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Lettre d’intention, engagement unilatéral, obligations de moyens et de résultat

[ 24 septembre 2019 ] Imprimer

Droit des obligations

Lettre d’intention, engagement unilatéral, obligations de moyens et de résultat

Chaque mois, retrouvez le commentaire d’une décision de justice issue de l’actualité jurisprudentielle.

Ce mois-ci, Dalloz Actu Étudiant vous propose de commenter l’arrêt Com. 3 juill. 2019, n° 17-27.820.

« Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 septembre 2017), que la société SPBI a conclu des contrats de distribution exclusive avec la société Boat développement (la société Boat), laquelle avait pour associé unique la société JEM developpement, détenue par la société Fedent, elle-même détenue par la société Imfined, aux droits de laquelle vient la société Groupe Duval ; que par un jugement du 15 octobre 2011, un tribunal de commerce a condamné la société SPBI à verser à la société Boat la somme de 800 000 euros de dommages-intérêts pour rupture abusive des contrats de distribution ; que la société SPBI ayant saisi le premier président d'une cour d'appel d'une demande de suspension de l'exécution provisoire dont était assortie cette décision, la société Boat, qui s'opposait à cette demande, a produit aux débats une lettre d'intention de la société Imfined du 14 novembre 2011, stipulant : "En notre qualité d'associé majoritaire de la SARL Boat développement au travers de nos différentes participations nous ne pouvons que nous réjouir de la décision ayant été rendue le 25 octobre 2011 par le tribunal de commerce de Paris vous opposant à la SA SPBI. (...) vous avez sollicité de notre part que nous vous confirmions par écrit notre soutien dans le cadre de ce contentieux ; ce à quoi nous pouvons répondre favorablement sans aucune difficulté. Imfined est une société dont la solidité financière ne peut être discutée. Au-delà d'un capital social de 35 millions d'euros, les fonds propres d'Imfined, au 31 décembre 2010, s'élevaient à plus de 48,3 millions d'euros. (...) Comme vous le savez, Imfined a toujours apporté son soutien ' y compris financier ' à Boat développement, notamment par avances réalisées en compte courant d'associé. Nous vous confirmons bien volontiers que Imfined continuera à soutenir Boat développement dans le cadre du contentieux l'opposant à SPBI et ce même si, par extraordinaire, la cour d'appel de Paris devait infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 25 octobre 2011, obligeant votre société à restituer en tout ou en partie, la somme de 800 000 € concernée. Nous vous autorisons bien évidemment à produire la présente lettre de confort et ses annexes dans le cadre de l'assignation en référé à fin de suspension de l'exécution provisoire délivrée à la demande de SPBI devant Monsieur le Président de la Cour d'Appel de Paris." ; que par une ordonnance du 10 janvier 2012, le premier président a rejeté la demande de suspension de l'exécution provisoire ; que le 12 mars 2013, la société Imfined a dénoncé à la société Boat la résiliation de la lettre du 14 novembre 2011, puis par un "contrat de cession à terme de parts sociales" du 14 mars 2013, la société Fedent a cédé 51 % de sa participation dans la société JEM developpement à une société CPR Belgium, avec effet au 31 décembre 2013 ; que par un arrêt du 15 janvier 2014, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement du 15 octobre 2011 et condamné la société Boat à restituer à la société SPBI la somme de 800 000 euros ; que la société Boat a été mise en liquidation judiciaire le 12 mars 2014 ; que le 1er avril 2014, la société SPBI a assigné la société Imfined en responsabilité, sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;

« Attendu que la société Groupe Duval fait grief à l'arrêt de condamner la société Imfined à payer à la société SPBI la somme de 800 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du manquement fautif à son engagement du 14 novembre 2011 alors, selon le moyen :

« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en affirmant que la société Imfined s'était « abstenue d'exécuter son engagement personnel de reverser la somme de 800.000 euros » résultant de la lettre d'intention qu'elle avait signée le 14 novembre 2011 au profit de la société Boat développement, quand ladite lettre stipulait « nous vous confirmons bien volontiers que Imfined continuera à soutenir Boat Développement dans le cadre du contentieux l'opposant à SPBI et ce même si, par extraordinaire, la cour d'appel de Paris devrait infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris le 25 octobre 2011, obligeant votre société à restituer, en tout ou partie, la somme de 800.000 euros concernés », ce dont il ne résultait qu'une obligation de faire, à l'exclusion de toute obligation monétaire, la cour d'appel a dénaturé ladite lettre en violation du principe susvisé, ensemble de l'article 1192 du code civil, tel qu'il résulte de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

« 2°/ qu'un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît ; que la cession de la participation d'une société mère dans sa filiale bénéficiaire d'une lettre de confort emporte la caducité de celle-ci ; qu'ainsi, la lettre de confort du 14 novembre 2011 donnée par la société Imfined à la seule société Boat développement était caduque à la suite de la cession de la participation de la première dans la seconde par acte du 14 mars 2013 et qu'en retenant qu'en s'abstenant d'exécuter son engagement personnel de reverser la somme de 800 000 euros, tel qu'il résulterait de la lettre de confort, à la suite de l'arrêt infirmatif du 15 janvier 2014, la société Imfined avait commis une faute, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble les principes gouvernant la caducité des actes juridiques codifiés à l'article 1186 du code civil dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 10 février 2016 ;

« 3°/ que l'effet relatif des contrats n'interdit pas au tiers à une convention de se prévaloir du manquement contractuel commis par une partie, dès lors que ce manquement est directement à l'origine d'un préjudice subi par lui ; qu'en ne constatant pas que la prétendue faute de la société Imfined ayant consisté à s'abstenir d'exécuter son engagement personnel de reverser la somme de 800 000 euros à la société Boat développement à la suite de l'arrêt infirmatif de la cour d'appel de Paris du 15 janvier 2014 était directement à l'origine du préjudice invoqué par la société SPBI, créancière de la restitution à l'égard de la société Boat développement, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et l'article 1382, devenu 1240 du code civil ;

« 4°/ que seul le préjudice en relation de cause à effet avec la faute commise est indemnisable ; qu'en retenant que le montant des dommages-intérêts dus à la société SPBI était « déterminé par l'engagement auquel la société Imfined a manqué » soit une somme de 800 000 euros correspondant à l'obligation souscrite par la société Imfined envers la société Boat développement, débitrice de la restitution envers la société SPBI, sans constater que la société SPBI, tiers à cet engagement, aurait été en mesure de saisir effectivement, hors tout concours avec d'autres créanciers, la somme de 800 000 euros si elle avait été payée à la suite de l'arrêt infirmatif de la cour d'appel de Paris du 15 janvier 2014, et ce après avoir constaté que la société Boat développement avait été déclarée en liquidation judiciaire le 12 mars 2014, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;

« Mais attendu, en premier lieu, qu'analysant la portée de la lettre d'intention du 14 novembre 2011 et recherchant la commune intention des parties en tenant compte du contexte judiciaire dans lequel elle avait été produite, la cour d'appel a retenu que la société Imfined s'était engagée à apporter son soutien à la société Boat pour qu'elle puisse restituer à la société SPBI la somme de 800 000 euros, dans le cas d'une décision à venir sur le fond du litige infirmant la condamnation de première instance, faisant ainsi ressortir qu'elle s'était engagée à un tel résultat ;

« Attendu, en deuxième lieu, que, contrairement à l'affirmation du moyen, pris en sa deuxième branche, la seule cession de la participation de la société Imfined dans le capital de sa filiale n'a pas eu pour effet de rendre caduque la lettre d'intention ;

« Et attendu, enfin, qu'ayant évalué le préjudice subi du fait de l'inexécution de l'obligation contractée par la société Imfined au montant de la somme non restituée, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

« D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

« Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa première branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

« PAR CES MOTIFS :

« REJETTE le pourvoi ;

« Condamne la société Groupe Duval aux dépens ; »

Travail préparatoire

Rappel de méthodologie

Un commentaire d’arrêt est un exercice qui comprend deux temps : l’explication de l’arrêt et son appréciation.

En d’autres termes, il faut, en premier lieu, expliquer le sens de l’arrêt. Ce qui suppose d’abord de le lire très attentivement, pour bien le comprendre. Ensuite, et c’est un temps essentiel de votre commentaire, il vous faut identifier la question que l’arrêt à commenter a résolue. En outre, il vous faut détecter la ou les règles de droit qui fondent la décision qui vous est soumise. Enfin, il vous faut faire un exercice de mémoire (si vous composez votre commentaire dans le cadre d’un examen) ou de recherche (si vous composez librement votre commentaire), non seulement pour découvrir le thème général dans lequel s’inscrit l’arrêt à commenter, mais encore pour trouver des éléments bibliographiques qui vous permettront de mieux comprendre l’arrêt que vous devez commentez et donc de mieux l’expliquer.

En second lieu, après avoir expliqué le sens de l’arrêt et démontrer que vous l’avez compris, vous devez apprécier l’arrêt à commenter, donner une opinion sur la façon dont la Cour de cassation a tranché le litige et répondu à la question de droit, au fond, il vous faut juger les juges, vous prononcer sur la valeur de la décision, ce qui sera d’autant plus simple que vous pourrez la situer dans le temps, c’est-à-dire en déterminer la portée. Dans cette perspective d’appréciation de la valeur de l’arrêt, il vous faut exploiter des éléments bibliographiques qui vous permettront de recueillir les diverses opinions doctrinales qui se sont prononcées sur la question de droit réglée par la Cour de cassation, et de vous prononcer sur la pertinence des diverses thèses en présence à propos de la question de droit, celle que soutenaient les juges du fond, celle du demandeur au pourvoi et puis celle retenue par la Cour de cassation qui sera fatalement peu ou prou une des deux précédentes.

Analyse de l’arrêt

Analyser l’arrêt conduit à s’en tenir à le présenter en vue d’introduire votre commentaire. Voici la démarche à suivre :

– d’abord, il vous faut sélectionner les faits qui seront utiles dans la perspective de votre commentaire ;

– en outre, il convient de qualifier les faits, ce qui revient à les faire entrer dans une catégorie juridique donnée ;

– ensuite, il faut exposer les différentes étapes de la procédure, à savoir la décision des juges du fond, puis le moyen du pourvoi ;

– de plus, il vous faut énoncer la question de droit que l’arrêt a tranchée ;

– enfin, il convient d’exposer la solution que la Cour de cassation a finalement retenue.

Dans l’arrêt qu’il vous faut ici commenter, reprenons cette démarche :

Sélection des faits : Dans le cadre d’un contentieux relatif à la rupture de contrats de distribution exclusive, une société avait été condamnée au paiement de 800 000 € à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive. A sa demande de suspension de l’exécution provisoire de la décision de condamnation, l’autre partie lui avait opposé une lettre d’intention que la société lui avait adressée pour lui rappeler qu’elle lui avait « toujours apporté son soutien ‘ y compris financier ‘ (…), notamment par avances réalisées en compte courant d’associé », et lui confirmer « bien volontiers qu’elle continuera à la soutenir dans le cadre (de ce) contentieux et ce même si, par extraordinaire, la cour d’appel de Paris devait infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris, obligeant (la) société à restituer en tout ou en partie, la somme de 800 000 € concernée ».

Qualifications des faits : Une société unipersonnelle appartenant à un groupe avait obtenu d'un tribunal de commerce un jugement de condamnation de sa société mère à lui verser une indemnité de 800 000 € pour rupture abusive de leurs relations contractuelles. Cette dernière avait saisi le premier président d’une cour d’appel d’une demande de suspension de l’exécution provisoire dont était assortie la décision de condamnation. L’autre partie s’était opposée à cette demande, produisant à cette fin une lettre d’intention de sa société mère dans laquelle celle-ci lui confirmait qu’elle maintiendrait son soutien financier à sa filiale, comme elle l’avait toujours fait, même en cas d’infirmation du jugement par une juridiction d’appel.

Procédure : Après que le premier président eut rejeté sa demande de suspension de l’exécution provisoire, la société garante dénonça son engagement, céda sa participation dans sa filiale et fit appel du jugement de condamnation. La cour d’appel infirma le jugement et condamna la filiale à restituer les 800 000 € qui, en raison de sa mise en liquidation judiciaire, se révéla être dans l’impossibilité de le faire. La société créancière assigna alors son ancienne société mère, qui s’était engagée au titre de la lettre d’intention, pour obtenir le versement de la somme. La cour d’appel fit droit à cette demande.

Moyens du pourvoi : La société garante forma un pourvoi, invoquant la dénaturation de la lettre. Elle soutenait en particulier que le passage de la lettre relatif à la confirmation du soutien apporté à sa filiale, aux termes de laquelle « même si, par extraordinaire, la cour d'appel de Paris devait infirmer le jugement (...), obligeant [cette] société à restituer (...) la somme de 800 000 € », caractérisait une simple obligation de faire, à l'exclusion de toute obligation « monétaire ».

Problème de droit : Une société mère qui adresse à sa filiale une lettre d’intention pour lui confirmer son soutien financier dans l’hypothèse où cette dernière serait condamnée en appel à rembourser à un créancier le montant des dommages-intérêts que la société mère lui avait alloués d’elle en vertu d’un premier jugement s’est-elle ainsi obligée à rembourser cette somme ? 

Solution : A cette question, la chambre commerciale répond par l’affirmative. Jugeant la société mère redevable de la somme litigieuse, elle réfute la thèse de son pourvoi au motif « qu’analysant la portée de la lettre d’intention et recherchant la commune intention des parties en tenant compte du contexte judiciaire dans lequel elle avait été produite, la cour d’appel a retenu que la société (garante) s’était engagée à apporter son soutien à la société (débitrice) pour qu’elle puisse restituer à la société (créancière) la somme de 800 000 €, dans le cas d’une décision à venir sur le fond du litige infirmant la condamnation de première instance, faisant ainsi ressortir qu’elle s’était engagée à un tel résultat ».

L’élaboration du commentaire 

L’analyse de l’arrêt est désormais effectuée. Reste à bâtir et nourrir le commentaire.

Il est de bonne méthode de rechercher alors dans quelle thématique générale s’inscrit l’arrêt à commenter, ce qu’une parfaite identification des questions de droit tranchée par l’arrêt vous permet aisément de découvrir. En l’occurrence, l’arrêt porte sur la lettre d’intention.

La structure du commentaire

Pour construire votre commentaire, en clair pour élaborer son plan, il convient d’expliquer l’arrêt et d’apprécier sa solution. Ce qui consiste :

– à en restituer clairement le sens ;

– à en déterminer la portée ;

– et à en discuter la valeur,

étant entendu que ces trois éléments sont ici d’égale importance.

Proposition de plan détaillé

Avant l’analyse de l’arrêt proprement dite qui compose le cœur de l’introduction, il faut insister sur son contexte. Après quoi, vous pouvez intégrer l’analyse de l’arrêt proprement dite.

Enfin, après avoir exposé la décision retenue par la Cour de cassation, vous devez annoncer le plan de votre commentaire.

I.               La lettre d’intention : la naissance d’une obligation

A.     Un engagement unilatéral

-        Question depuis longtemps débattue concernant la lettre d’intention : un engagement unilatéral, sans rencontrer une autre volonté, peut-il faire naître une obligation ? Peut-on se créer une dette envers soi-même et donc accorder ainsi une créance à autrui ? 

-        Opposition de la doctrine classique (soutenue ensuite par une partie de la doctrine contemporaine) : Pour affirmer que la volonté unilatérale ne peut être source d’obligation, elle invoquait principalement le danger inhérent à ce type d’engagement : du côté du débiteur, le danger provient du fait que la personne le souscrit seul, avec le risque de s’engager sans mesurer les conséquences de son engagement, et du côté du créancier, le danger vient du fait que la possibilité de se lier implique celle de se délier, avec le risque que le créancier soit infidèle à la parole donnée.

-        Exception quand l’engagement unilatéral était prévu par un texte ; dans ce cas, la reconnaissance, notamment légale, de l’engagement unilatéral, oblige en effet à considérer celle-ci comme une source autonome d’obligation ; de surcroît, en pratique, la jurisprudence admettait ces engagements même sans fondement textuel (offre de contrat par ex.)

B.     Un engagement unilatéral reconnu par la loi

-        Débat sur la question de savoir s’il convient de considérer l’acte unilatéral comme une source d’obligation, de plus en plus admise, notamment par la multiplication des textes de lois qui le prévoient.

-        Cas de la lettre d’intention (ainsi que, depuis 2016, celui de l’offre de contrat), définie par la loi civile comme « l’engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien accordé à un débiteur dans l’exécution de son obligation envers son créancier » (C. civ., art. 2322).

-        Pas contestable que la lettre d’intention puisse donner naissance à une obligation, a fortiori, lorsque celle-ci aura été acceptée par son destinataire.

-        Toutefois, appréciation du juge nécessaire pour caractériser l’existence d’un véritable engagement : V. Com. 21 déc. 1987, n° 85-13.173: une lettre d’intention peut, selon ses termes et eu égard à la commune intention des parties, constituer à la charge de celui qui l’a souscrite un engagement contractuel de faire ou de ne pas faire ; il appartient toutefois au juge de donner ou de restituer son exacte qualification à un pareil acte sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; ainsi, une lettre par laquelle une société offre son concours pour aider sa filiale sans s’engager à se substituer à elle en cas de carence de celle-ci ne constitue pas un engagement (de cautionnement), Com. 9 juill. 2002, n° 96-19.953.

II.             La lettre d’intention : la qualification de l’obligation

A.     La recherche d’une qualification

-        Lorsqu’il est admis que la lettre d’intention contient un véritable engagement, les juges considèrent que celui-ci peut aller jusqu’à l’obligation d’assurer un résultat (Com. 21 déc. 1987, préc.), ou bien demeurer une simple obligation de moyens.

-        Abondant contentieux concernant la distinction entre obligation de moyens et obligation de résultat en matière de lettre d'intention. Critères principaux de la distinction : termes de la lettre et perception de l’intention commune des parties.

-        Pour une obligation de résultat, V. par ex. Com. 17 mai 2011, n° 09-16.186: L’engagement à faire en sorte que la situation financière de la filiale lui permette de remplir ses engagements à tout moment et de mettre à disposition les fonds lui permettant de faire face à son emprunt. Même qualification pour l’engagement d’assurer l’intégralité des besoins financiers de la filiale par apport en compte-courant (Com. 24 oct. 2000, n° 97-21.796).

-        N’engendre en revanche qu’une obligation de moyen la lettre dans laquelle la société prend l’engagement de veiller à ce que sa filiale dispose d’une trésorerie suffisante (Com. 15 oct. 1996, n° 94-14.176), ou de veiller très étroitement à ce que les engagements pris soient tenus (Com. 19 mars 1991, n° 89-16.464).

B.     La caractérisation d’une obligation de résultat

-        En l’espèce, obligation de résultat : il résultait de la commune intention des parties, appréciée à la lumière du contexte judiciaire dans lequel la lettre avait été produite, que la société mère s’était engagée à apporter son soutien à sa filiale pour que celle-ci puisse restituer la somme en cause en cas d’infirmation du jugement, si bien qu’elle s’était engagée à un tel résultat.

-        L’enjeu de la qualification d’obligation de résultat (V. pour un autre ex. : Com.17 mai 2011, n° 09-16.186) est probatoire : dans ce cas, le seul défaut de remboursement suffit à caractériser l’inexécution par le garant.

 


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