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©Crédit photo Élodie Grégoire
Le nouveau bâtonnier de Paris est Marie-Aimée Peyron !
Après une année de dauphinat, le nouveau bâtonnier de Paris Marie-Aimée Peyron a pris ses fonctions le 1er janvier 2018. Elle représente la voix des 26 700 avocats parisiens, soit près de la moitié des avocats de France, et a bien voulu répondre à nos questions.
Quelles sont les raisons, selon vous, de votre succès aux élections du Bâtonnat parisien ?
Je vais essayer de répondre à cette question dont la réponse appartient à celles et ceux qui m’ont accordé leur confiance !
En premier lieu, je tiens à rappeler que j’ai été élue avec le Vice-Bâtonnier Basile Ader.
Il s’agit donc d’un succès partagé !
Confiance !
Le mot est lâché…
Notre profession est à l’aune de nombreux bouleversements.
Je remarque que j’ai employé l’expression « à l’aune » qui a signifié « bâton » jusqu’à la fin du XIXe siècle !
Il fallait donc rétablir cette confiance, tout du moins la renforcer.
Dès lors, nos promesses de campagne se sont fondées sur un slogan porteur « Une voix pour tous les avocats » et « L’Ordre est à vous ! L’Ordre c’est vous ! ».
Il était essentiel de nous engager à réformer et à moderniser notre Ordre afin de le rapprocher des avocats.
Cet engagement suppose un Ordre connecté, au service des autres, un barreau inclusif, participatif et force de propositions.
Cet engagement suppose une plus grande visibilité, une transparence sans laquelle les avocats se sentent éloignés des décisions prises par leur Bâtonnier et les membres du Conseil de l’Ordre qui l’entourent.
Nous avons également pris l’engagement d’aider les avocats à épouser le virage numérique, à s’ouvrir davantage à l’international, à se tourner vers l’inter professionnalité.
Nous avons également fait avec le Vice-Bâtonnier Ader de la lutte contre les discriminations et l’égalité l’une des priorités de notre mandat.
Last but not least : nous nous sommes rapprochés pour mieux travailler avec le Conseil National des Barreaux et la Conférence des Bâtonniers afin de parler d’une seule et même voix aux pouvoirs publics.
Que peut faire l’Ordre des avocats face aux legaltechs ?
Nous ne saurions accepter que bon nombre de legaltechs qui ne sont pas contrôlées par des avocats, qui ne disposent ni de la compétence nécessaire, ni de notre déontologie, ni de l’assurance professionnelle à laquelle nous souscrivons, investissent le marché du droit au détriment des intérêts des justiciables.
Il s’agit là d’une concurrence déloyale et dangereuse au détriment des citoyens qui se voient appeler un numéro de téléphone surtaxé ou ne sachant pas ce que deviennent leurs données personnelles.
La réponse la plus adéquate consiste à favoriser la prise en mains par les avocats eux-mêmes de leur avenir numérique, ce que beaucoup de cabinets font déjà.
Le Barreau de Paris dispose de son propre incubateur, créé en 2014.
Ce dernier, tout en demeurant un espace de réflexion et de communication institutionnel dans le domaine de l’innovation, incube désormais des legaltechs créées par des avocats.
Dès lors, l’incubateur permet aux legaltechs de se structurer et de se développer dans un environnement favorable, dans l’intérêt tant de la pérennité de notre profession que celui des justiciables.
L’incubateur bénéficie d’un espace dédié à l’École de Formation du Barreau, ce qui leur permet de travailler efficacement ensemble, de définir des projets innovants.
Et nous avons également mis en place des enseignements en droit numérique incluant des projets innovants dans le cadre de la création du « LabEFB ».
Nous entendons reprendre le contrôle de l’information juridique en ligne en plaçant l’avocat au cœur de la « Cité numérique » et permettre aux avocats de bénéficier des outils nécessaires tant dans le cadre de la formation initiale que continue pour s’emparer du numérique. Notre réponse est de prôner des legaltechs composées au minimum à 51 % d’avocats.
Quel sont les défis à relever dans la lutte pour l’égalité hommes – femmes de la profession ?
Je veux faire sauter le plafond de verre.
Alors même que le Barreau de Paris est à 54 % un barreau féminin, les femmes gagnent en moyenne 51 % de moins que les hommes, à travail et compétences égales.
C'est inacceptable a fortiori pour des professionnels de la justice.
Nous devons absolument inciter les cabinets à mettre un terme à la disparité des rémunérations.
Il faut en outre impérativement mettre fin aux mauvais traitements, dans le cadre de la collaboration libérale, à la fin des contrats des femmes qui annoncent leur future maternité.
À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, un grand nombre de réflexions et propositions ont été prises à l’unanimité par le Conseil de l’Ordre tant au regard de la parité que des violences faites aux femmes.
Notamment, le Barreau de Paris a voté un plan d’actions en vue d’assurer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes avocats.
Le Barreau de Paris s’est doté d’une Commission égalité professionnelle.
Il s’est agi notamment de renforcer la protection des avocates collaboratrices de retour à leur cabinet à l’issue d’un congé maternité.
Nous avons consacré lors de notre premier conseil du 6 janvier 2018 les agissements sexistes comme constitutifs de ces manquements, en mentionnant expressément dans le RIBP qu’ils constituaient des atteintes à nos principes essentiels.
J’entends en ma qualité d’autorité de poursuite, poursuivre les agissements inadmissibles devant les formations disciplinaires.
Doivent être poursuivies et sanctionnées toutes les formes de discriminations que ce soit à l’embauche, ou durant le développement de la carrière.
Et évidemment aux faits de violences et de harcèlement sexuels.
C’est le sens du dispositif qui a été voté par le Conseil de l’Ordre le 6 mars 2018, et qui met en place un système d’accueil des victimes sécurisé et transverse, de l’EFB à l’Ordre, et prévoit des mesures d’accompagnement et de poursuites des auteurs.
Ainsi,
Trois rapports ont été soumis au vote du Conseil de l’Ordre :
1) Un premier rapport qui a inséré le principe « d’égalité » dans le RIBP et a créé une infraction spécifique en cas de manquement à ce principe, comme 17e principe essentiel.
2) Une liste de 10 propositions a été établie sur la mise en œuvre d’une politique d’égalité au sein du Barreau de Paris dans la perspective de contribuer à résorber les écarts actuels.
Quatre propositions ont pour objectif de :
• Créer un cycle de formation « ÉGALITÉ », incluant la lutte contre le sexisme, le harcèlement et les violences faites aux femmes dès la formation initiale,
• Sanctionner les auteurs et accompagner les victimes,
• Structurer la communication en centralisant sur le site de l’Ordre les outils et les informations, en créant un FAQ spécial Égalité.
3) Un troisième rapport préconise la mise en place d’une politique volontariste de lutte contre les agissements de harcèlement et de violences sexuelles au sein du Barreau de Paris.
Parallèlement, concernant les congés maternité, l'Ordre met en place une avance de trésorerie pour les cabinets qui en ont besoin et qui en formulent la demande.
Nous allons par ailleurs encourager le télétravail et créer des trophées de l’égalité pour promouvoir les cabinets qui développent des actions en ce sens.
Comment envisagez-vous votre rôle concernant le déménagement du Tribunal aux Batignolles ?
Du « nouveau Tribunal » car la Cour d’assises, la Cour d’appel et la Cour de cassation restent sur l’Ile de la Cité.
Il nous appartient avec l’aide du Président Hayat de veiller à ce que tout fonctionne bien pour les justiciables et leurs avocats.
Il appartient également aux avocats de s’approprier ce nouveau Tribunal dans l’intérêt de leurs clients.
Avec Basile Ader, nous devons veiller à ce que les avocats puissent travailler dans de bonnes conditions et organiser des permanences déontologiques sur les deux sites, à l’actuel Palais et au nouveau Tribunal, de même que les permanences pénales d’urgence.
La Maison des avocats, dont les travaux de construction ont pris du retard en raison d’un problème de nappe phréatique et des intempéries, devrait être terminée début juillet 2019 avec des espaces de travail et de coworking pour les avocats et leur permettre de recevoir leurs clients.
En attendant, il nous faut veiller à ce que tout se passe bien avec les locaux dont nous disposons : le bureau pénal, l’antenne des mineurs, les box pour les consultations gratuites et nos espaces vestiaires-courriers. Tout sera plus simple en juillet 2019.
Nous nous préoccupons également des problèmes d’accès au nouveau Tribunal et de stationnements.
Nous avons déjà saisi et devons rencontrer Anne Hidalgo, Maire de Paris, et Valérie Pécresse, Présidente du Conseil Régional à ces sujets.
Le questionnaire de Désiré Dalloz
Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ? Ou le pire ?
Que d’excellents souvenirs !
Quel est votre héros de fiction préféré ?
Anna Karenine. Je suis passionnée par la civilisation russe. Au demeurant, je suis titulaire d’un certificat de langue et de civilisations orientales en russe. Anna Karenine représente pour moi l’incarnation du courage, de la recherche de la liberté, du combat contre les préjugés susceptibles de freiner l’essor de la société.
Quel est votre droit de l’homme préféré ?
Tous les droits de l’Homme pour lesquels nous luttons quotidiennement en France et dans le Monde sont mes préférés. Si je devais n’en choisir qu’un seul en ma qualité de Bâtonnier de Paris : le droit à l’Avocat.
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