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Droit des obligations
Transaction homologuée : pas de confusion entre les tiers et les parties !
Mots-clefs : Transaction, Homologation, Force exécutoire, Détermination des parties à la transaction, Cautionnement, Voies d’exécution
La seule intégration d’un engagement de caution dans une transaction à laquelle le juge avait conféré force exécutoire par l’effet de son homologation ne suffit pas à attribuer à celui qui avait personnellement souscrit un tel engagement la qualité de partie à la transaction.
Le président d'un tribunal de grande instance avait conféré force exécutoire à un accord transactionnel conclu entre plusieurs sociétés. Le président de l’une d’elles s’était, par ailleurs, personnellement engagé dans l'acte en qualité de caution, au profit de certaines sociétés parties à l’acte. L’une des sociétés ayant fait pratiquer diverses mesures d'exécution à l'encontre du président, celui-ci avait alors saisi le juge de l'exécution d'une demande tendant à l'annulation de ces mesures. Sa demande avait été rejetée par le premier juge, ce qu’infirma néanmoins la cour d’appel au motif que le président n’étant pas partie à la transaction homologuée, celle-ci ne pouvait constituer un titre exécutoire à son encontre.
La société ayant demandé les mesures d’exécution litigieuses forma un pourvoi en cassation pour contester l’annulation des commandements délivrés au président et la saisie-attribution pratiquée contre lui.
Au soutien de son pourvoi, elle rappela, tout d’abord, le fait que la transaction homologuée contenait l’engagement de caution du président, qui y avait donc souscrit personnellement.
Elle fit ensuite valoir qu'une transaction judiciairement homologuée l'est en toutes ses dispositions, lesquelles bénéficient donc toutes de la formule exécutoire, pour en déduire que l’engagement de caution, contenu dans l’acte transactionnel, devait en conséquence bénéficier de la formule exécutoire.
Enfin, la société prétendait qu'est partie à un acte homologué toute personne qui y a consenti à titre personnel en souscrivant des engagements personnels, ce qui correspond à l’hypothèse de l’espèce.
La thèse du pourvoi est rejetée. La Cour souligne que les juges du fond ont, d'une part, relevé que le protocole transactionnel et la requête tendant à lui conférer force exécutoire ne visaient en tant que parties à la transaction que certaines des sociétés en cause à l'exclusion du président ; qu’ils ont, d’autre part, justement retenu en conséquence que la question se posait de savoir si le président pouvait être considéré comme partie à la transaction rendue exécutoire. Aussi, « c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, interprétant souverainement le titre fondant les poursuites, a considéré que l'engagement de caution [du président], même intégré dans le protocole, ne lui conférait pas la qualité de partie à la transaction à laquelle il avait été donné force exécutoire, ce dont elle a justement déduit que cet acte de caution nécessitait l'obtention d'un titre exécutoire à son encontre pour permettre l'exercice des voies d'exécution ».
L'article 1441-4 du Code de procédure civile dispose que : « Le président du tribunal de grande instance, saisi sur requête par une partie à la transaction, confère force exécutoire à l'acte qui lui est présenté ». De manière plus générale, depuis l'ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 relative à certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, tous les accords auxquels les juridictions, qu’elles relèvent de l'ordre judiciaire ou administratif, ont conféré force exécutoire sont qualifiés de titres exécutoires (C. pr. civ., art. 1565). La transaction en fait naturellement partie. Ainsi la Cour de cassation a-t-elle pu approuver une cour d'appel d’avoir retenu qu’un jugement ayant homologué une transaction lui conférait force exécutoire (Civ. 2e, 27 mai 2004).
La décision rapportée permet d’en comprendre l’enjeu : en l’espèce, la transaction rendue exécutoire par l’effet de l’homologation aurait pu fonder l’exercice de mesures d’exécution du cautionnement dès lors qu’il se trouvait intégré à la transaction. Cela étant, cette force exécutoire ne vaut que pour l’acte homologué, quoiqu’elle s’applique à l’ensemble des dispositions de celui-ci. Et indépendamment même de son homologation judiciaire, la transaction, en tant que contrat, obéit au principe de la relativité contractuelle (C. civ., art. 1165), la loi affirmant d’ailleurs expressément qu’elle n’a autorité de la chose jugée en dernier ressort qu’« entre les parties » (C. civ., art. 2052), de telle sorte qu’une transaction homologuée ne peut avoir de force exécutoire qu’à l’égard des parties à cette transaction (Soc. 31 mars 2009).
En l’espèce, la seule question soulevée était donc de savoir si le dirigeant, dont l’engagement de caution qu’il avait souscrit personnellement se trouvait intégré à l’accord transactionnel, devait en conséquence être considéré comme une partie à la transaction homologuée. La première chambre civile y répond par la négative : en vertu du principe de la relativité contractuelle, la force obligatoire comme exécutoire de l’acte ne pouvait rayonner au-delà du cercle de ses signataires, raison pour laquelle l’exercice des voies d’exécution supposait, en l’espèce, que l’engagement de caution du président soit assorti d’un titre exécutoire propre.
Il ressort de cette décision que les engagements souscrits à l’occasion de la conclusion d’une transaction, même formellement intégrés à celle-ci, n’en constituent pas nécessairement la substance, limitée aux concessions réciproques des parties. Ainsi, l’engagement de caution fut-il vu, en l’espèce, comme un simple accessoire de l’accord principal, auquel le président n’avait pas expressément consenti, sa volonté s’étant limitée à garantir le paiement d’une certaine somme au profit d’une des parties à la transaction.
C’est finalement l’examen du contenu de la transaction qui apparaît déterminant pour faire le départ entre les parties et les tiers à la transaction, et le pouvoir, souverain en la matière, des juges du fond, qui se révèle comme essentiel.
Civ. 1re , 8 janv. 2015, n°13-27.377
Références
■ Code de procédure civile
« Le président du tribunal de grande instance, saisi sur requête par une partie à la transaction, confère force exécutoire à l'acte qui lui est présenté. »
« L'accord auquel sont parvenues les parties à une médiation, une conciliation ou une procédure participative peut être soumis, aux fins de le rendre exécutoire, à l'homologation du juge compétent pour connaître du contentieux dans la matière considérée.
Le juge à qui est soumis l'accord ne peut en modifier les termes. »
■ Ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale.
■ Code civil
« Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121. »
« Les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée en dernier ressort.
Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion. »
■ Civ. 2e, 27 mai 2004, n° 02-13.483.
■ Soc. 31 mars 2009, n°06-46.378.
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