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Jean Castelain
Depuis le 1er janvier 2010, Jean Castelain est le nouveau bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris (http://www.avocatparis.org/). Élu par ses pairs, il devient pour deux ans leur porte-parole et leur principale source d’information professionnelle. Garant de la déontologie professionnelle ainsi que de la discipline, il traite les réclamations des clients contre les avocats parisiens et agit également pour apaiser les conflits entre confrères ou entre avocats et magistrats. Par ailleurs, c'est lui qui désigne les avocats commis d'office. Enfin, il préside le conseil de l'Ordre de Paris (170 employés, 29 directions et près de 22 000 avocats) dont il est l'organe exécutif. Il inaugure son mandat par une innovation d’importance en partageant l’exercice de son bâtonnat avec Jean-Yves le Borgne, premier vice-bâtonnier d’un barreau français.
Crédit photo : Frédéric Imbert.
Cette élection à deux est une première en France, comment allez-vous vous répartir la fonction ?
Notre projet de rénovation de la gouvernance de l’Ordre des avocats au barreau de Paris est né du constat que nous avions fait Jean-Yves Le Borgne et moi-même il y a plusieurs années de l'extrême difficulté pour le bâtonnier d’assumer seul la totalité de ses missions. La gestion du plus grand barreau de France — 22 000 avocats — ne pouvait plus être assurée par un seul homme sans que celui-ci ne soit obligé de privilégier telle ou telle action. L’idée d’une gouvernance plus moderne, bicéphale, s’est alors imposée.
Pour autant, je n’abdique aucune de mes fonctions. Mais il est évident que Jean-Yves Le Borgne, compte tenu de son champ de compétence professionnel, sera, si l’on peut dire, le « bâtonnier du pénal ».
Quelle voix du barreau de Paris souhaitez-vous faire entendre au Conseil national des barreaux ?
Le président de la conférence des bâtonniers et le bâtonnier du barreau de Paris sont désormais vice-présidents du Conseil national des barreaux (CNB). Je me félicite de cette réforme qui était nécessaire pour assurer une meilleure représentativité de ces deux institutions en son sein.
Ami de longue date d’Alain Pouchelon, président de la conférence des bâtonniers, je suis convaincu que notre collaboration au sein du CNB sera bénéfique pour la profession.
Pourquoi instituer une maison des avocats dans le périmètre du tribunal de grande instance qui va — rappelons-le — être déplacé de la Cité vers le xviie arrondissement dans le cadre du projet du Grand Paris ?
La nouvelle maison des avocats de France est un magnifique projet que je veux porter avec une grande détermination. Il s’agit là d’une formidable occasion pour notre profession de mutualiser dans un bâtiment unique, l’ensemble des moyens et des besoins des institutions représentatives (CNB, conférence des bâtonniers) et des organismes techniques de la profession (Carpa, EFB, CNBF, UNCA, ANAAFA, LPA, CREPA). Au-delà du symbole, ce projet est fondé sur une évidente logique financière avec à la clé, des économies d’échelle pour l’ensemble des institutions.
À l’image du nouveau Palais de justice, cette maison des avocats sera la vitrine de notre profession.
Dans son rapport rendu au président de la République en mars 2009, la commission Darrois propose la création d’un acte d’avocat, acte entre particuliers contresignés par un avocat, à mi-chemin entre l’acte sous seing privé et l’acte authentique notarié. Quel est son intérêt pour le justiciable ?
L'acte d'avocat est un nouvel outil juridique, un acte qui apporte aux citoyens et aux entreprises plus de sécurité et plus de confiance.
L'avocat devient garant de l'acte qu'il prépare pour les parties, il certifie la date et l’identité des parties, et il éclaire celles-ci sur le contenu de l’acte.
Quelles mesures voulez-vous mettre en œuvre pour favoriser l’accès au droit ?
Je propose trois mesures phares pour faciliter l’accès de tous les Français au droit et développer l’activité de nos cabinets :
– la déductibilité fiscale des honoraires d’avocats, qui est une mesure d’équité entre citoyens et entreprises. Les sommes versées à leur avocat seront éligibles par les particuliers au rang de service à la personne et déductibles dans la limite du plafond actuel ;
– la mise en place « d’un chèque avocat » financé et distribué par les entreprises à leurs salariés ;
– un partenariat public/privé qui créerait une véritable « sécurité sociale juridique » en regroupant les fonds de l’aide juridictionnelle et les 700 millions d’euros versés par les Français au titre des divers contrats de protection juridique auxquels ils souscrivent sans pour autant les utiliser, auprès des compagnies d’assurance.
Dans le contexte de la transposition des directives européennes de lutte contre le blanchiment d’argent, comment envisagez-vous votre rôle de filtre entre les avocats ayant des soupçons à l’égard de leur client et les autorités financières ? Le précédent bâtonnier Christian Charrière-Bournazel y était très opposé (v. son entretien au Recueil Dalloz du 4 février 2010, n° 5, p. 312) ?
Jusqu’à présent le barreau de Paris a pris une position forte sur la non-dénonciation. Notre rôle sera de veiller à ce qu’un équilibre soit trouvé lors de la transposition, pour qu’en France l’avocat ne devienne pas le « délateur » de son client auprès des services de police.
Comment, selon vous, les avocats vont-ils s’approprier la nouvelle question prioritaire de constitutionnalité (v. le Focus sur Denys de Béchillon) ?
Je suis sûr qu’ils sauront, dès le 1er mars prochain, en tirer le meilleur usage dans les procédures dont ils ont la charge. Leur intervention devant le Conseil constitutionnel administrera la preuve de ce que les avocats sont les acteurs naturels de la création du droit de la plus Haute instance judiciaire française.
Est-ce que la suppression prévue du juge d’instruction va modifier le travail des avocats en France ?
Oui, cette réforme va d’évidence modifier les habitudes de travail de ceux d’entre nous qui font du pénal. Ils seront plus présents dans la phase de la procédure qui se déroulera sous la direction du juge de l’enquête et des libertés. L’avocat va devenir un véritable acteur de l’enquête. Nous ne pouvons que nous en satisfaire.
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ? Ou le pire ?
Je garde un souvenir très précis de la profonde admiration qu’a déclenché chez moi, un jour d’examen pourtant, la découverte du sujet que nous avait concocté le doyen Cornu. Ce remarquable professeur nous demandait de définir des mots (« fidélité », « secours », « assistance », etc.) à l’instar du dictionnaire juridique Capitant. L’exercice nous obligeait à une parfaite maîtrise des idées et outils que nous prétendions connaître. J’ai trouvé ce sujet éblouissant d’intelligence.
Quel est votre héros de fiction préféré ? Pourquoi ?
Sans hésitation : Indiana Jones ! Je ne vois pas d’autre héros de fiction capable de rivaliser avec lui sur le terrain de l’intrépidité et de l’humour !
Quel est votre droit de l’homme préféré ? Pourquoi ?
Comment vous répondre autre chose que l’article 1er de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ». C’est le principe d’où découlent tous les autres et le fondement de notre démocratie. C’est également le socle, je pense, de très nombreuses vocations d’avocats.
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