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Résiliation unilatérale fautive d’un contrat de concession

[ 30 octobre 2013 ] Imprimer

Droit des obligations

Résiliation unilatérale fautive d’un contrat de concession

Chaque mois, retrouvez le commentaire d’une décision de justice issue de l’actualité jurisprudentielle.

Ce mois-ci, Dalloz Actu Étudiant vous propose de commenter l’arrêt Com. 8 octobre 2013, pourvoi n°12-22.952, relatif à la résiliation fautive d’un contrat de concession automobile.

Arrêt

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mai 2012), que la Société d'exploitation du garage Royal (la SEGR) et sa filiale, la société Garage Royal, dirigées par la famille X..., ont représenté les marques du groupe Fiat aux termes de trois contrats de concession exclusive à durée indéterminée, jusqu'à ce que la société Fiat France (la société Fiat), procède à leur résiliation en mars 2001 avec un préavis de vingt-quatre mois ; que l'établissement des comptes entre les parties ayant donné lieu à diverses critiques, la société Fiat a fait assigner la SEGR et le propriétaire de son fonds de commerce en paiement de diverses sommes ; que la SEGR et la société Garage Royal, intervenant volontaire, invoquant le caractère abusif de cette résiliation au regard, notamment, des investissements réalisés en 1998 pour la représentation de la marque Alfa Roméo et des pourparlers de cession des fonds de commerce qui étaient en cours à la date à laquelle elle est intervenue, ont formé des demandes reconventionnelles, Mme X... (Mme X...) sollicitant également des dommages-intérêts en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Fiat-Lancia exploité par la société SEGR ; 

Sur le premier moyen : 

Attendu que la société Fiat fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la résiliation des contrats de concession est intervenue dans des conditions abusives, et de l'avoir condamnée à payer certaines sommes à Mme X..., en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Fiat-Lancia, et à la SEGR, en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Alfa Roméo, alors, selon le moyen : 

1°/ qu'en vertu de la liberté contractuelle, le concédant peut rompre à tout moment un contrat à durée indéterminée ; qu'aucune obligation de motivation de la rupture ne pèse sur le concédant, sauf stipulation expresse contraire ; qu'en l'espèce, pour décider que la société Fiat aurait résilié abusivement le contrat de concession, la cour d'appel a relevé que le concédant aurait précipité « la notification de la résiliation, sans même invoquer un intérêt personnel impératif à préserver » ; que, ce faisant, la cour d'appel a retenu que la société Fiat aurait commis une faute consistant à ne pas disposer d'un motif justifiant la date de la notification de la résiliation ; qu'en statuant ainsi, quand la résiliation d'un contrat à durée indéterminée est libre et peut intervenir, sans motif, à tout moment, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; 

2°/ qu'un concédant est en droit de rompre à tout moment un contrat de concession à durée indéterminée, sous réserve que le concessionnaire puisse disposer d'un temps suffisant pour amortir les investissements qui lui ont été demandés, s'ils sont demandées par le constructeur, ce qui est contesté en l'espèce ; que la durée nécessaire à l'amortissement des investissements doit s'apprécier en prenant en compte non pas la date à laquelle la résiliation est notifiée au concessionnaire, mais la date d'échéance du préavis qui marque le terme des relations contractuelles entre les parties puisque l'amortissement peut continuer à s'effectuer durant la période de préavis ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que les investissements prétendument commandés par la société Fiat pour la présentation des véhicules de marque Alfa Roméo devaient être amortis le 30 septembre 2002 ; que la résiliation décidée par la société Fiat le 21 mars 2001 n'était donc pas abusive puisqu'elle ne devait prendre effet que le 22 mars 2003, après écoulement d'un préavis de deux ans permettant l'amortissement complet des investissements ; qu'en décidant pourtant que la résiliation litigieuse était abusive, en relevant que, pour apprécier la bonne foi de la société Fiat, il fallait se placer « non à l'échéance du préavis, mais au moment de la résiliation intervenue », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; 

3°/ que le concédant n'étant pas débiteur d'une obligation d'assistance du concessionnaire en vue de sa reconversion, il n'est pas tenu de favoriser la reprise par un tiers des actifs de son concessionnaire ; qu'en conséquence, il ne saurait être fait grief à un concédant d'avoir résilié un contrat de concession à une époque où son concessionnaire discutait avec un repreneur éventuel ; qu'en l'espèce, pour décider que la société Fiat aurait résilié abusivement le contrat de concession, la cour d'appel a relevé « qu'à la date de la notification de la résiliation, le concédant connaissait, pour en être à l'origine, l'existence de pourparlers engagés avec le repreneur », M. Y...; qu'en statuant ainsi, cependant que la société Fiat n'était nullement tenue d'assister ses concessionnaires en vue d'assurer leur reconversion par reprise de leurs actifs, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; 

4°/ que la décision du concédant de résilier le contrat de concession, prise pendant que le concessionnaire négociait une reprise de ses actifs par un tiers, ne fait nullement obstacle au succès des négociations avec le repreneur ; qu'en effet, les contrats de concession, conclus intuitu personae, n'étant pas librement cessibles et l'agrément du concédant devant toujours être obtenu par le repreneur éventuel, le simple fait que les contrats de concession soient rompus ne modifie en rien la situation du repreneur intéressé qui devra toujours obtenir le consentement du concédant ; qu'en l'espèce, pour décider que la société Fiat aurait résilié abusivement le contrat de concession, la cour d'appel a relevé « qu'à la date de la notification de la résiliation, le concédant connaissait, pour en être à l'origine, l'existence de pourparlers engagés avec le repreneur », M. Y...; qu'en statuant ainsi, cependant que la résiliation par la société Fiat des contrats de concession ne faisait nullement obstacle à la réussite des négociations entreprises par les concessionnaires en vue de leur reconversion par reprise de leurs actifs, dans la mesure où le repreneur aurait dû, en toute hypothèse, obtenir l'agrément du concédant exigé expressément par les contrats de concession avant toute cession, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ; 

5°/ que sauf abus, le refus d'agrément opposé par un concédant au candidat à la reprise des actifs de son concessionnaire n'est pas fautif ; qu'il appartient aux juges du fond de caractériser en quoi le refus d'agrément serait abusif ; qu'en l'espèce, pour décider que la société Fiat aurait résilié abusivement le contrat de concession, la cour d'appel a postulé, sans l'établir, que le refus d'agrément initialement opposé à M. Z...était abusif ; qu'elle a relevé « qu'en refusant d'agréer M. Z..., puis en l'agréant avec retard quelques mois avant la fin du préavis, alors que les négociations avec M. Y...avaient échoué par sa faute, sans même invoquer un intérêt personnel impératif à préserver, et sans même répondre à la lettre de la société Garage Royal lui faisant part de l'urgence à donner cet agrément » le concédant aurait agi avec mauvaise foi ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que le refus d'agrément critiqué était illégitime, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil ; 

6°/ que sauf abus, le refus d'agrément opposé par un concédant au candidat à la reprise des actifs de son concessionnaire n'est pas fautif ; que lorsqu'il a été conventionnellement stipulé que le refus d'agrément devait être motivé, les motifs légitimes avancés par le concédant, même tardivement, excluent tout abus ; qu'en l'espèce, pour décider que la société Fiat aurait résilié abusivement le contrat de concession, la cour d'appel a relevé « qu'en refusant d'agréer M. Z..., sans même invoquer un intérêt personnel impératif à préserver, et sans même répondre à la lettre de la société Garage Royal lui faisant part de l'urgence à donner cet agrément » le concédant aurait agi avec mauvaise foi ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il lui était pourtant demandé, si le refus d'agrément initialement opposé à M. Z...n'avait pas une cause légitime tenant à l'agrément préalablement accordé par la société Fiat à M. Y..., peu important la date à laquelle ce motif a été porté à la connaissance des concessionnaires, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du code civil ; 

Mais attendu qu'ayant relevé qu'à la date de la notification de la résiliation, le concédant connaissait, pour en être à l'origine, l'existence de pourparlers engagés entre son concessionnaire et le repreneur qu'il lui avait désigné et retenu, par une appréciation souveraine des faits de la cause, qu'il avait précipité la notification de sa décision de résilier sans ignorer la difficulté dans laquelle il plongeait son concessionnaire, auquel il ôtait toute marge réelle de manœuvre pour obtenir un prix raisonnable pour les cessions envisagées au regard de l'incidence d'une telle décision sur la valeur des éléments incorporels des fonds de commerce, la cour d'appel, qui n'a pas retenu la faute dont fait état la première branche, ni imposé au concédant une obligation d'assistance, et n'a pas dit que la résiliation faisait obstacle à la cession, mais a fait ressortir que le concédant avait sciemment entravé la reconversion des concessionnaires, a, de ces seuls motifs, pu déduire, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième, cinquième et sixième branches, que, nonobstant le respect du préavis contractuel, la société Fiat ne s'était pas correctement acquittée de son obligation de bonne foi dans l'exercice de son droit de résiliation ; que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses deuxième, cinquième et sixième branches, n'est pas fondé pour le surplus ; 

Et sur les deuxième et troisième moyens, rédigés en termes identiques, réunis : 

Attendu que la société Fiat fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer certaines sommes à Mme X..., en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Fiat-Lancia exploité par la SEGR et à la SEGR en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Alfa Roméo, alors, selon le moyen : 

1°/ que la faute tenant aux circonstances dans lesquelles a été exercé le droit de rupture unilatérale des contrats à durée indéterminée n'est pas la cause du préjudice consistant en la perte du contrat lui-même ; que l'abus commis par le concédant dans l'exercice de son droit de résiliation d'un contrat de concession à durée indéterminée n'est pas la cause du préjudice résultant de la perte par le concessionnaire de son fonds de commerce ; qu'en l'espèce, pour condamner la société Fiat à payer à Mme X..., en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Fiat/ Lancia exploité par la SEGR, la somme de 530 587 euros à la SEGR, en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Alfa Roméo la somme de 60 000 euros, prétendument représentative de la valeur de ce fonds de commerce, la cour d'appel a retenu que le préjudice subi serait « caractérisé par la perte elle-même de leurs activités de concessionnaires exclusifs des marques » ; qu'en statuant ainsi, cependant que la perte du fonds de commerce n'est pas la conséquence de la brutalité de la rupture du contrat de concession, mais de la rupture elle-même qui n'est pas intrinsèquement fautive, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ; 

2°/ que méconnaît l'égalité des armes, la cour d'appel qui se fonde exclusivement sur une expertise non contradictoire établie à la demande de l'une des parties ; qu'en l'espèce, pour condamner la société Fiat à payer à Mme X..., en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Fiat-Lancia exploité par la SEGR, la somme de 530 587 euros, à la SEGR, en sa qualité de propriétaire du fonds de commerce Alfa Roméo la somme de 60 000 euros la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur un rapport d'expertise établi de manière non contradictoire par le Cabinet Pricewaterhousecoopers à la demande des concessionnaires ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le principe de l'égalité des armes et violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 

Mais attendu, d'une part, qu'en retenant le caractère fautif de la résiliation des contrats de concession au regard des circonstances dans lesquelles elle est intervenue, et en faisant ressortir que cette faute était à l'origine de la cessation d'activité et de la perte des fonds de commerce qui n'ont pu être cédés, la cour d'appel n'a pas procédé à l'indemnisation de la perte des contrats de concession résultant de la résiliation, mais à l'indemnisation du préjudice résultant de l'absence d'exécution de bonne foi des conventions ; 

Et attendu, d'autre part, que la société Fiat n'ayant pas demandé dans ses conclusions d'appel que le rapport lui soit déclaré inopposable ou qu'il soit écarté des débats au nom du respect de l'égalité des armes ou du principe du contradictoire, et s'étant bornée à critiquer la méthode d'évaluation utilisée et à faire valoir que ce rapport, réalisé dans l'objectif d'une cession, était inadapté pour déterminer la valeur intrinsèque du fonds, le moyen, mélangé de fait et de droit, est nouveau ; 

D'où il suit que le moyen, qui n'est pas fondé en sa première branche, est irrecevable en sa seconde branche ; 

PAR CES MOTIFS : 

REJETTE le pourvoi  ; (…) »

Travail préparatoire

Rappel de méthodologie

Un commentaire d’arrêt est un exercice qui comprend deux temps : l’explication de l’arrêt et son appréciation.

En d’autres termes, il faut, en premier lieu, expliquer le sens de l’arrêt. Ce qui suppose d’abord de le lire très attentivement, pour bien le comprendre. Ensuite, et c’est un temps essentiel de votre commentaire, il vous faut identifier la question que l’arrêt à commenter a résolue. En outre, il vous faut détecter la ou les règles de droit qui fondent la décision qui vous est soumise. Enfin, il vous faut faire un exercice de mémoire (si vous composez votre commentaire dans le cadre d’un examen) ou de recherche (si vous composez librement votre commentaire), non seulement pour découvrir le thème général dans lequel s’inscrit l’arrêt à commenter, mais encore pour trouver des éléments bibliographiques qui vous permettront de mieux comprendre l’arrêt que vous devez commenter et donc de mieux l’expliquer.

En second lieu, après avoir expliqué le sens de l’arrêt et démontré que vous l’avez compris, vous devez apprécier l’arrêt à commenter, donner une opinion sur la façon dont la Cour de cassation a tranché le litige et répondu à la question de droit, au fond, il vous faut juger les juges, vous prononcer sur la valeur de la décision, ce qui sera d’autant plus simple que vous pourrez la situer dans le temps, c’est-à-dire en déterminer la portée. Dans cette perspective d’appréciation de la valeur de l’arrêt, il vous faut exploiter des éléments bibliographiques qui vous permettront de recueillir les diverses opinions doctrinales qui se sont prononcées sur la question de droit réglée par la Cour de cassation, et de vous prononcer sur la pertinence des diverses thèses en présence à propos de la question de droit, celle que soutenaient les juges du fond, celle du demandeur au pourvoi et puis celle retenue par la Cour de cassation qui sera fatalement peu ou prou une des deux précédentes.

Analyse de l’arrêt

Analyser l’arrêt conduit à s’en tenir à le présenter en vue d’introduire votre commentaire. Voici la démarche à suivre :

– d’abord, il vous faut sélectionner les faits qui seront utiles dans la perspective de votre commentaire ;

– en outre, il convient de qualifier les faits, ce qui revient à les faire entrer dans une catégorie juridique donnée ;

– ensuite, il faut exposer les différentes étapes de la procédure, à savoir la décision des juges du fond, puis le moyen du pourvoi ;

– de plus, il vous faut énoncer la question de droit que l’arrêt a tranchée ;

– enfin, il convient d’exposer la solution que la Cour de cassation a finalement retenue.

Dans l’arrêt qu’il vous faut ici commenter, reprenons cette démarche :

■ Sélection des faits : Des contrats de concession sont rompus unilatéralement par un des contractants. 

■ Qualification des faits : Un concédant résilie unilatéralement des contrats de concession à durée indéterminée, en respectant un délai de préavis conforme aux exigences légales.

■ Exposé de la procédure : Ses deux concessionnaires se prévalent du caractère abusif de cette résiliation pour rechercher la responsabilité de leur concédant et demander la réparation de leurs préjudices consécutifs à cette rupture abusive.

Les juges du fond leur donnent raison parce que, d’abord, les investissements que le concédant les avait incités à réaliser avaient créé dans leurs esprits une confiance légitime dans le maintien de leurs relations contractuelles ; ensuite, parce que le comportement du concédant, pendant la négociation menée par ses concessionnaires en vue de céder son fonds, avait nui à leur reconversion.

Le concédant forme un pourvoi dans lequel il critique la cour d’appel d’avoir mis à sa charge des obligations de motivation et d’assistance et de l’avoir condamné à réparer un préjudice, la perte par les concessionnaires des contrats de concession, qu’il n’avait pas causé.

■ Énoncé de la question de droit : Les circonstances de la résiliation unilatérale permettaient-elles de caractériser un abus à la charge du concédant ? Le préjudice que le concédant avait été condamné à réparer était-il réparable ?

■ Exposé de la décision : La Cour de cassation a rejeté le pourvoi, d’une part, parce que « le concédant avait sciemment entravé la reconversion des concessionnaires », d’autre part, parce que « la cour d’appel n’a pas procédé à l’indemnisation de la perte des contrats de concession résultant de la résiliation, mais à l’indemnisation du préjudice résultant de l’absence d’exécution de bonne foi des conventions ».    

L’élaboration du commentaire

L’analyse de l’arrêt est désormais effectuée. Reste à bâtir et nourrir le commentaire.

Il est de bonne méthode de rechercher alors dans quelle thématique générale s’inscrit l’arrêt à commenter, ce qu’une parfaite identification des questions de droit tranchée par l’arrêt vous permet aisément de découvrir. En l’occurrence, l’arrêt porte sur la résiliation unilatérale d’un contrat de distribution.

Dans la perspective de l’élaboration de votre commentaire, il convient que vous exploitiez :

– le précis Dalloz de Droit des obligations de MM. Terré, Simler et Lequette, qui comporte des développements sur la réparation en général et sur l’obligation de la victime de modérer son dommage ;

La structure du commentaire

Pour construire votre commentaire, en clair pour élaborer son plan, il convient d’expliquer l’arrêt et d’apprécier sa solution. Ce qui consiste :

– à en restituer clairement le sens ;

– à en déterminer la portée ;

– et à en discuter la valeur,

étant entendu que ces trois éléments sont ici d’égale importance.

Proposition de plan détaillé

Introduction

Avant l’analyse de l’arrêt proprement dite qui compose le cœur de l’introduction, il faut insister sur son contexte, à savoir la résiliation unilatérale d’un contrat de distribution. Après quoi, vous pouvez intégrer l’analyse de l’arrêt proprement dite (v. supra).

Enfin, après avoir exposé la décision retenue par la Cour de cassation, vous devez annoncer le plan de votre commentaire.

■ ■ ■

I. Les circonstances de la rupture

La liberté contractuelle de ne plus contracter qu’incarne le droit de résiliation unilatérale n’est pas compensée par des obligations à la charge de celui qui l’exerce (A) mais elle est tempérée par une réserve d’abus (B).

A. L’absence d’obligation

Exposé : Ainsi que le révèle la motivation de l’arrêt, le concédant qui exerce son droit de résiliation unilatérale, en respectant le délai de préavis, n’est pas tenu à la charge de son concessionnaire « répudié » d’une obligation d’aide ou d’assistance.

Il n’est pas d’avantage tenu d’une quelconque obligation de motivation, il peut donc résilier sans s’expliquer et, toutefois, s’il exprime des motifs au soutien de la rupture qu’il prononce, l’inexactitude de ceux-ci ne permet pas de caractériser l’abus.

Discussion : Critique positive ou négative de la jurisprudence de la Cour de cassation, au regard de la liberté de la concurrence et de la protection des distributeurs qui auront du mal à intégrer de nouveaux réseaux et perdront leurs investissements.

B. La réserve d’abus

Exposé : La Cour de cassation tempère le droit de résiliation unilatérale en exploitant la traditionnelle réserve d’abus.

En l’espèce, la Cour considère qu’en résiliant les contrats de concession, alors que le concessionnaire négociait la cession de son fonds de commerce le concédant avait manqué au devoir de bonne foi dans l'exercice de son droit de résiliation.

En droit positif, plusieurs arrêts ont décidé que le concédant qui avait invité le distributeur à faire d’importants investissements, puis, après que celui-ci les a effectués, rompt unilatéralement le contrat de concession, commet un abus, source de responsabilité civile.

Discussion : L’abus du droit de résiliation permet de protéger le concessionnaire contre un comportement de son concédant qui, sciemment, nuit à sa reconversion et menace donc son avenir économique.

Pendant le préavis, le concédant est tenu d’un devoir d’abstention : il ne doit rien faire qui puisse entraver la reconversion de son concessionnaire, même s’il n’est pas tenu de lui apporter, dans cette perspective, aide et assistance.

II. Les conséquences de la rupture

Même si la Cour de cassation persiste dans le refus d’une indemnité de rupture au profit du concessionnaire (A), elle indemnise les préjudices subis en raison de l’abus (B).

A. Le refus d’une indemnité de rupture

Exposé : La Cour de cassation refuse que le concessionnaire obtienne une indemnité compensant le préjudice économique subi en raison de la rupture de son contrat de concession. Ainsi, elle a décidé que l’intérêt commun qui irrigue le contrat de concession est sans influence sur le régime de la rupture. De plus, elle refuse qu’une telle indemnité puisse être fondée sur l’enrichissement sans cause du concédant, puisque la cause de celui-ci réside dans l’existence même de ce contrat.

Discussion : Distinction artificielle entre les situations respectives du mandataire d’intérêt commun, qui perçoit une indemnité de rupture, et le concessionnaire qui, parce qu’il est un commerçant indépendant, n’en perçoit pas.

Application rigoureuse des règles de l’enrichissement sans cause, alors même qu’il est avéré que le concédant et le concessionnaire ont une clientèle commune, et que celle-ci ne profitera qu’à celui-là après la rupture.

B. La sanction de l’abus

Exposé : Puisque l’abus a consisté à résilier le contrat pendant la négociation du fonds de commerce du concessionnaire, les préjudices qui en découlent, à savoir la perte du fonds par celui-ci et sa cessation d’activité, doivent être indemnisés.

Discussion : Ces préjudices n’auraient-ils pas été subis même en l’absence d’abus et donc du seul fait de la résiliation ? Auquel cas, ils ne sont pas indemnisables, car ils n’ont pas l’abus pour cause.   

Références

■ Y. Lequette, Fr. Terré, Ph. Simler, Droit civil, Les obligations 11e éd., Dalloz, coll. « Précis », 2013.

■ Code civil

Article 1134

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. 

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. 

Elles doivent être exécutées de bonne foi. » 

Article 1147

« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »

 


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