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Droit et politique
Éric Buge est ancien secrétaire général adjoint de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il est également l’auteur d’un ouvrage sur le droit de la vie politique (PUF, 2018). Il répond à nos questions sur le thème de la politique et du droit.
Quel est le travail de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique ?
La Haute Autorité est chargée de s’assurer que les principaux responsables politiques et administratifs exercent leurs fonctions publiques dans le respect des principes de probité et d’intégrité. Par exemple, elle contrôle et publie les déclarations de patrimoine et d’intérêts des membres du Gouvernement, elle autorise les départs dans le secteur privé, s’ils ne provoquent pas de conflits d’intérêts, et elle gère le répertoire des représentants d’intérêts. Ses missions allient ainsi procédures de contrôle des responsables publics et mécanismes de transparence à destination des citoyens.
Comment son indépendance est-elle garantie ?
Juridiquement, il s’agit d’une autorité administrative indépendante. Ce statut la préserve de toute forme de pression puisque ses membres ne dépendent d’aucune autorité. Par ailleurs, la moitié de ses membres sont des magistrats ou d’anciens magistrats. Ils sont nommés pour six ans et leur mandat n’est pas renouvelable. Enfin, la collégialité est, en tant que telle, une forme de garantie de l’indépendance de la Haute Autorité : c’est par la délibération collective que la décision finale est construite.
L’intervention du droit dans la vie politique est-elle une nouveauté ?
Oui, dans une très large mesure. Seules les élections font depuis longtemps l’objet d’un encadrement juridique précis. Le premier statut des partis politiques date, en France, de 1988. C’est dans les dix dernières années que des notions comme celles de « conflit d’intérêts » ou de « transparence » ont été inscrites dans le droit. Comme l’a montré Pierre Rosanvallon, de nouvelles exigences pèsent aujourd’hui sur la vie politique, telles que celles d’exemplarité ou de participation citoyenne. C’est sous leur influence que le droit régissant la vie politique s’enrichit et se renouvelle rapidement.
Quels sont les dangers auxquels la démocratie doit faire face aujourd’hui ?
Husserl écrivait en 1935 que le plus grand danger qui menaçait l’Europe était la lassitude. Je pense que cette phrase s’applique tout à fait aux démocraties contemporaines. Nous avons connu une sorte d’éclipse citoyenne durant ces dernières décennies, marquée par un repli collectif sur la sphère privée. C’est pourquoi il me semble important aujourd’hui d’encourager l’engagement civique, quelles que soient les formes qu’il prenne.
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?
Certainement une conférence de Jacqueline de Romilly à laquelle j’avais assisté par hasard. Elle citait les tragédies grecques de mémoire, étant alors devenue quasiment aveugle, avec une puissance d’évocation incomparable.
Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?
Birgitte Nyborg dans la série Borgen.
Gauvain, le héros du roman de Victor Hugo, Quatre-vingt-treize.
Quel est votre droit de l’homme préféré ?
Tous les droits se complètent et font système, mais s’il fallait mettre en valeur l’un d’entre eux, ce serait certainement le droit à l’éducation, qui en conditionne de nombreux autres.
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