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Droit de la consommation
Vente en l’état futur d’achèvement : application de la prescription biennale issue de l’article L. 218-2 du Code de la consommation
Mots-clefs : Prescription biennale, Vente en l’état futur d’achèvement, Action en paiement, Immeuble
Aux termes de l’article L. 218-2 du Code de la consommation, l'action d'une société, professionnelle de l'immobilier, en règlement du solde du prix d'un immeuble à construire vendu à un consommateur, se prescrit par deux ans.
La vente en l’état futur d’achèvement, contrat par lequel le vendeur s’oblige à édifier un immeuble dans un certain délai, est source de contentieux notamment en cas d’impayé de l’acheteur. A ce sujet, la première chambre civile de la Cour de cassation a déjà jugé que l’action en paiement du solde du prix se prescrit par deux ans (Civ. 1re, 17 févr. 2016, n° 14-29.612). Deux arrêts de la troisième chambre civile, en date du 26 octobre 2017, confirment ce principe.
Dans ces affaires, les faits sont identiques. Par acte notarié du 26 novembre 2004, un constructeur a vendu un immeuble en l’état futur d’achèvement et n’a pas respecté le délai de livraison convenu avec l’acheteur qui, en conséquence, n’a pas réglé le solde du prix. Ainsi, le vendeur a assigné l’acheteur en paiement de ladite somme. En appel, les juges du fond déclarent irrecevable la demande du constructeur compte tenu de la prescription de son action. La Cour de cassation considère qu’ils ont statué à bon droit au regard de l’article L. 218-2 du Code de la consommation, anciennement L. 137-2. Dans ces arrêts de rejet, la Haute juridiction précise les conditions d’application dudit article.
S’agissant du champ d’application de la prescription biennale, elle affirme que l’article L. 218-2 « de portée générale, avait, en l’absence de dispositions particulières, vocation à s’appliquer à l'action de la société Eurofoncier, professionnelle de l'immobilier en paiement du solde du prix de l’immeuble (….) ». Ainsi, pour la Cour, le code de la consommation doit s’appliquer dans la mesure où le constructeur est un professionnel et l’acquéreur est un consommateur. La prescription quinquennale de l’article 2224 du Code civil ne doit pas s’appliquer. Un professionnel s’entend en effet de « toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui agit à des fins entrant dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, y compris lorsqu'elle agit au nom ou pour le compte d'un autre professionnel ». Le consommateur est, quant à lui, une « personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale ou agricole ». Cette définition, reprise et modifiée par la loi Hamon (L. n° 2017-203, 21 févr. 2017, art. 3 ; C. consom., art. liminaire), est en l’espèce respectée. Aussi, la Haute juridiction applique l’adage « le spécial déroge au général » (lex specialia generalibus derogant) selon lequel les règles spécifiques évincent les règles générales. En l’espèce, les ventes litigieuses consistent en la fourniture d’un bien et ne font l’objet d’aucune disposition particulière exclusivesdu droit de la consommation à la différence, par exemple, du bail d’habitation régi par la loi no 89-462 du 6 juillet 1989 (Civ. 3e, 26 janv. 2017, no 15-27.580). Par conséquent, l’article L. 218-2 relatif à l’ensemble des contrats de fourniture d’un bien s’applique (V. dans le même sens, Civ. 1re, 11 févr. 2016, no 14-22.938).
S’agissant du régime de la prescription, la Cour considère implicitement que le point de départ du délai de prescription prévu par l'article L. 218-2 du Code de la consommation se situe, dans le cas d’une action en paiement, au jour de la livraison, en l’espèce le 23 février 2006. L’action était donc prescrite car elle avait été engagée en 2010 c’est-à-dire plus de deux ans (quatre ans) après le délai ouvert par ce texte.
Ces arrêts du 26 octobre 2017 ont le mérite d’affirmer la portée d’un texte protecteur des intérêts du consommateur. L’esprit du droit de la consommation , « bras armé de la défense du consommateur » (S. Le Gac-Pech, Droit de la consommation, 1re éd., Dalloz, 2017, coll "Mementos", p. 1) est conservé.
Civ. 3e, 26 oct. 2017, no 16-13.591
Civ. 3e, 26 oct. 2017, no 16-13.592
Références
■ Civ. 3e, 26 janv. 2017, no 15-27.580 P: D. 2017. 388, note V. Pezzella ; ibid. 1149, obs. N. Damas ; AJDI 2017. 443, obs. N. Damas ; ibid. 498, étude M. Moreau et Joséphine Adda ; RTD civ. 2017. 372, obs. H. Barbier.
■ Civ. 1re, 11 févr. 2016, no 14-22.938 P: D. 2016. 870, note M. Lagelée-Heymann ; ibid. 2305, obs. D. R. Martin et H. Synvet ; ibid. 2017. 539, obs. H. Aubry, E. Poillot et N. Sauphanor-Brouillaud ; AJDI 2016. 445, obs. G. Valdelièvre ; RDI 2016. 269, obs. H. Heugas-Darraspen ; RTD civ. 2016. 364, obs. H. Barbier.
■ Civ. 1re, 17 févr. 2016, no 14-29.612 : D. 2016. 477.
■ S. Le Gac-Pech, Droit de la consommation, 1re éd., Dalloz, 2017, coll. "Mementos", p. 1.
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