saisit le juge de l’application des peines (JAP), en application des dispositions de l’article 132-44, 5° du Code pénal, pour qu’il l’autorise à effectuer un déplacement et un séjour à l’étranger pour maintenir les liens avec sa famille. Le JAP lui opposa un refus, dont elle interjeta appel. Le président de la chambre de l’application des peines (CHAP) autorisa ce recours en se fondant sur l’article 13 de la CEDH garantissant le droit à un recours effectif. Dans son pourvoi, le procureur général près la cour d’appel excipait de l’irrecevabilité de l’appel au motif que le rejet de la demande d’autorisation ne constituait pas une décision refusant de modifier une mesure de mise à l’épreuve ou une obligation résultant de cette mesure au sens de l’article 712-8 du Code de procédure pénale.

Dans sa décision du 16 mars 2011, la chambre criminelle approuve l’initiative du président de la CHAP, en estimant que « l’absence de recours contre un refus d’autorisation de déplacement à l’étranger fondé sur le maintien des liens familiaux priverait la condamnée de la possibilité de contester cette atteinte et méconnaîtrait son droit à un recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme ». Dans le silence de la loi, qui n’organise pas expressément le droit d’interjeter appel dans une telle situation, il convient donc de permettre ce recours afin de garantir le droit du condamné à un recours effectif. La Convention européenne des droits de l’homme, d’application directe devant le juge, vient utilement pallier une lacune de la loi. L’équation paraît simple, elle est tout de même assez rare et mérite, rien qu’à ce titre, d’être signalée.

Le droit à un recours effectif constitue aujourd’hui une garantie autonome, qui trouve fréquemment à s’appliquer en matière d’exécution des peines, que ce soit au contentieux pénitentiaire disciplinaire (CEDH 3 avr. 2001, Keenan c. Royaume-Uni), à la permission de sortir (Crim. 28 oct. 2009) ou à l’isolement (CEDH 27 janv. 2005, Ramirez Sanchez c. France).

Crim. 16 mars 2011, no 10.85-885, F-P+B

Références

Juge à l’application des peines

« Magistrat du siège du tribunal de grande instance, qui constitue, avec le tribunal de l’application des peines, le premier degré des juridictions de l’application des peines.

Les décisions qui relèvent de sa compétence sont de deux sortes : d’une part, des ordonnances motivées prises sur avis de la commission de l’application des peines et sans débat contradictoire ; d’autre part, des jugements motivés rendus à l’issue d’un débat contradictoire après avis du représentant de l’administration pénitentiaire. »

Droit au recours

« Principe juridique fondamental, notamment issu de la Convention européenne des droits de l’Homme, en vertu duquel toute personne intéressée dispose du droit à un recours effectif devant un juge impartial. »

Sources : Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.

Rép. pén., « Prison », par J.-P. Céré et M. Herzog-Evans, spéc. n° 485.

Rép. pén., v° « Sursis avec mise à l’épreuve », par A. Beziz-Ayache, spéc. n° 49.

Rép. pén., v° « Peine (Exécution) », par M. Herzog-Evans, spéc. n° 512.         

CEDH 3 avr. 2001, Keenan c. Royaume-Uni, D. 2002. Chron. 110, spéc. p. 118, obs. J.-P. Céré.

Crim. 28 oct. 2009, n° 09-80.923, D. 2010. 39, note A. Leprieur.

CEDH 27 janv. 2005, Ramirez Sanchez c. France, D. 2005. 1272, note J.-P. Céré ; AJDA 2005. 1388, note D. Costa.

Article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme — Droit à un recours effectif

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. »

Article 132-44 du Code pénal

« Les mesures de contrôle auxquelles le condamné doit se soumettre sont les suivantes :

1o Répondre aux convocations du juge de l'application des peines ou du travailleur social désigné ;

2o Recevoir les visites du travailleur social et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d'existence et de l'exécution de ses obligations ;

3o Prévenir le travailleur social de ses changements d'emploi ;

4o Prévenir le travailleur social de ses changements de résidence ou de tout déplacement dont la durée excéderait quinze jours et rendre compte de son retour ;

5o Obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout déplacement à l'étranger et, lorsqu'il est de nature à mettre obstacle à l'exécution de ses obligations, pour tout changement d'emploi ou de résidence. »

Article 712-8 du Code de procédure pénale

« Les décisions modifiant ou refusant de modifier les mesures mentionnées aux premier et quatrième alinéas de l'article 712-6 ou les obligations résultant de ces mesures ou des mesures ordonnées par le tribunal de l'application des peines en application de l'article 712-7 sont prises par ordonnance motivée du juge de l'application des peines, sauf si le procureur de la République demande qu'elles fassent l'objet d'un jugement pris après débat contradictoire conformément aux dispositions de l'article 712-6.

Toutefois, pour l'exécution d'une mesure de semi-liberté, de placement à l'extérieur ou de placement sous surveillance électronique ou pour l'exécution de permissions de sortir, le juge de l'application des peines peut, dans sa décision, autoriser le chef d'établissement ou le directeur du service pénitentiaire d'insertion et de probation ou, s'agissant des mineurs, le directeur régional de la protection judiciaire de la jeunesse, à modifier les horaires d'entrée ou de sortie du condamné de l'établissement pénitentiaire, ou de sa présence en un lieu déterminé, lorsqu'il s'agit de modifications favorables au condamné ne touchant pas à l'équilibre de la mesure. Il est informé sans délai des modifications opérées et peut les annuler par ordonnance non susceptible de recours. »

 

Auteur :S. L.


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