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Droit européen et de l'Union européenne
WIFI gratuit et protection des droits d’auteurs : qui est responsable ?
Mots-clefs : Droit de propriété intellectuelle, Droit d’auteurs, Liberté d’entreprendre, Droit à l’information, Internet, WIFI, Violation, Charte des droits fondamentaux
La Cour de justice s’appuyant sur la directive n° 2000/31/CE relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, juge que la responsabilité d’un professionnel ne peut pas être engagée pour violation de droits d’auteur par un utilisateur, lorsqu’il met à disposition un accès gratuit à un réseau WIFI pour effectuer la promotion de ses produits. Cependant, le professionnel ne peut être totalement passif face à ces violations, le juge national pouvant lui imposer de prendre les mesures nécessaires pour empêcher une réitération du comportement et protéger les droits fondamentaux de la propriété intellectuelle. L’intervention du juge doit alors être proportionnée afin de concilier la protection des droits de la propriété intellectuelle avec la liberté d’entreprendre et le droit à l’information.
La violation des droits d’auteur au moyen de l’accès à internet constitue une vraie difficulté pour les détenteurs de ces droits. Cette situation est accentuée par l’accès à des réseaux WIFI dont le contrôle n’est pas toujours suffisamment strict. Le droit de l’Union n’ignore pas cette question et encadre la protection des droits notamment au travers de la directive n° 2000/31/CE du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information.
Cette directive a été au centre d’un contentieux opposant le gérant d’une entreprise proposant à la vente ou à la location du matériel d’illumination et de sonorisation à l’entreprise Sony. Afin de développer son activité, ce dernier avait mis à disposition gratuitement et anonymement son réseau WIFI pour les clients potentiels du quartier. Cependant, en l’absence de sécurisation, cet accès a également été le moyen de violer des droits d’auteur, une œuvre musicale ayant partagé par internet à partir de son réseau. Poursuivi par Sony, le juge national devait déterminer si le gérant pouvait être tenu pour responsable de cette violation.
Avant de se prononcer, la Cour de justice devait déterminer si la directive n°2003/31/CE était applicable au litige en cause. La directive s’applique dès lors que l’activité constitue un « service de la société de l’information », ce que la Cour reconnait pour « toute action de promotion d’un commerçant, ce qui était l’hypothèse en l’espèce ».
Ensuite, la Cour devait examiner si la responsabilité du commerçant pouvait être engagée. Le principe résultant de la directive est expressément l’exclusion de la responsabilité des prestataires intermédiaires si trois conditions cumulatives sont réunies. La première condition est que le prestataire ne doit pas être à l’origine de la transmission, la deuxième est qu’il ne doit pas sélectionner le destinataire de la transmission et la troisième est qu’il ne doit ni sélectionner ni modifier les informations faisant l’objet de la transmission. Ces trois conditions signifient que la responsabilité est exclue dès lors que la prestation offerte par le réseau WIFI se limite à un simple transport d’information et qu’il n’y a pas d’intervention sur le contenu des données transférées.
Toutefois, cette exclusion de la responsabilité n’implique pas que le commerçant adopte une attitude passive. En effet, les droits d’auteur entrent dans le champ de la protection des droits de propriété intellectuelle de l’article 17 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union. Cette protection doit néanmoins être proportionnée et conciliée avec le droit du commerçant à faire la publicité de son activité au regard de la liberté d’entreprise (Charte UE, art. 16) et le droit à l’information des citoyens (Charte UE, art. 11).
Cette conciliation, la Cour la garantit en reconnaissant que le titulaire des droits peut demander à une autorité ou à une juridiction nationale de mettre fin à toute violation des droits d’auteur commise par les clients ou alors de prendre les mesures nécessaires pour prévenir de telles violations. Ainsi, une juridiction peut prononcer une injonction pour mettre en œuvre une meilleure sécurisation du réseau, notamment par l’instauration d’un mot de passe, dont la divulgation peut dépendre de l’identification préalable du demandeur. Cependant, les mesures prises doivent être proportionnées, aussi la Cour écarte-t-elle la possibilité de mettre en place une obligation générale de surveillance des informations échangées et l’arrêt de la connexion.
CJUE 15 septembre 2016, Tobias Mc Fadden c/ Sony Music Entertainment Germany GmbH, n° C-484/14
Références
■ Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
Article 11
« Liberté d’expression et d’information. 1. Toute personne a droit à la liberté d’expression. Ce droit comprend la liberté d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu’il puisse y avoir ingérence d’autorités publiques et sans considération de frontières.
2. La liberté des médias et leur pluralisme sont respectés. »
Article 16
« Liberté d’entreprise. La liberté d’entreprise est reconnue conformément au droit communautaire et aux législations et pratiques nationales. »
Article 17
« Droit de propriété. 1. Toute personne a le droit de jouir de la propriété des biens qu’elle a acquis légalement, de les utiliser, d’en disposer et de les léguer. Nul ne peut être privé de sa propriété, si ce n’est pour cause d’utilité publique, dans des cas et conditions prévus par une loi et moyennant en temps utile une juste indemnité pour sa perte. L’usage des biens peut être réglementé par la loi dans la mesure nécessaire à l’intérêt général.
2. La propriété intellectuelle est protégée. »
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