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À propos des grèves
Plus d’un mois de bras de fer entre les syndicats et le Gouvernement autour de la réforme des retraites, il est temps de faire le point sur le contentieux du droit de grève. Pierre-Yves Verkindt, professeur, spécialiste de droit du travail, a bien voulu répondre à nos interrogations.
Peut-il y avoir des abus du droit de grève ?
Il faut en préalable rappeler que le droit de grève, droit individuel exercé collectivement, est constitutionnellement reconnu. Deux questions sont souvent confondues lorsque l’on aborde le traitement juridique du fait de grève. La première est une question de qualification : l’action collective entre-t-elle dans la catégorie de « grève » au sens du droit ? Ce n’est que dans l’affirmative, que doit être posée la seconde question de son caractère « normal » ou abusif. L’atteinte à la liberté du travail des non-grévistes et la désorganisation de l’entreprise sont les deux causes principales parfois combinées de reconnaissance d’un abus.
À quelles conditions peut-on considérer qu’il y a « grève » ?
Il y a grève en cas de cessation totale, collective et concertée de travail. C’est la réunion de ces trois éléments qui déclenche l’application du régime juridique applicable au salarié gréviste (protection contre le licenciement, interdiction de toute discrimination, etc.) et plus généralement aux relations de travail. Le préavis n’est obligatoire que dans les services publics visés aux articles L. 2512-1 s. du Code du travail.
Quels sont les principaux contentieux dus à des grèves ?
Les contentieux s’orientent dans quatre directions. La première concerne la qualification du « mouvement social » souvent teintée d’arguments sur le caractère abusif de la pratique (cette branche du contentieux connaît quelques excroissances, ainsi les décisions relatives à la valeur des constats d’huissier, Soc. 3 mai 2016, n° 14-28.353). La deuxième porte sur les conséquences de la grève (retenues sur les rémunérations ou contestation de la faute lourde du salarié seule à même de justifier une rupture du contrat de travail, Soc. 2 juill. 2014, n° 13-12.562). La troisième porte sur la réaction de l’entreprise (remplacement des salariés grévistes, décision de lock out, etc.) et la quatrième concerne les responsabilités engagées à l’occasion du conflit (en dernier lieu, Cass., ch. mixte, 30 nov. 2018, n° 17-16.047).
Voit-on une augmentation des conflits entre salariés en période de grèves ?
Les médias s’en font parfois l’écho sans que l’on puisse mesurer l’ampleur ni même la réalité du phénomène. Les noms d’oiseaux échangés entre grévistes et non-grévistes peuvent occuper dix secondes d’un journal télévisé (au demeurant sans le moindre intérêt) mais la question ne peut être appréhendée par le juriste qu’au travers de la jurisprudence (peu abondante) sur la liberté du travail ou sur les responsabilités engagées.
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?
Je n’ai pas en tête un évènement particulier mais plutôt le souvenir d’une sorte d’euphorie et d’une irrépressible envie d’apprendre lorsque j’ai rejoint en septembre la résidence universitaire où j’allais loger.
Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?
Je vais sans doute vous étonner mais mon héroïne est ’Ephémère du Pays sous l’écorce de ce merveilleux écrivain-voyageur Jacques Lacarrière. Celle dont il dit qu’elle est « preuve que l’on peut vivre et voler et aimer sans jamais connaître l’ombre du mot nuit… ». Quant à mon héros, c’est Etienne Lantier dans Germinal. Il est complexe mais il donne sans compter.
Quel est votre droit de l’homme préféré ?
Je me refuse à établir une hiérarchie y compris dans mes préférences. J’avoue cependant un faible pour l’article 1er de la Déclaration universelle des droits de l’homme (« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité »). Il rappelle au juriste que je suis que l’égalité de droits est une condition nécessaire mais non suffisante du respect de l’être humain.
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