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[ 29 mars 2024 ] Imprimer

Libertés fondamentales - droits de l'homme

Une commune peut-elle mettre à disposition à titre gratuit un local municipal pour une association cultuelle ?

Une commune peut prêter un local municipal à une association cultuelle sous certaines conditions rappelées et précisées par le Conseil d’État dans une décision rendue le 18 mars 2024.

CE 18 mars 2024, n° 471061 A

Un maire avait autorisé une association musulmane à occuper un local municipal à titre gratuit pour une matinée afin de célébrer la fête musulmane de l'Aïd-el-Fitr. Des requérants ont alors demandé l’annulation de cette décision. Le Conseil d’État précise ici que la seule gratuité ne caractérise pas à elle seule une libéralité prohibée par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905.

■ Rappel des conditions de mise à disposition d'un local communal pour l'exercice d'un culte par une association 

Selon l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales : « Des locaux communaux peuvent être utilisés par les associations ou partis politiques qui en font la demande. / Le maire détermine les conditions dans lesquelles ces locaux peuvent être utilisés, compte tenu des nécessités de l'administration des propriétés communales, du fonctionnement des services et du maintien de l'ordre public. / Le conseil municipal fixe, en tant que de besoin, la contribution due à raison de cette utilisation. / Les locaux communaux peuvent également être mis à la disposition des organisations syndicales, dans les conditions prévues à l'article L. 1311-18. »

Un premier arrêt (CE 19 juill. 2011, Cne de Montpellier, n° 313518) est venu préciser ces dispositions. Celles-ci permettent à une commune, en tenant compte des nécessités mentionnées à cet article, d'autoriser, dans le respect du principe de neutralité à l'égard des cultes et du principe d'égalité, l'utilisation d'un local qui lui appartient pour l'exercice d'un culte par une association dès lors que les conditions financières de cette autorisation excluent toute libéralité et, par suite, toute aide à un culte. Une commune ne peut rejeter une demande d'utilisation d’un local lui appartenant au seul motif que cette demande lui est adressée par une association dans le but d'exercer un culte. En revanche, les collectivités territoriales ne peuvent, sans méconnaître les dispositions de la loi du 9 décembre 1905, décider qu'un local dont elles sont propriétaires sera laissé de façon exclusive et pérenne à la disposition d'une association pour l'exercice d'un culte et constituera ainsi un édifice cultuel.  

Un second arrêt (CE 7 mars 2019, Cne de Valbonne, n° 417629) ajoute à la précision jurisprudentielle de 2011 que les collectivités territoriales peuvent donner à bail, pour un usage exclusif et pérenne, à une association cultuelle, un local existant de leur domaine privé sans méconnaître les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 dès lors que les conditions, notamment financières, de cette location excluent toute libéralité. 

Rappelant les précisions de 2009 et 2011, le Conseil d’État précise, dans sa décision du 18 mars 2024, la notion de contribution.

■ Précision sur la notion de contribution due à raison d’une mise à disposition 

Lorsque le conseil municipal détermine la contribution due par une association à raison de l'utilisation d'un local communal en vertu des dispositions de l'article L. 2144-3 du code général des collectivités territoriales, lesquelles dérogent à celles, générales, de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques, il lui appartient d'arrêter le montant de cette contribution, dans le respect du principe d'égalité, de telle façon qu'il ne soit pas constitutif d'une libéralité. 

Le Conseil d’État précise en l’espèce que l'existence d'une libéralité ne saurait résulter du simple fait que le local est mis à disposition gratuitement et est appréciée compte tenu de la durée et des conditions d'utilisation du local communal, de l'ampleur de l'avantage éventuellement consenti et, le cas échéant, des motifs d'intérêt général justifiant la décision de la commune. Ainsi une commune a la possibilité de prêter gratuitement un local municipal à une association religieuse sous certaines conditions.

Références

■ CE 19 juill. 2011, Cne de Montpellier, n° 313518 A: AJDA 2011. 1667, chron. Domino et Bretonneau ; ibid. 2014. 124, chron. Hubac ; D. 2011. 2025, édito Rome ; AJCT 2011. 515, obs. Perrier ; RFDA 2011. 967, concl. Geffray ; JCP Adm. 2011, n° 2307, note Amédro; BJCL 2011. 507, concl. Geffray. 

■ CE 7 mars 2019, Cne de Valbonne, n° 417629 A: AJDA 2019. 551 ; ibid. 980, chron. Malverti et Beaufils ; JA 2019, n° 597, p. 10, obs. de Montecler ; AJCT 2019. 305, obs. Juilles  

 

Auteur :Christelle de Gaudemont

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