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La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire
La loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire a été considérablement enrichie puisqu’elle compte pas moins de 130 articles alors que le projet de loi du Gouvernement n’en comprenait que 13. Elle prévoit différentes mesures destinées notamment à réduire les déchets et sortir du plastique jetable, mieux informer le consommateur, réprimer les dépôts sauvages, développer la responsabilité élargie du producteur ou encore renforcer la lutte contre le gaspillage et l’obsolescence programmée. Marianne Moliner-Dubost, Maître de conférences (HDR) à l’Université Jean-Moulin-Lyon 3, auteure d’un manuel de Droit de l’environnement (Dalloz, coll. « Cours », 2019, 2e éd.), nous en décrypte les dispositions.
Quel est le fondement de cette loi ?
La loi du 10 février 2020 met en œuvre la Charte de l’environnement dans pratiquement tous ses articles ainsi que le principe pollueur-payeur avec le renforcement de la responsabilité élargie des producteurs (REP). La loi s’inscrit également, particulièrement en matière de REP, dans le cadre du paquet Économie circulaire composé de quatre directives adoptées en mai 2018 et complété par la directive du 5 juin 2019 visant à réduire l’incidence de certains produits en plastique sur l’environnement, dont la loi autorise au demeurant la transposition par voie d’ordonnances.
Qu’est-ce que la « responsabilité élargie du producteur » ? Qu’apporte la loi à son propos ?
La REP consiste à faire supporter aux producteurs la charge de la collecte, de la valorisation et du traitement des produits qu'ils ont mis sur le marché. Ils peuvent le faire de manière individuelle, ou collective dans le cadre d'un éco-organisme auxquels ils adhèrent et versent des contributions. La loi prévoit la création de nouvelles filières de REP entre 2021 et 2025 (emballages non ménagers, jouets, articles de bricolage et de jardin…) et l’extension de certaines filières existantes. La REP devra par ailleurs être réorientée vers l’écoconception et les contributions faire l’objet d’éco-modulations (bonus/malus) plus incitatives.
Quelles orientations / dispositions principales retenez-vous parmi les nombreuses dispositions législatives ?
Je suis très attentive à la question de la prévention des déchets, en particulier de ceux dont la production est inutile ou facilement évitable. Sur ce point, la loi contient de nombreuses dispositions, comme l’interdiction du dépôt de publicités commerciales sur les véhicules et de la distribution de cadeaux promotionnels dans les boîtes aux lettres, de l’impression systématique de tickets de caisse ou de carte bancaire, ou encore du conditionnement plastique des fruits et légumes frais. La prévention passe aussi évidemment par la lutte contre le gaspillage et la gabegie des emballages.
Quels sont les principaux apports de la loi en matière de lutte contre le gaspillage ?
La loi fixe des objectifs de réduction du gaspillage alimentaire dans les domaines de la distribution alimentaire, de la restauration collective et de la restauration commerciale. Elle étend aux commerces de gros l’obligation de dons des invendus comestibles à des associations et oblige les déchetteries communales à permettre à celles-ci la récupération ponctuelle d’objets en bon état ou réparables. Dans un autre registre, la délivrance de certains médicaments en officine pourra se faire à l'unité d’ici 2022.
Que prévoit la loi pour limiter les emballages ?
La loi permet ou facilite de petits gestes qui nous concernent tous pour ainsi dire au quotidien : le développement de la vente en vrac, la fourniture de contenants réutilisables et la possibilité d'apporter ses propres récipients en grande surface, la baisse du prix de vente des boissons à emporter lorsque le consommateur présente un récipient réemployable. Des objectifs de réduction des emballages, devront figurer dans le cahier des charges des éco-organismes dont le non-respect sera sanctionné. Enfin, les consommateurs pourront signaler aux éco-organismes des produits comportant un emballage qu’ils jugent excessif.
Quelle place la loi fait-elle au consommateur ?
La loi contient plusieurs dispositions visant à améliorer l’information du consommateur : la création en 2021 d’un indice de réparabilité pour les équipements électriques et électroniques qui sera complété ou remplacé en 2024 par un « indice de durabilité » incluant les critères de la fiabilité et la robustesse du produit ; le droit d’être informé sur la disponibilité de pièces détachées ainsi que sur les mises à jour des logiciels et leurs modalités d’installation. La loi contient également les linéaments d’une information sur la présence de perturbateurs endocriniens dans certains produits.
Que pensez-vous du calendrier de mise en œuvre des dispositions relatives au plastique ?
La mise en œuvre des interdictions de mise à disposition de produits en plastique à usage unique est assez rapide : 2020 pour les gobelets, verres, assiettes jetables, 2021, pour les pailles, couverts, couvercles à verre, touillettes, piques à steak et autres confettis…
On aurait sans doute pu accélérer l’interdiction de la délivrance de jouets en plastique avec les menus destinés aux enfants (2022) et le bannissement des récipients de cuisson, de réchauffe et de service dans les maternités, services pédiatriques et cantines scolaires (2025), sachant que le plastique chauffé ou contenant des aliments chauds peut libérer des perturbateurs endocriniens.
Mais c’est surtout pour les objectifs phare de la loi, à savoir :
- l'objectif de 100 % de plastique recyclé (encore faut-il préciser qu’il ne s’agit que de « tendre vers ») ;
- réduire de 50 % le nombre de bouteilles en plastique pour boisson à usage unique mises sur le marché ;
- bannir les emballages en plastique à usage unique
que les horizons retenus (respectivement 2025, 2030 et 2040) sont trop lointains, compte tenu de l’acuité de la problématique, sanitaire et environnementale, du plastique dans l’environnement.
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiante ?
Mes premiers cours de droit (interne et international) de la protection de la nature, notamment en raison de la forte impression que leurs auteurs, passionnés et militants, m’ont faite.
Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?
En adoptant une interprétation large de la question, je dirais Marianne, figure allégorique de la République et incarnation de la défense des valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité.
Quel est votre droit de l’homme préféré ?
La dignité humaine ou bien la liberté au sens large de l’article 4 de la Déclaration de 1789, parce que ce sont à la fois des droits « remparts » qui protègent l’essence même de l’homme et des droits matriciels qui se déclinent pour engendrer d’autres droits.
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