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Droit des obligations
Caractère intentionnel du manquement au devoir de loyauté du vendeur
Mots-clefs : Vente, Vice du consentement, Réticence dolosive, Amiante, Préjudice certain, Dommages-Intérêts
Constitue une réticence dolosive le fait pour un vendeur d’avoir manqué à son devoir général de loyauté en dissimulant intentionnellement à l’acheteur la présence d’amiante dans l’immeuble objet de la vente.
Une femme a acquis, par acte authentique, un pavillon préfabriqué. Au cours de travaux de rénovation, elle a découvert la présence d’amiante et, après expertise, a assigné les vendeurs en dommages-intérêts sur le fondement de la réticence dolosive.
Il faut préciser qu’à l’époque des faits le vendeur n’était tenu qu’à un devoir général de loyauté et non, comme aujourd’hui, de remettre un diagnostic technique comprenant un état sur la présence ou l'absence de matériaux ou produits contenant de l'amiante (art. L. 271-4 CCH ; art. L. 1334-13 CSP).
Rappelons que s’il appartient au juge de constater l’intention dolosive de nature à vicier le consentement du contractant (Civ. 1re, 10 juill. 1995), cette constatation ne résulte pas uniquement du seul manquement à l’obligation précontractuelle d’information : s’y ajoutent celles du caractère intentionnel de ce manquement et d’une erreur déterminante provoquée par celui-ci pour la victime qui n’aurait alors pas contracté (v. Com. 28 juin 2005).
En l’espèce, la Haute cour confirme la décision des juges du fond qui ont souverainement constaté l’intention dolosive du vendeur qui, au moment de la vente, avait connaissance de la présence d’amiante. Ce dernier avait donc manqué au devoir de loyauté qui s'impose à tout contractant et caractérisait une réticence dolosive déterminante du consentement de l’acheteur au sens de l'article 1116 du Code civil.
En outre, la requérante sollicitait, non la nullité de la vente, comme elle était en droit de le faire, mais l’allocation de dommages-intérêts en réparation de son préjudice du fait du coût du désamiantage (art. 1382 C. civ. ; Civ. 1re, 28 mai 2008). Ainsi, pour qualifier le caractère certain du préjudice subit par la victime, et faire droit à sa demande, les juges se sont attachés aux conséquences qu’a pu engendrer le silence du vendeur, à savoir le risque auquel la victime s’exposait lors de la réalisation de ses travaux de rénovation et la nécessité pour elle de procéder au désamiantage. Notons que l’argument des avocats du vendeur selon lequel l’acquéreur n’avait pas clairement exprimé sa volonté d’acheter un immeuble sans amiante n’a pas été retenu par les juges, une chance pour la santé de la victime…
Civ. 3e, 16 mars 2011, n°10-10.503
Références
« En matière contractuelle, le dol désigne, d’une part, au stade de la formation de l’acte, l’ensemble des tromperies (manœuvre frauduleuse, mensonge ou réticence blâmable) par lesquelles une partie à un acte juridique provoque chez l’autre partie une erreur qui la détermine à donner son consentement à cet acte., d’autre part, au stade de son exécution, la faute du débiteur qui se dérobe intentionnellement à ses obligations. »
« Silence gardé volontairement par une personne sur un point qu’elle devrait révéler. Dans certaines circonstances la réticence émanant d’un cocontractant est constitutive de dol. »
« Fait de nature à entraîner l’altération du consentement et, par voie de conséquence, la nullité de l’acte juridique. Les vices du consentement sont : l’erreur, le dol, la violence. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
■ Civ. 1re, 10 juill. 1995, n°93-17.388, RTD civ. 1996. 390, obs. Mestre
■ Com. 28 juin 2005, Bull. civ. IV, n°140 ; D. 2006. 2774, note Chauvel ; RTD civ. 2005. 591, obs. Mestre et Fages.
■ Civ. 1re, 28 mai 2008, Bull. civ. I, n°154, RTD civ. 2008. 476, obs. Fages.
■ Code civil
« Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces manœuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.
Il ne se présume pas et doit être prouvé. »
« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
■ Article L. 1334-13 du Code de la santé publique
« Un état mentionnant la présence ou, le cas échéant, l'absence de matériaux ou produits de la construction contenant de l'amiante est produit, lors de la vente d'un immeuble bâti, dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles L. 271-4 à L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation. »
■ Article L. 271-4 du Code de la construction et de l’habitation
« I. - En cas de vente de tout ou partie d'un immeuble bâti, un dossier de diagnostic technique, fourni par le vendeur, est annexé à la promesse de vente ou, à défaut de promesse, à l'acte authentique de vente. En cas de vente publique, le dossier de diagnostic technique est annexé au cahier des charges.
Le dossier de diagnostic technique comprend, dans les conditions définies par les dispositions qui les régissent, les documents suivants :
1° Le constat de risque d'exposition au plomb prévu aux articles L. 1334-5 et L. 1334-6 du code de la santé publique ;
2° L'état mentionnant la présence ou l'absence de matériaux ou produits contenant de l'amiante prévu à l'article L. 1334-13 du même code ;
3° L'état relatif à la présence de termites dans le bâtiment prévu à l'article L. 133-6 du présent code ;
4° L'état de l'installation intérieure de gaz prévu à l'article L. 134-6 du présent code ;
5° Dans les zones mentionnées au I de l'article L. 125-5 du code de l'environnement, l'état des risques naturels et technologiques prévu au deuxième alinéa du I du même article ;
6° Le diagnostic de performance énergétique prévu à l'article L. 134-1 du présent code ;
7° L'état de l'installation intérieure d'électricité prévu à l'article L. 134-7 ;
8° Le document établi à l'issue du contrôle des installations d'assainissement non collectif mentionné à l'article L. 1331-11-1 du code de la santé publique.
Les documents mentionnés aux 1°, 4° et 7° ne sont requis que pour les immeubles ou parties d'immeuble à usage d'habitation.
Le document mentionné au 6° n'est pas requis en cas de vente d'un immeuble à construire visée à l'article L. 261-1.
Lorsque les locaux faisant l'objet de la vente sont soumis aux dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ou appartiennent à des personnes titulaires de droits réels immobiliers sur les locaux ou à des titulaires de parts donnant droit ou non à l'attribution ou à la jouissance en propriété des locaux, le document mentionné au 1° porte exclusivement sur la partie privative de l'immeuble affectée au logement et les documents mentionnés au 3°, 4° et 7° sur la partie privative du lot.
II. - En l'absence, lors de la signature de l'acte authentique de vente, d'un des documents mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4°, 7° et 8° du I en cours de validité, le vendeur ne peut pas s'exonérer de la garantie des vices cachés correspondante.
En l'absence, lors de la signature de l'acte authentique de vente, du document mentionné au 5° du I, l'acquéreur peut poursuivre la résolution du contrat ou demander au juge une diminution du prix.
En cas de non-conformité de l'installation d'assainissement non collectif lors de la signature de l'acte authentique de vente, l'acquéreur fait procéder aux travaux de mise en conformité dans un délai d'un an après l'acte de vente.
L'acquéreur ne peut se prévaloir à l'encontre du propriétaire des informations contenues dans le diagnostic de performance énergétique qui n'a qu'une valeur informative. »
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