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Droit bancaire - droit du crédit
TEG : les limites à l’obligation d’information du banquier
Mots-clefs : Banque, Ouverture de crédit, TEG, Taux variable, Exigence d’un écrit, Mentions obligatoires, Irrégularité, Régularisation, Taux effectif, Écart avec le taux communiqué, Manquement à l’obligation d’information (non)
Le banquier qui consent une ouverture de crédit en compte courant ne manque pas à son obligation d’information en indiquant, sur les relevés périodiques de compte de l’emprunteur, le taux effectif global du prêt, régulièrement calculé. Cette mention vaut information de ce taux pour l’avenir à titre indicatif et, suppléant l’irrégularité du taux figurant dans le contrat initial, emporte obligation, pour le titulaire du compte, de payer les intérêts conventionnels à compter de la réception sans protestation ni réserve de cette information, même si le taux constaté a posteriori est différent de celui qui a été ainsi communiqué.
Une société avait conclu avec une banque un contrat d'ouverture de crédit stipulant que les intérêts seraient calculés au taux de 5,333 % l'an, variable à la hausse comme à la baisse. Après avoir remboursé le crédit utilisé, la société avait contesté le mode de calcul et le montant des intérêts perçus par la banque puis l'avait assignée en paiement, soutenant, notamment, qu'elle avait manqué à son obligation d'information sur le taux effectif global (TEG).
La banque se voit condamnée à payer à la société une somme en principal résultant de la substitution du taux légal au taux conventionnel en raison de l'irrégularité affectant le taux effectif global prévu dans l'acte portant ouverture de crédit. La cour d’appel retint, en effet, qu'il n'avait pu être suppléé à cette irrégularité par la mention dudit taux sur les relevés périodiques de compte reçus par la société, même sans protestation ni réserve de sa part, puisque le taux effectif global pratiqué n'avait jamais été identique, pour la période suivant l'envoi d'un arrêté de compte courant, au taux indiqué sur ce document.
Au visa des articles 1907 du Code civil et L. 313-2 du Code de la consommation, cette décision est cassée au motif : « qu'en cas d'ouverture de crédit en compte courant, la mention sur les relevés périodiques de compte du TEG, régulièrement calculé pour la période écoulée, vaut information de ce taux pour l'avenir à titre indicatif, et, suppléant l'irrégularité du taux figurant dans le contrat initial, emporte obligation, pour le titulaire du compte, de payer les intérêts au taux conventionnel à compter de la réception sans protestation ni réserve de cette information, même si le taux effectif global constaté a posteriori, peu important qu'il soit fixe ou variable, est différent de celui qui a été ainsi communiqué ».
Selon l'article L. 313-2 du Code de la consommation, le TEG doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt. Ce texte n'impose aucune règle particulière quant à la forme ou l'emplacement dans le contrat de la mention du TEG. Il suffit que le taux figure de façon claire et précise dans la convention signée par l'emprunteur (Civ.1re, 9 janv. 1985).
Lorsqu'il s'agit d'un prêt à taux fixe, l'exigence est facile à respecter car tous les éléments permettant de déterminer le TEG sont connus. Lorsqu’il s’agit d’un prêt à taux variable, le respect de cette exigence est plus délicat, le TEG appliqué dépendant des conditions d'utilisation du crédit ou de l'évolution des taux d'intérêt, éléments ne pouvant être exactement déterminés au jour de la conclusion du contrat.
C'est la raison pour laquelle, lorsqu'une convention écrite d'ouverture de crédit en compte est conclue, il est admis que le taux effectif soit seulement porté à titre indicatif. L'exigence d'information de l'emprunteur subsiste cependant, la Cour de cassation exigeant que le TEG fasse l'objet d'une double mention, préalable et a posteriori, indiquant le taux effectivement appliqué. Ainsi la Cour veille-t-elle, malgré la variabilité du taux, à ce que le client soit informé préalablement des conditions de calcul et, postérieurement, des conditions effectivement appliquées.
Concernant la première mention, préalable, son rôle est essentiel : l'emprunteur peut déterminer le coût global qu'il peut être conduit à supporter si le crédit lui est effectivement consenti. Elle est requise aussi bien par la première chambre civile que par la chambre commerciale de la Cour de cassation, la première se montrant cependant plus exigeante que la seconde : elle exige, en effet, que le TEG appliqué figure sur l'écrit le constatant au jour du prêt (Civ.1re, 17 janv. 1995), l'indication figurant sur un relevé de compte étant pour elle insuffisante. Pour la chambre commerciale, la mention du taux effectivement appliqué peut ne pas figurer dans la convention initiale, et être simplement communiquée dans un relevé de compte, ou dans tout autre document (Com. 5 oct. 2004). Même pour la chambre commerciale, plus souple dans la mise en œuvre de l’exigence, il n'est cependant pas suffisant que l'indication figure sur les relevés périodiques de compte de l’emprunteur: le taux appliqué doit être déterminé de façon suffisamment précise.
Or les mentions de l'acte d'ouverture de crédit sont insuffisantes dès lors qu'elles se réfèrent, comme en l’espèce, à un taux moyen de cotation, ou encore au taux usuel pratiqué par la banque (Com. 8 nov. 2011). À défaut d'information préalable suffisante, les intérêts ne sont dus qu'à compter de l'information, cette fois régulière, communiquée sur les relevés périodiques de compte de l’emprunteur. Cette information, qui ne vaut que pour l’avenir, a pour effet de suppléer l’irrégularité du taux figurant dans le contrat initial, en sorte que le prêteur échappe à la sanction du manquement à son obligation d'information préalable d'un TEG indicatif - la substitution du taux légal au taux conventionnel.
L'information du client doit aussi être fournie a posteriori, pour lui permettre de connaître le taux lui ayant effectivement été appliqué. Pour cette raison, la mention sur le relevé de compte périodique est, quant à elle, toujours exigée (Com. 5 oct. 2004, préc.), mais la différence entre le TEG constaté a posteriori et celui communiqué ne peut, dans un contrat de prêt à taux variable, constituer à elle seule un manquement de la banque à son obligation d’information.
Com. 10 mars 2015, n°14-11.616
Références
« L'intérêt est légal ou conventionnel. L'intérêt légal est fixé par la loi. L'intérêt conventionnel peut excéder celui de la loi, toutes les fois que la loi ne le prohibe pas.
Le taux de l'intérêt conventionnel doit être fixé par écrit. »
■ Article L. 313-2 du Code de la consommation
« Le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section.
Toute infraction aux dispositions du présent article sera punie d'une amende de 150 000 euros.
Les personnes physiques déclarées coupables encourent également à titre de peines complémentaires l'interdiction, suivant les modalités prévues à l'article 131-27 du code pénal, soit d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, soit d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour leur propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale. Ces interdictions d'exercice ne peuvent excéder une durée de cinq ans. Elles peuvent être prononcées cumulativement. »
■ Civ. 1re, 9 janv. 1985, n°83-13.701, Bull. civ. I, n° 15.
■ Civ. 1re, 17 janv. 1995, n°92-18.211, D. 1995. 213, obs. D. R. Martin.
■ Com. 5 oct. 2004, n°01-12.435, Bull. civ. IV, n° 180, RTD com. 2005. 153, ob. D. Legeais.
■ Com. 8 nov. 2011, n°10-25.131.
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