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À propos d’environnement et d’air respirable
Pour celles et ceux qui ont eu la chance de prendre des vacances au grand air, le retour dans la pollution atmosphérique de nos villes est difficile ! Marianne Moliner-Dubost, maître de conférences HDR, co-directrice du Master Droit global du changement climatique à la Faculté de droit de l'Université Jean-Moulin - Lyon 3, auteur d’un cours sur le droit de l’environnement, nous donne les principes clés de la protection contre la pollution de l’air.
Quelle est la définition légale de la pollution atmosphérique ?
Formulée par la loi Lepage en 1996, et aujourd’hui codifiée à l’article L. 220-2 du Code de l’environnement, la définition de la pollution atmosphérique vise l’air ambiant extérieur mais aussi l’air dans les espaces clos, vaste problématique sanitaire qui a conduit à réglementer le radon, un gaz radioactif totalement naturel. Par ailleurs, elle intègre, outre les polluants chimiques ou physiques (oxydes d’azote, ozone, particules …), les agents biologiques comme les pollens qui, bien qu’étant naturellement présents dans l’air, sont regardés comme des polluants. Le lien doit ici être fait avec le « droit de chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé », issu de la loi Lepage. La santé humaine n’est toutefois pas le seul intérêt à protéger, la définition citant également, entre autres, les ressources biologiques, les écosystèmes et le climat.
Quels sont les principaux outils mis en place pour lutter contre la pollution de l’air ?
Pour réduire l'excès de mortalité ou de morbidité lié à la pollution atmosphérique et améliorer la protection de l’environnement, il est essentiel de réduire les niveaux de fond constatés dans la plupart des grandes villes. La loi Lepage de 1996 a créé pour ce faire les plans de protection de l’atmosphère, sorte de catalogue de mesures de police temporaires ou permanentes. À l’usage, ils n’ont pas fait leur preuve car les principaux leviers sont détenus par les collectivités (urbanisme, mobilité…). L’institution de zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) interdites aux véhicules les plus polluants pourrait apporter une solution à condition que l’outil ne soit pas transformé en « coquille lentement vidée par l’impréparation et le déni de l’État et des élus locaux » (F. Denhez).
Quelle est l’efficacité du contrôle juridictionnel en ce domaine ?
Concernant le contentieux de l’annulation, le contrôle du juge apparaît assez redoutable comme l’a montré la célèbre affaire « Les Amis de la Terre » dans laquelle le Conseil d’État en l’occurrence, après avoir constaté la carence de l’État, a manié l’injonction et l’astreinte pour amener celui-ci à agir afin que les valeurs limites de qualité de l’air soient respectées. À ce jour, l’État a dû verser 40 M€ d’astreinte (mais seulement 160 000 € à l’association requérante, le solde ayant été réparti entre des établissements publics de l’État et des organismes de surveillance de l’air). Et seules deux agglomérations, Paris et Lyon, sont encore en dépassement pour le dioxyde d’azote. En termes de responsabilité, la situation est tout autre puisque deux affaires seulement ont conduit à une condamnation tant il est difficile d’établir l’existence d’un lien de causalité entre la carence de l’État et les pathologies des requérants.
Qu’attendez-vous dans un avenir proche concernant la protection de la qualité de l’air ?
D’ici la fin de cette année, devrait être publiée la nouvelle directive européenne sur la qualité de l’air ambiant qui va remplacer et fusionner la directive Air pur pour l’Europe de 2008 et la directive Métaux lourds de 2004. Son principal apport sera de rapprocher, à l’échéance 2030, les valeurs limites européennes des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé qui sont plus protectrices de la santé. Les États membres pourront toutefois dans certains cas obtenir un délai de grâce de dix ans pour respecter les nouvelles normes ! Au plan interne, 33 nouvelles ZFE-m devraient être créées en 2025, la loi Climat-Résilience imposant une telle zone dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants, à moins que l’air que l’on y respire ne soit conforme aux recommandations de l’OMS !
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?
Mes premiers cours de droit (interne et international) de la protection de la nature, notamment en raison de la forte impression que leurs auteurs, passionnés et militants, m’ont faite.
Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?
En adoptant une interprétation large de la question, je dirais Marianne, figure allégorique de la République et incarnation de la défense des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité.
Quel est votre droit de l’homme préféré ?
La dignité humaine ou bien la liberté au sens large de l’article 4 de la DDHC, parce que ce sont à la fois des droits « remparts » qui protègent l’essence même de l’homme et des droits matriciels qui se déclinent pour engendrer d’autres droits.
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