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[ 17 janvier 2012 ] Imprimer

Procédure et contentieux administratifs

Un déféré préfectoral relatif à un marché public est un recours de plein contentieux

Mots-clefs : Contentieux administratif, Déféré préfectoral, Collectivités territoriales, Contrat, Marché public, Revirement, Nature du recours, Recours pour excès de pouvoir, Recours de plein contentieux

Par deux arrêts en date du 23 décembre 2011, le Conseil d’État revient sur sa jurisprudence relative à la nature du recours en matière de déféré préfectoral concernant les marchés publics.

À la suite de marchés publics signés par des régies de syndicats intercommunaux avec diverses sociétés, le préfet demande à ces régies de procéder aux retraits des marchés. Devant leurs refus, celui-ci saisit alors le tribunal administratif de déférés tendant à leurs annulations. Le tribunal et la cour administrative d’appel rejettent ces recours.

Par un considérant repris dans ses deux décisions du 23 décembre 2011, le Conseil d’État renverse sa jurisprudence Commune de Sainte-Marie (CE, sect., 26 juill. 1991) qui qualifiait de manière implicite le déféré préfectoral de recours pour excès de pouvoir. Ainsi, les juges du Palais Royal considèrent que le préfet peut « saisir le juge administratif d'un déféré tendant à l'annulation d'un marché public ; qu'eu égard à son objet, un tel recours formé à l'encontre d'un contrat relève du contentieux de pleine juridiction ; qu'il appartient au juge, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier les conséquences ; qu'il lui revient, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité éventuellement commise, soit de prononcer la résiliation du contrat ou de modifier certaines de ses clauses, soit de décider de la poursuite de son exécution, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation par la collectivité contractante, soit enfin, après avoir vérifié si l'annulation du contrat ne porterait pas une atteinte excessive à l'intérêt général ou aux droits des cocontractants, d'annuler, totalement ou partiellement, le cas échéant avec un effet différé, le contrat ».

Ainsi, par ces décisions, le déféré préfectoral est soumis au régime de plein contentieux afin de mieux concilier les principes de légalité et de sécurité juridique, notamment, l’exigence de stabilité des relations contractuelles. Les arrêts du 23 décembre 2011 permettent au Conseil d’État de prononcer les annulations des contrats litigieux sauf si les régies procèdent dans les trois mois aux régularisations demandées : il s’agit, pour ces espèces, de régulariser les marchés en adoptant des délibérations régulières.

CE 23 déc. 2011, Ministre de l'Intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, n°s 348647 et 348648

Références

■ Déféré préfectoral

[Droit administratif]

« Dans le cadre du contrôle administratif exercé par l’État sur l’activité juridique des communes, départements et régions, acte par lequel le préfet défère au tribunal administratif les décisions de ces collectivités locales qu’il considère comme illégales. »

■ Préfet

[Droit administratif]

« Dépositaire unique de l’autorité de l’État dans le département, le préfet occupe un emploi soumis à la décision discrétionnaire du gouvernement. Parmi ses nombreuses fonctions, il représente le Premier ministre et chacun des ministres, il a la haute main sur l’ensemble des services déconcentrés de l’État dans le département, sauf dans quelques cas; il assure le contrôle de légalité des collectivités territoriales du département. »

■ Recours

[Droit administratif]

« (…)

Recours pour excès de pouvoir : recours juridictionnel dirigé, en vue de les faire annuler pour cause d’illégalité, contre des actes unilatéraux émanant soit d’une autorité administrative, soit d’un organisme privé agissant dans le cadre d’une mission de service public. On distingue traditionnellement 4 “ cas d’ouverture ” de ce recours : l’incompétence de l’auteur de l’acte, le vice de forme affectant des formalités substantielles, le détournement de pouvoir, la “ violation de la loi ” comprise comme une illégalité relative aux motifs ou à l’objet même de l’acte.

(…) »

 Pleine juridiction

[Droit administratif/Procédure (principes généraux)]

« On dit qu’une juridiction – spécialement administrative – a des pouvoirs de pleine juridiction quand elle peut à la fois connaître de tous les éléments de fait et de droit d’un litige et prendre toute décision de nature à corriger pleinement la violation du droit qui était intervenue. Par exemple, quand elle peut non seulement annuler une décision administrative ou un contrat mais, selon les cas, par exemple condamner la personne publique à payer une indemnité, ou modifier le contenu d’une décision administrative comme – notamment – en contentieux fiscal. La possibilité pour le plaideur d’accéder à un stade de la procédure à une juridiction disposant de pouvoirs de pleine juridiction est l’une des conditions d’existence d’un « recours effectif », qui est l’une des composantes du concept européen du procès équitable. »

Source : Lexique des termes juridiques 2012, 19e éd., Dalloz, 2011.

■ CE, sect., 26 juill. 1991, Commune de Sainte-Marie, n° 117717 Lebon AJDA 1991. 693, chron. Maugüé et Schwartz ; RFDA 1991. 966, concl. Legal.

 

 

Auteur :C. G.


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