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Exception à la responsabilité du commettant du fait de son préposé

[ 7 janvier 2020 ] Imprimer

Droit de la responsabilité civile

Exception à la responsabilité du commettant du fait de son préposé

Chaque mois, retrouvez le commentaire d’une décision de justice issue de l’actualité jurisprudentielle.

Ce mois-ci, Dalloz Actu Étudiant vous propose de commenter l’arrêt Civ. 1re, 27 nov. 2019, n° 18-21.191.

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 juin 2018), que, le 23 décembre 1997, M. I... et M. P... S... (les huissiers de justice) se sont associés pour créer la société civile professionnelle H... I... et L... P... S... (la SCP), titulaire d'un office d'huissiers de justice à [...] (Essonne), laquelle a employé M. Y... en qualité de comptable (le comptable) ; que, le 5 juin 2003, M. I... a révélé au président de la chambre régionale des huissiers de justice un déficit, puis a démissionné de sa charge ; que M. P... S..., nommé administrateur provisoire de l'étude, a prélevé des sommes excessives, avant d'être destitué le 18 mai 2005 ; qu'un jugement du 9 janvier 2007 a déclaré les huissiers de justice coupables des délits d'abus de confiance, de faux et d'usage de faux en écritures, et le comptable coupable de faux en écriture et usage de faux en écriture ; que la Chambre nationale des huissiers de justice (la CNHJ), devenue Chambre nationale des commissaires de justice, garantissant la responsabilité professionnelle des huissiers de justice, les a assignés en responsabilité et indemnisation ;

Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le comptable fait grief à l'arrêt de le condamner, in solidum avec M. I... et M. P... S..., à payer à la CNHJ la somme de 1 221 738,37 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juin 2010, outre celle de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, de dire que la CNHJ devra déduire de sa créance sur M. I..., sur M. P... S... et sur lui-même la somme de 95 137,26 euros perçue lors de la distribution du prix de cession de l'office, de donner acte que sera déduit tout autre règlement qui serait effectué, de le débouter de ses autres demandes contre la CNHJ, de le condamner in solidum avec MM. I..., P... S... à rembourser à cette dernière les sommes de 115 654,47 euros et 2 793,47 euros correspondant aux frais supportés, ainsi qu'à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de condamner MM. I... et P... S... à le garantir dans la proportion de 90 % de toutes condamnations, frais et dépens prononcés contre lui, alors, selon le moyen :

1°/ que n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant ; que le préposé condamné pénalement pour avoir commis une infraction ayant porté préjudice à un tiers n'engage pas sa responsabilité civile à l'égard de ce tiers lorsqu'il a agi sur l'ordre de son commettant et, dès lors, dans les limites de la mission qui lui a été impartie par celui-ci ; qu'en retenant que « le préposé, condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fût-ce sur l'ordre du commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile envers celui-ci », la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1384, devenus 1240 et 242, du code civil ;

2°/ que, subsidiairement, M. Y... soutenait qu'il était étranger à la falsification du logiciel Priam, en faisant valoir que le jugement correctionnel avait retenu, pour le condamner pénalement, qu'il était l'auteur de balances générales, comportant de fausses données comptables, qui avaient été utilisées par les huissiers de justice, qu'il n'était pas en charge de la gestion informatique, le logiciel Priam étant installé et géré par cette société, qu'il n'avait jamais été concerné par les facturations de droits proportionnels indûment perçus, et que ledit jugement précisait bien que s'il maîtrisait la comptabilité, c'est M. P... S... qui maîtrisait l'outil informatique, ce qu'avait également relevé le premier juge ; qu'en imputant à faute à M. Y... d'avoir « contribué par la falsification du logiciel Priam à la perception de sommes indues par les créanciers et les débiteurs », sans assortir cette affirmation de motifs propres à la justifier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1384, devenus 1240 et 1242, du code civil ;

3°/ que, toujours subsidiairement, en imputant à faute à M. Y... d'avoir « contribué par la présentation de fausses données comptables (balances) à la dissimulation et à la perpétuation du très important déficit de trésorerie de l'étude de la SCP d'huissiers », sans indiquer en quoi les balances comptables qu'il avait établies, a posteriori, afin de masquer les détournements, opérés uniquement par les huissiers, seraient à l'origine du préjudice subis par les clients de l'étude, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1384, devenus 1240 et 1242, du code civil ;

Mais attendu que le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fût-ce sur l'ordre du commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à l'égard de celui-ci, quelles que soient les limites de sa mission ; que l'arrêt relève que, si le comptable n'a pas commis de détournements, il a contribué, par la présentation de fausses données comptables à la dissimulation et à la perpétuation du très important déficit de trésorerie de l'étude de la SCP, que les détournements commis par les huissiers de justice ne pouvaient être opérés sans son intervention, constitutive des infractions de faux et usage de faux dont il a été déclaré coupable, et que cette situation préjudiciait directement à des centaines de clients de l'étude qui, ayant payé plus qu'ils ne devaient, ne pouvaient espérer, en l'absence des fonds correspondant à tout ou partie de leurs créances en raison des prélèvements excessifs effectués sur la trésorerie de l'étude, obtenir le paiement des sommes qui devaient leur revenir ; qu'ayant ainsi caractérisé le lien de causalité entre les fautes imputables au comptable et le préjudice subi par la CNHJ, subrogée dans les droits des victimes, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la Chambre nationale des commissaires de justice la somme de 3 000 euros ; »

Travail préparatoire

Rappel de méthodologie

Un commentaire d’arrêt est un exercice qui comprend deux temps : l’explication de l’arrêt et son appréciation.

En d’autres termes, il faut, en premier lieu, expliquer le sens de l’arrêt. Ce qui suppose d’abord de le lire très attentivement, pour bien le comprendre. Ensuite, et c’est un temps essentiel de votre commentaire, il vous faut identifier la question que l’arrêt à commenter a résolue. En outre, il vous faut détecter la ou les règles de droit qui fondent la décision qui vous est soumise. Enfin, il vous faut faire un exercice de mémoire (si vous composez votre commentaire dans le cadre d’un examen) ou de recherche (si vous composez librement votre commentaire), non seulement pour découvrir le thème général dans lequel s’inscrit l’arrêt à commenter, mais encore pour trouver des éléments bibliographiques qui vous permettront de mieux comprendre l’arrêt que vous devez commentez et donc de mieux l’expliquer.

En second lieu, après avoir expliqué le sens de l’arrêt et démontrer que vous l’avez compris, vous devez apprécier l’arrêt à commenter, donner une opinion sur la façon dont la Cour de cassation a tranché le litige et répondu à la question de droit, au fond, il vous faut juger les juges, vous prononcer sur la valeur de la décision, ce qui sera d’autant plus simple que vous pourrez la situer dans le temps, c’est-à-dire en déterminer la portée. Dans cette perspective d’appréciation de la valeur de l’arrêt, il vous faut exploiter des éléments bibliographiques qui vous permettront de recueillir les diverses opinions doctrinales qui se sont prononcées sur la question de droit réglée par la Cour de cassation, et de vous prononcer sur la pertinence des diverses thèses en présence à propos de la question de droit, celle que soutenaient les juges du fond, celle du demandeur au pourvoi et puis celle retenue par la Cour de cassation qui sera fatalement peu ou prou une des deux précédentes.

Analyse de l’arrêt

Analyser l’arrêt conduit à s’en tenir à le présenter en vue d’introduire votre commentaire. Voici la démarche à suivre :

– d’abord, il vous faut sélectionner les faits qui seront utiles dans la perspective de votre commentaire ;

– en outre, il convient de qualifier les faits, ce qui revient à les faire entrer dans une catégorie juridique donnée ;

– ensuite, il faut exposer les différentes étapes de la procédure, à savoir la décision des juges du fond, puis le moyen du pourvoi ;

– de plus, il vous faut énoncer la question de droit que l’arrêt a tranchée ;

– enfin, il convient d’exposer la solution que la Cour de cassation a finalement retenue.

Dans l’arrêt qu’il vous faut ici commenter, reprenons cette démarche :

Sélection des faits : Deux huissiers de justice s’étaient associés pour créer une SCP, laquelle employait un comptable. Six ans plus tard, l’un des associés avait révélé au président de la chambre régionale des huissiers de justice un déficit significatif, puis avait démissionné de sa charge. Le second, nommé administrateur provisoire de l’étude en difficulté, avait prélevé des sommes excessives, avant d’être destitué deux ans plus tard. Un jugement avait déclaré les huissiers de justice coupables des délits d’abus de confiance, de faux et d’usage de faux en écritures, et leur comptable coupable de faux et d’usage de faux en écriture. La chambre nationale des huissiers de justice (CNHJ) les avait assignés en responsabilité et indemnisation.

Qualification des faits : Un salarié/préposé est assigné en responsabilité civile pour s’être rendu coupable, en même temps que ses employeurs/commettants, d’une infraction pénale intentionnelle.

Procédure et moyens : La cour d’appel le condamne in solidum avec ses commettants au versement de diverses indemnités.

A l’appui du pourvoi qu’il forme devant la Cour de cassation, le préposé invoque à titre principal le principe de l’immunité civile du préposé, en vertu duquel n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de sa mission qui lui a été impartie par son commettant, ainsi que la règle d’interprétation stricte applicable à toute exception apportée à un principe, supposant en l’occurrence que si par exception, le préposé engage sa responsabilité personnelle en cas d’infraction pénale intentionnelle ayant porté préjudice à un tiers, cette exception ne joue pas lorsqu’il a agi sur l’ordre de son commettant. Il soutient également, à titre subsidiaire, être étranger à l’une des falsifications qui lui sont reprochées et ne pas être directement à l’origine du préjudice subi par les clients de l’étude, n’ayant fait que dissimuler a posteriori, par la présentation de fausses données comptables, les détournements de fonds opérés uniquement par ses commettants.

Problème de droit : Même commise dans le cadre de sa mission et sur ordre de son commettant, l’infraction pénale intentionnelle du préposé préjudiciable aux tiers est-elle susceptible d’engager sa responsabilité civile personnelle ?

Solution : A cette question, la Cour de cassation répond par l’affirmative et rejette, en conséquence, le pourvoi. Elle affirme que le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fût-ce sur l’ordre du commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à l’égard de celui-ci, quelles que soient les limites de sa mission. Or l’arrêt relève que, si le comptable n’a pas commis lui-même de détournements, il a contribué, par la présentation de fausses données comptables, à la dissimulation et la perpétuation du très important déficit de trésorerie de la SCP, que les détournements commis par les huissiers de justice ne pouvaient avoir opéré sans son intervention, constitutive des infractions de faux et usage de faux dont il a été déclaré coupable, et que cette situation préjudiciait à des centaines de clients de l’étude qui, ayant en conséquence payé plus qu’ils ne devaient, ne pouvaient espérer, en l’absence des fonds correspondant à tout ou partie de leurs créances causée par les prélèvements excessifs sur la trésorerie de l’étude, obtenir le paiement des sommes qui leur étaient dues, en sorte que le lien de causalité entre les fautes imputables au préposé et le préjudice subi par la CNHJ, subrogée dans les droits des victimes, se trouvait ainsi établi.

L’élaboration du commentaire

L’analyse de l’arrêt est désormais effectuée. Reste à bâtir et nourrir le commentaire.

Il est de bonne méthode de rechercher alors dans quelle thématique générale s’inscrit l’arrêt à commenter, ce qu’une parfaite identification des questions de droit tranchée par l’arrêt vous permet aisément de découvrir. En l’occurrence, l’arrêt porte sur l’exception à la responsabilité du commettant du fait de son préposé.

La structure du commentaire

Pour construire votre commentaire, en clair pour élaborer son plan, il convient d’expliquer l’arrêt et d’apprécier sa solution. Ce qui consiste :

– à en restituer clairement le sens ;

– à en déterminer la portée ;

– et à en discuter la valeur,

étant entendu que ces trois éléments sont ici d’égale importance.

Proposition de plan détaillé

Avant l’analyse de l’arrêt proprement dite qui compose le cœur de l’introduction, il faut insister sur son contexte. Après quoi, vous pouvez intégrer l’analyse de l’arrêt proprement dite.

Enfin, après avoir exposé la décision retenue par la Cour de cassation, vous devez annoncer le plan de votre commentaire.

I.               L’exception à l’immunité civile du préposé

A.     Le principe de l’immunité civile du préposé

-        Principe de solution fondamental posé par l’arrêt Costedoat (Cass., ass. plén., 25 févr. 2000), au visa des anciens articles 1382 et 1384 C. civ. : « n’engage pas sa responsabilité à l’égard des tiers le préposé qui agit sans excéder les limites de la mission qui lui a été impartie par son commettant » = immunité civile du préposé ayant causé un dommage à autrui dans le cadre de sa mission.

-        Apport de la solution : seule la responsabilité du commettant pouvant être engagée, le préposé disposant d’une immunité personnelle contre la victime, ce principe implique que le commettant soit désormais le garant définitif des faits de ses employés, à la différence de la solution retenue par la jurisprudence traditionnelle, qui prévoyait que le commettant se substituait seulement au préposé dans ses rapports avec la victime, le préposé demeurant le débiteur définitif de l’indemnité, en sorte que la victime avait le choix d’engager son action contre le commettant sur le fondement du fait d’autrui, ou contre le préposé, sur le fondement de sa faute, ou bien encore contre les deux à la fois, étant précisé que dans l’hypothèse, qui était la plus fréquente, d’une action dirigée contre le commettant, présumé plus solvable, ce dernier disposait d’un recours en contribution contre son préposé, celui-ci supportant le poids définitif de la dette, dont il était le véritable débiteur.

-        Portée de la solution : rompant avec la solution ancienne, le commettant est depuis cet arrêt le garant définitif des faits de ses employés, selon une solution proche de celle consacrée par le droit administratif dans le cadre de la responsabilité du service public du fait de ses agents. Après quelques hésitations, la Cour de cassation a de surcroît généralisé la portée de cette solution, l’appliquant à tout salarié, même si celui-ci dispose d’une grande indépendance dans l’exercice de ses fonctions, telle que celle conférée au salarié dans le domaine médical (Civ. 1re, 9 nov. 2004, n° 01-17.908) et l’étendant au-delà du champ de la responsabilité du fait d’autrui, au régime des accidents de la circulation défini par la loi Badinter, la victime ne pouvant agir contre le préposé gardien du véhicule si celui-ci est resté dans le cadre de sa mission (Civ. 2e, 28 mai 2009, n° 08-13.310). Enfin, cette solution paralyse également, sous quelques réserves (v. Civ. 1re, 12 juill. 2007, n° 06-12.624 et 06-13.790), la possibilité pour le commettant d’exercer un recours contre son préposé lorsque ce dernier, même fautif, a commis les faits dommageables dans le cadre de sa mission.

Si la jurisprudence Costedoat pose un principe d’immunité civile du préposé, celui-ci est néanmoins assorti d’exceptions.

B.     L’exception liée à la commission d’une infraction pénale volontaire

-         Commission par le préposé d’une infraction pénale volontaire. Exception principale au principe précédent, posée par l’arrêt Cousin (Cass., ass. plén., 14 déc. 2001, n° 00-82.066), dont l’attendu de principe est repris à l’identique par la Cour de cassation dans la décision commentée : « le préposé condamné pénalement pour avoir intentionnellement commis, fut-ce sur l’ordre du commettant, une infraction ayant porté préjudice à un tiers, engage sa responsabilité civile à l’égard de celui-ci ».

-        Dans l’hypothèse où le préposé commet une infraction pénale volontaire, il sort nécessairement du cadre de sa mission et engage, sur le terrain civil, sa responsabilité du fait personnel à l’égard de la victime.

II.             La justification de l’exception

A.     L’intention, justification traditionnelle de l’exception

-        En se rendant coupable d’une infraction pénale intentionnelle, le préposé n’est plus logiquement en droit d’invoquer le bénéfice de son immunité civile. Celle-ci paraît en effet injustifiée, la commission d’une infraction pénale de cette nature ne relevant plus des risques devant être pris en charge par l’entreprise.

-        La Cour de cassation a également étendu l’exception à l’immunité du préposé à l’hypothèse d’une faute intentionnelle, indépendamment de sa qualification pénale (Civ. 2e, 20 déc. 2007, n° 07-13.403 ; Civ. 2e, 21 févr. 2008, n° 06-21.182). En revanche, lorsque celle-ci pouvait être retenue, le caractère intentionnel de l’infraction était délaissé : le préposé « n'engage pas sa responsabilité à l'égard des tiers (…) hors le cas où le préjudice de la victime résulte d'une infraction pénale ou d'une faute intentionnelle », ce qui rendait incertaine la justification de l’exception à l’immunité du préposé, qui paraissait acquise, fondée sur l’intentionnalité de l’infraction commise.

B.     L’intention, justification incertaine de l’exception

-         Aux termes de la jurisprudence précitée, toute infraction pénale commise par le préposé, qu’elle soit intentionnelle ou non, pourrait permettre l’engagement de sa responsabilité personnelle ; aussi, par d’autres décisions, la Cour de cassation avait admis que le salarié bénéficiant d’une délégation de pouvoir pouvait voir sa responsabilité personnelle engagée, sans qu’une faute pénale intentionnelle ait à être établie à son encontre (Crim. 28 mars 2006, n° 05-82.975).

-        La portée de ces arrêts reste cependant incertaine. La réaffirmation, en l’espèce, du critère de l’intention du fait commis par le préposé est alors bienvenue car si ces arrêts devaient être confirmés, ils modifieraient les limites a priori acquises de l’immunité personnelle du préposé, en l’écartant dans des hypothèses, diverses, d’agissements non intentionnels, sur la base de faits simplement dommageables ou d’une délégation de pouvoir. Cependant, la décision rapportée n’étant pas publiée, le flou entourant les exceptions à l’immunité du préposé demeure en partie.

-        Notons que le projet de réforme de la responsabilité civile tente de clarifier cette question en disposant en son article 1249, al. 4, que « le préposé n’engage sa responsabilité personnelle qu’en cas de faute intentionnelle ou lorsque, sans autorisation, il a agi à des fins étrangères à ses attributions », cette dernière hypothèse renvoyant à l’abus de fonction qui exonère le commettant de sa responsabilité du fait de son commettant ; la recherche de l’intention du préposé est alors dans tous les cas maintenue, soit pour établir sa faute, soit pour établir l’abus, les « fins étrangères à ses attributions » poursuivies par le préposé agissant hors du cadre de ses fonctions exigeant de rechercher les intentions subjectives du préposé, lors de la commission du fait dommageable, ce dernier devant avoir agi à des fins strictement personnelles, exclusives des intérêts de son commettant.

 


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