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Vente : la pollution ne justifie pas la résolution
La pollution d’un étang situé dans une propriété à usage d’habitation ne constitue pas un vice caché.
Par acte authentique, un couple avait vendu sa maison d’habitation avec des dépendances et deux plans d’eau au prix principal de 450 000 €. Soutenant au moyen d’une expertise que l’eau des étangs de leur nouvelle propriété était polluée, les acheteurs avaient assigné le vendeur en résolution de la vente sur le fondement de la garantie des vices cachés, du dol et d’un manquement à leur obligation d’information.
Leur action fut rejetée par la cour d’appel, dont la Cour de cassation confirme le raisonnement en jugeant que selon le rapport d’expertise, « le vice n’entraînait qu’une perte d’usage partielle du plan d’eau qui n’affectait qu’un élément de l’agrément extérieur de la propriété et n’était pas de nature à la rendre impropre à son usage » et qu’en outre, « les acquéreurs ne justifiaient pas d’avoir informé leurs vendeurs de ce que la qualité de l’eau des étangs était déterminante de leur achat ni qu’ils n’auraient pas acquis ou n’auraient donné qu’un moindre prix de la propriété comprenant une maison d’habitation, des dépendances et un garage, s’ils avaient connu la perte partielle d’usage du plan d’eau ».
Un acheteur insatisfait de son acquisition peut invoquer, à la condition que la chose acquise se révèle impropre à son usage normal, la garantie des vices cachés. En effet, le vendeur est tenu d’une garantie légale à raison des défauts cachés de la chose, à condition qu’ils « la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus » (C. civ., art. 1641). Ainsi le vendeur doit-il délivrer une chose qui soit apte à remplir l’usage en vue de laquelle elle a été acquise.
Toutefois, pour être efficacement mise en œuvre, cette garantie suppose de caractériser plusieurs éléments dont la réunion établit l’existence d’un vice caché, étant précisé que la conformité de la chose à sa destination normale relève de l’appréciation souveraine des juges du fond (Civ. 3e, 22 janv. 1997, n° 95-11.045) : un défaut interne à la chose, invisible au jour de sa réception, et suffisamment grave pour affecter son usage habituel.
C’est ce dernier critère qui, en l’espèce, faisait défaut, empêchant ainsi l’action des acheteurs d’aboutir. Certes, en l’absence de tests effectués préalablement à la vente pour apprécier la qualité de l’eau, la pollution des étangs pouvait constituer un défaut caché d’une partie de la chose vendue, étant entendu que le vice caché peut, en matière d’acquisition immobilière, autant résulter d’un défaut affectant l’immeuble lui-même que d’un trouble ayant son origine dans un élément qui lui est extérieur, tel un élément d’équipement de l’immeuble (Civ. 3e, 6 oct. 2004, n° 03-12.497) ou, comme dans la décision rapportée, l’étang d’une propriété. Mais rien n’établissait en l’espèce que le vice décelé rendait l’immeuble acquis impropre à sa destination – l’habitation, ou en diminuait suffisamment gravement l’usage pour accueillir l’action des acheteurs. En effet, le critère lié à la gravité suffisante du vice condamne le succès de l’action en garantie lorsque ce dernier ne cause à l’acheteur qu’une simple diminution de l’agrément escompté de la chose acquise (comp. Civ. 3e, 8 juin 2006, n° 04-19.069- constitue un vice caché le niveau élevé de pollution d’un immeuble rendant risquée pour la santé toute opération de construction).
En revanche, le motif avancé par la Cour quant à la nécessité d’un vice déterminant du consentement est plus contestable : si elle pouvait valablement justifier le rejet de la demande des acheteurs fondée sur le dol et le manquement à l’obligation d’information du vendeur, elle semble impropre à justifier sa décision de rejet de l’action engagée sur le fondement de la garantie des vices cachés dès lors qu’en principe, le vendeur est tenu de la garantie à raison du défaut caché de la chose vendue qui rend l'un de ses éléments impropre à sa destination normale sans que l'acquéreur ait alors à justifier que l'usage normal de cet élément était déterminant de son consentement (Com. 7 févr. 1995, n° 93-12.940).
Civ. 3e, 11 juill. 2019, n° 18-16.848
Références
■ Civ. 3e, 22 janv. 1997, n° 95-11.045 P
■ Civ. 3e, 6 oct. 2004, n° 03-12.497 P : D. 2004. 2694 ; AJDI 2005. 423, obs. F. Cohet-Cordey
■ Civ. 3e, 8 juin 2006, n° 04-19.069 P
■ Com. 7 févr. 1995, n° 93-12.940
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