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[ 10 janvier 2013 ] Imprimer

Droit administratif général

Tribunal des conflits : répartition des compétences entre la juridiction de l’ordre judiciaire et la juridiction de l’ordre administratif selon les demandes du litige

Mots-clefs : Compétence, Tribunal des conflits, Convention, Résiliation, Démolition, Ouvrage public, Juge judiciaire, Juge administratif

Le Tribunal des conflits a, dans sa décision du 17 décembre 2012, eu à se prononcer pour une même affaire sur une double répartition des compétences. Ainsi, une demande de résiliation et d’indemnisation des préjudices découlant d’une convention passée entre une personne privée et EDF relative à l’établissement et à l’exploitation d’un poste de transformation sur une propriété privée relève de la compétence du juge judiciaire. Alors que la demande de démolition ou de déplacement de cet ouvrage public est de la compétence du juge administratif.

Dans les années 1960, un homme signe avec EDF (aujourd’hui : ERDF) une convention octroyant à EDF une servitude d’occupation d’une propriété privée en vue d’y établir et d’y exploiter un poste de transformation alimentant le réseau de distribution publique. Le fils du contractant, devenu l’actuel propriétaire des lieux, a demandé au tribunal de grande instance :

– d’une part, la résiliation de cette convention et l’indemnisation des préjudices découlant de l’application de cette convention ;

– et d’autre part, la démolition ou le déplacement du poste de transformation d’électricité édifié sur sa propriété.

Le juge judiciaire s’étant déclaré incompétent, le demandeur saisit le tribunal administratif. Celui-ci renvoie au Tribunal des conflits le soin de décider de la question de compétence relative à la demande.

Sauf disposition législative contraire, la nature juridique d'un contrat s'apprécie à la date à laquelle il a été conclu (T. confl., 16 oct. 2006, Caisse centrale de réassurance c/ Mutuelle des architectes français). Le Tribunal des conflits considère d’une part, que la convention signée entre le propriétaire et EDF ne contient aucune clause exorbitante de droit commun et d’autre part, que le propriétaire n’est pas associé à l’exécution du service public de distribution d’électricité. Il s’agit donc d’une simple convention entre un EPIC (à l’époque de la signature : EDF) et une personne privée. (T. confl., 5 juill. 1999, Union des groupements d'achats publics c/ Société SNC Activ CSA). Aussi, la demande de résiliation de la convention et celle relative à l’indemnisation des préjudices découlant de l’application de cette convention relèvent de la compétence du juge judiciaire.

En revanche, la demande tendant à la démolition ou au déplacement de l’ouvrage public relève par nature de la compétence du juge administratif. Le Tribunal des conflits fait référence à sa jurisprudence M. et Mme Binet c/ Électricité de France, selon laquelle « l'autorité judiciaire ne saurait, sans s'immiscer dans les opérations administratives et empiéter ainsi sur la compétence du juge administratif, prescrire aucune mesure de nature à porter atteinte, sous quelque forme que ce soit, à l'intégrité ou au fonctionnement d'un ouvrage public ; … il n'en va autrement que dans l'hypothèse où la réalisation de l'ouvrage procède d'un acte qui est manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative et qu'aucune procédure de régularisation appropriée n'a été engagée » (T. confl., 6 mai 2002, M. et Mme Binet c/ Électricité de France).

En l’espèce, la demande de démolition ou de déplacement de l’ouvrage public, constitué par le poste de transformation construit par EDF sur la propriété du requérant et dont l’implantation ne procède pas d’un acte manifestement insusceptible de se rattacher à un pouvoir dont dispose l'autorité administrative, relève de la compétence des juridictions de l’ordre administratif.

T. confl. 17 déc. 2012, M .V. c/ Sté Électricité Réseau Distribution France, req. n° 3871

 

Auteur :C. G.

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