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[ 7 février 2014 ] Imprimer

À propos de l'évolution de la justice familiale

Le rapport Delmas-Goyon sur « Le juge du 21e siècle », rendu à la garde des Sceaux en décembre 2013, préconise notamment de confier d’avantage de responsabilités aux greffiers. Plusieurs propositions concernent, par ailleurs, l’organisation de la justice en matière familiale. Hélène Poivey-Leclercq, avocate spécialiste en droit de la famille, auteur d’ouvrages sur le sujet, a bien voulu répondre à nos questions.

Y a-t-il aujourd’hui un dysfonctionnement de la justice rendue aux familles ?

Il n'y a pas de dysfonctionnement de la justice rendue aux familles.

Bien au contraire, en France, les familles ont droit à une justice de qualité, confiée à des juges qui remplissent leur office avec conscience et compétence. Il faut s'interdire de tirer des conclusions hâtives à partir d'affaires portées à la connaissance de tous par les médias. Il s'agit de cas particuliers à propos desquels les informations sont fragmentaires, incomplètes.

En revanche, il existe des difficultés. Elles tiennent au déficit de moyens matériels, au manque de juge, au manque de greffiers, au manque de personnels auxiliaires. Ceci a pour effet d'allonger les délais imposés aux justiciables. La réforme de la carte judiciaire qui a éloigné les tribunaux des justiciables n'a pas arrangé la situation. Le temps de la justice est en rupture avec le temps de la vie. Une famille ne peut sans préjudice matériel et souvent humain attendre quatre à six mois, sinon plus, pour voir fixer une audience destinée à autoriser un parent à quitter le territoire français métropolitain avec un enfant ou obtenir des pensions alimentaires.

Notre ministère de la Justice est pauvre. C'est son budget dérisoire qui altère le fonctionnement de la justice sans que l'on puisse pour autant parler de dysfonctionnement.

La création du greffier juridictionnel répond-elle à une demande des professionnels ?

Le rapport Delmas-Goyon propose la création d'une sorte de super-greffier investi de fonctions juridictionnelles, en somme à la manière du Rechtspfleger allemand ou autrichien, statut créé en Allemagne dans les années 1920, pour pallier la pénurie de juges après la guerre.

En 2014, en France, nous manquons de juges. Mais nous manquons aussi de greffiers ! Les professionnels demandent surtout des juges en nombre suffisant, pour juger, et des greffiers pour les aider dans l'accomplissement de leurs tâches. Si les greffiers jouent un rôle important dans les tribunaux, ils ne peuvent remplacer les juges, d'autant qu'ils sont déjà en nombre insuffisant.

Que pensez-vous d’un regroupement du juge des enfants et du juge de la famille, évoqué pour plus tard par le rapport ?

Le rapport Guinchard avait préconisé une plus grande proximité du juge aux affaires familiales et du juge des enfants. Cette préconisation a trouvé sa traduction dans le décret n° 2009-398 du 10 avril 2009 relatif à la communication de pièces entre le juge aux affaires familiales, le juge des enfants et le juge des tutelles.

Ce décret consacre implicitement la spécificité du juge des enfants, par exemple en lui octroyant la possibilité de ne pas transmettre certaines pièces au juge délégué aux affaires familiales lorsqu'il estime que leur production pourrait faire courir un danger à l'enfant.

Bien que les fonctions du juge délégué aux affaires familiales et celles du juge des enfants aient des similitudes en ce que l'un et l'autre assurent la protection des enfants, les différences existant entre leurs domaines d'intervention, les circonstances qui président à leur saisine, les moyens mis à leur disposition ne me permettent pas d'entrevoir les bienfaits qui pourraient résulter de leur regroupement.

Le juge des enfants est juge de l'urgence, du péril. Il a une connotation pénale dont le juge délégué aux affaires familiales est exempt. Je crois préférable de consacrer à la fois la proximité mise en place en 2009 et la spécificité de chacun de ces deux juges.

Le questionnaire de Désiré Dalloz 

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ? Ou le pire ?

Mon meilleur souvenir ? mai 1968 : tous les examens reportés en septembre... mon pire souvenir ? celui des interminables heures de cours consacrées au droit de rétention du créancier gagiste et au classement des privilèges... Un cauchemar...

Quel est votre héros de fiction préféré ?

Donald Duck ... 

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

La liberté d'expression.

Référence

■ Rapport Delmas-Goyon, « Le juge du 21e siècle » Un citoyen acteur, un équipe de justice, : http://www.justice.gouv.fr/publication/rapport_dg_2013.pdf

 

 

Auteur :M. B.


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