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[ 19 septembre 2024 ] Imprimer

A vos mots juridiques, prêts, partez !

Chers étudiants en droit, vous feriez mieux d’aller choisir votre vocabulaire pour leur plaire, à vos professeurs et examinateurs, dans le Lexique des termes juridiques Dalloz. Serge Guinchard, professeur émérite de l’Université Panthéon-Assas (Paris II), doyen honoraire de la Faculté de droit de Lyon, recteur honoraire et Thierry Debard, professeur honoraire à la Faculté de droit de l’Université Jean Moulin Lyon 3, qui en assurent la direction scientifique, nous font le grand honneur de répondre à nos questions sur la langue du droit.

Quels étaient les enjeux du Lexique à sa création ?

Historiquement ces enjeux trouvent leur origine dans l’idée des professeurs Raymond Guillien et Jean Vincent que, postérieurement aux évènements de mai 1968, avec la massification de l’enseignement supérieur et la diversification de son public, il fallait offrir aux étudiants de 1re et 2e années de licence, mais aussi aux élèves de l'enseignement du second degré qui songeaient à poursuivre des études à caractère juridique, un « petit livre » les rendant immédiatement accessibles au vocabulaire juridique. C’est ce public qui explique que la première édition publiée à la rentrée académique 1970-1971 limitait son champ d’investigation aux matières et aux programmes des deux premières années des études juridiques, essentiellement le droit constitutionnel, le droit international public et le droit administratif, les finances publiques, le droit pénal et la procédure pénale et, pour le droit privé, le droit civil des personnes, de la famille et des obligations. Très vite, le succès de l’ouvrage permit de l’ouvrir aux matières juridiques du deuxième cycle.

Quels sont-ils aujourd’hui ?

Après avoir embrassé ces matières du deuxième cycle, tels que le droit des affaires (avec des notions de droit maritime), le droit du travail et de la sécurité sociale, la procédure civile et les voies d’exécution, le droit européen et le droit international privé, les enjeux du Lexique sont aujourd’hui, plus de 55 ans après sa création, de couvrir le champ des nouveaux domaines de la vie économique et sociale, avec le droit de l’environnement (que préfiguraient les définitions relevant du droit rural) et celui des nouvelles technologies et de l’intelligence artificielle. Le tout en tenant compte des apports des jurisprudences du Conseil constitutionnel et des Cours européennes, spécialement de la Cour européenne des droits de l’homme et en s’efforçant de respecter la terminologie française plutôt qu’anglo-saxonne ou en donnant les deux. Cependant, le fonds d’origine des expressions et mots latins a été conservé, complété par un nombre limité d’entrées relatives à l’histoire du droit. Ainsi, dans un format maîtrisé, mais grâce à une perspective encyclopédique progressivement affirmée, le Lexique est devenu un révélateur de l’ensemble du système juridique régissant la société.

Qu’est-ce qu’une bonne définition ?

Elle doit être la plus précise possible, d’un point de vue technique et scientifique, tout en étant formulée dans le respect de la langue française par le choix judicieux des mots. Si l’essentiel doit être dit, la définition ne peut cependant être alourdie par un exposé exhaustif du régime juridique applicable aux notions en cause. En réalité, le point le plus épineux consiste à déterminer quelles définitions nouvelles méritent d’être consacrées ou, si elles existent déjà, les entrées qui doivent être développées ou, au contraire, abrégées, voire supprimées.

Quelles sont les nouvelles entrées dernièrement ?

Il est difficile de choisir entre plus de 200 entrées nouvelles, toutes signalées par un cadre qui les entoure ; par exemple, Cavalier législatif, Cour d’appel financière, Cyberespace, Féminicide, Générations futures (droit des), Influenceur, Pacte européen sur la migration et l’asile, Pôle judiciaire, Système d’intelligence artificielle, Tribunal des activités économiques, Visioplainte.

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

S. G. : De ne plus l’être du jour où j’ai été agrégé par un jury présidé par Jean Carbonnier, ce qui m’a permis de transmettre aux actuels étudiants les résultats de mes recherches et ce que la vie m’a appris.

T. D. : En quelque sorte à l’inverse de mon collègue, j’ai envie d’insister sur le fait qu’après 7 ans d’internat, j’ai vécu l’accès au statut d’étudiant et l’installation dans une grande ville comme une véritable libération, et que ce sentiment de liberté, décliné de différentes manières, m’a habité durant toutes mes études.

Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?

S. G. : Tous ceux et celles qui ont permis à Jean de La Fontaine de nous émerveiller en lisant quelques-unes des 243 Fables qui portent son nom.

T. D. : Pour un juriste, notamment, le personnage de fiction le plus symbolique est probablement l’Antigone de Sophocle (mais celle de Jean Anouilh convient également), en ce qu’elle fait prévaloir sur la loi de la Cité une loi morale plus haute. De ce point de vue, on peut d’ailleurs prétendre que Sophocle est battu par … Agatha Christie ! En effet, dans Le crime de l’Orient Express, ce débat apparaît 2 fois : d’une part, les assassins ont commis leur crime au nom d’une loi morale qu’ils estiment supérieure aux règles de la justice que le criminel initial a réussi à mettre en échec ; d’autre part, Hercule Poirot hésite, et finalement renonce, pour les mêmes raisons, à dénoncer les assassins qu’il a identifiés.

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

S. G. : En fait j’en ai deux, l’un issu du droit substantiel, l’autre du droit procédural : le premier c’est la liberté d’expression parce qu’elle permet notamment aux professeurs d’enseigner librement et de publier le résultat de leurs recherches tout aussi librement. Le second ce sont les garanties offertes par l’exigence que si procès il doit y avoir, il doit respecter les règles du procès équitable, ce qui recouvre le droit à un juge, à un bon juge (notamment indépendant de tout pouvoir et impartial) et le droit à l’exécution de la décision du juge.

T. D. : Puis-je user du droit de ne pas être tout à fait sincère en mettant en avant le droit de se taire, plus couramment invoqué lors des interrogatoires de police ou de justice que dans le cadre d’interviews, mais qui a fait l’objet d’une jurisprudence importante dans la dernière période ?

 

Auteur :MBC


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