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Le notaire
S'orienter, étudier, passer des concours, suivre des stages, découvrir un métier, décrocher un contrat... Autant d'étapes importantes qui soulèvent, pour chaque étudiant, un foisonnement de questions. Afin de démêler les réalités des idées reçues, Dalloz Actu Étudiant a décidé de décrypter tous les mois les spécificités d'un métier du droit à partir du témoignage d'un professionnel.
Pour sa première édition, Dalloz Actu Étudiant s'est penché sur l'une des plus anciennes professions juridiques, dont l'existence remonterait au IIIe siècle après Jésus-Christ, à l'époque du Bas Empire Romain. Rencontre avec maître Patrick Bouilloux, notaire assistant dans une étude angevine moderne.
Qu'appréciez-vous dans le métier de notaire ?
Ce que j'aime c'est le contact. Le notaire a une relation de proximité avec ses clients. Il faut essayer de s'adapter, d'être à la portée du client qu'on a en face de soi car vous rencontrez toute la richesse et la pauvreté humaine. Je me suis intéressé à cette profession quand j'ai vu que c'était un confident de famille. Parfois vous êtes le seul à connaître les secrets de famille et vous devez gérer au mieux pour chacun. Dans une succession notamment, il est obligatoire de tout révéler sur la composition du patrimoine et tous les enfants ont les mêmes droits qu'ils soient légitimes, naturels ou adoptifs. Il y a une grande diversité dans ce métier, le quotidien n'est pas monotone. Le notariat touche à tous les domaines : droit immobilier, droit fiscal, droit de l'urbanisme, droit de la famille, droit rural, droit commercial, droit des sociétés.
Quel a été votre parcours professionnel ?
Je suis diplômé depuis 2002. Après mon master 2, j'ai passé le DSN (ndlr : diplôme supérieur de notariat) en deux ans, entre l'école et une étude parisienne. Ensuite, j'ai soutenu rapidement mon mémoire afin de me débarrasser des contraintes universitaires. Les jeunes diplômés qui ne soutiennent pas ne peuvent pas prétendre à une éventuelle installation.
J'ai travaillé dans plusieurs études à Paris, puis Bordeaux, Nantes et enfin Angers. Pour commencer, Paris c'est formidable. Ca va vite, c'est très actif. C'est un peu stressant mais on vous fait confiance plus vite qu'en province. J'ai reçu mon premier acte un mois seulement après mon arrivée dans l'étude, le 2 novembre 1999. C'était une très bonne expérience mais je trouve important, pour un notaire qui commence et qui souhaite s'installer, de changer d'étude pour faire ses preuves. Ca lui donne une vision plus large des choses car chaque étude fonctionne de manière différente. En plus, c'est plus facile d'évoluer et ça permet de ne plus être vu comme le petit stagiaire. Aujourd'hui, je cherche à m'associer mais c'est compliqué. Il faut s'accorder sur l'aspect humain et financier, le secteur géographique et vous ne décidez pas tout seul.
Comment s'organise une étude notariale ?
Ce sont très souvent des associations. Dans cette étude, nous sommes seize salariés et trois associés. Il est plus rare de trouver des notaires individuels. À Angers, sur une dizaine d'études, il n'y en a qu'une seule. C'est un peu lourd à gérer tout seul. Quand le notaire n'est pas là, il est obligé de déléguer la signature de ses actes à un autre notaire. On le voit plutôt chez d'anciens notaires. Aujourd'hui, la jeune génération préfère s'associer. Cela ne change rien au prix de l'étude car la clientèle est plus importante s'il y a plusieurs associés. C'est un métier d'équipe. C'est rare que vous preniez les décisions seul. Le notaire ne doit pas être personnel. Il ne faut pas qu'il ait peur de consulter même s'il s'agit d'interpréter un texte.
Comment a évolué le notariat en France ? S'est-il modernisé ?
C'est un métier qui se rajeunit, qui est moins poussiéreux. Les études se sont rafraîchies. On essaie de se rapprocher de la philosophie des avocats qui ont réussi à avoir une relation avec leur clientèle plus dynamique, plus jeune. On est de moins en moins derrière un grand bureau. Et le notariat s'est ouvert très récemment aux femmes. Il y a trente ans, il n'y en avait presque pas. Ca féminise la profession qui en a bien besoin. Néanmoins, c'est un métier de plus en plus complexe, notamment avec l'inflation législative. Il faut se remettre en cause en permanence, être curieux, lire beaucoup de revues spécialisées. Ce métier exige une formation continue.
Comment voyez-vous l'avenir de votre profession ? Y aura-t-il un rapprochement avec les avocats, comme le préconise le rapport Darrois, et la création de l'acte d'avocat ?
On sort d'une période très difficile. En 2009, de nombreuses études notariales ont perdu environ 20 % de leur chiffre d'affaires. Les notaires avaient déjà connu une crise au début des années 1990. C'est cyclique. L'an dernier, quelques études ont dû licencier mais en dehors de ces périodes, notre profession n'est pas touchée par le chômage. Je suis assez optimiste, je pense que nous allons évoluer dans le bon sens. Nous sommes délégataires de la puissance publique et nous serons toujours un percepteur du Trésor public. Je ne pense pas que l'acte d'avocat change quelque chose. La portée est très limitée car seul le notaire apporte son authenticité à un acte. Ce qui nous sépare des avocats, c'est le monopole que nous avons sur la publicité des actes. On travaille tout de même de plus en plus avec les avocats. S'associer avec eux, je trouve ça intéressant. Dans une même structure, vous pouvez ainsi envoyer votre client vers l'avocat. Le garde des Sceaux nous y pousse. Mais nous n'y sommes pas encore.
Questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d'étudiant ? Ou le pire ?
Toutes mes années d'études ! J'en garde un excellent souvenir, à part les partiels mais comme tout le monde. J'ai adoré la fac, l'ambiance, l'insouciance, l'absence de responsabilités. C'était moins drôle d'être noté. Il faut que les étudiants en profitent bien car ils vont regretter ces belles années.
Quel est votre héros de fiction préféré ? Pourquoi ?
Enfant, j'ai toujours adoré Tintin et son côté baroudeur, même s'il ne me correspond pas. J'aime le fait qu'il réalise seul ses enquêtes, comme James Bond, même s'ils ne vivent pas dans le même milieu. Je suis aussi passionné de voitures et j'adore son Aston Martin. J'achète peu de revues en dehors de mon domaine d'activité sauf des magazines automobiles. D'ailleurs, beaucoup de notaires se passionnent pour les voitures et rares sont ceux qui roulent dans des voitures quelconques.
Quel est votre droit de l'homme préféré ? Pourquoi ?
C'est la liberté d'expression car dès qu'on la perd, on instaure une prison permanente. Le fait d'avoir différents journaux, de gauche et de droite est quelque chose d'absolument fondamental.
Carte d'identité du notaire
Incontournable en France, le métier de notaire est très répandu dans le monde. Il est actuellement pratiqué dans 77 pays et notamment 21 de l'Union européenne. En France, le notariat rapporte chaque année 5,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires et enregistre 3,6 millions d’actes authentiques.
■ Les chiffres
– 9 002 notaires en exercice au 1er juillet 2010
– 5 851 offices notariales dont 1 317 bureaux annexes
– 44500 salariés
– 28 % de femmes
– 48 ans de moyenne d'âge
■ La formation
Elle requiert sept ans d'études.
Concernant la formation universitaire, l'étudiant doit justifier d'un master 1 minimum avant de passer son master 2 en droit notarial. Il prépare ensuite son DSN (diplôme supérieur de notariat) en deux ans, par un ou plusieurs stages en étude et une formation dans une université associée à un centre de formation (CNEPN).
La formation professionnelle exige de passer par un centre régional de formation professionnelle notariale (CRFPN). Le candidat doit obtenir un diplôme d'aptitude à la fonction de notaire en un an puis effectuer un stage en office de deux ans.
Il existe une troisième voie en interne qui permet aux clercs de notaire de devenir notaire grâce à leur expérience, à l'obtention de diplômes et un dernier stage.
■ Les domaines d'intervention
Droit de la famille et des régimes matrimoniaux, droit des successions, droit immobilier, droit fiscal, droit des affaires, droit de l'urbanisme, droit de l'environnement, aménagement du territoire, droit des collectivités territoriales.
■ Le salaire
Une fois le titre professionnel acquis, la rémunération d'un notaire « correspond au minimum à celle d’un cadre supérieur et sans limites », selon Patrick Bouilloux. Avant cela, elle s'établit entre 1400 et 1800 euros par mois.
■ Les qualités requises
Polyvalence, rigueur, éthique, probité, impartialité, confidentialité.
■ Les règles professionnelles
Secret professionnel ; responsabilité civile, pénale, disciplinaire.
■ Site
Notaires de France : http://www.notaires.fr/notaires/jsp/site/Portal.jsp
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