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[ 12 mai 2021 ] Imprimer

Le parrainage d’étudiants lyonnais

Quand le monde judiciaire et le monde universitaire s’organisent ensemble à Lyon, les étudiants pourraient bien mieux travailler et mieux vivre cette période terrible liée à la crise sanitaire. Hervé de Gaudemar, professeur et doyen de l’Université de Lyon 3, a bien voulu répondre à nos questions sur cette initiative de parrainage en cours.

De quel constat partez-vous ?

Le constat est aujourd’hui largement partagé, mais il ne l’a pas toujours été : les étudiants ont été particulièrement atteints par les mesures sanitaires. Le premier confinement a été d’une violence inouïe. Plusieurs collègues de la Faculté de droit ont été obligés de mettre en place, en l’espace d’un week-end, le Collectif de solidarité étudiante pour apporter un soutien matériel et psychologique aux nombreux étudiants en détresse qui nous ont été signalés. Mais si le deuxième confinement a été sans doute moins traumatisant pour la société, il n’en a pas été de même au sein des universités. L’arrêt des cours en présentiel a été très nocif. On a d’abord cru qu’il l’était pour les étudiants de 1re année, ce qui était vrai. Mais on s’est rendu compte qu’il l’était aussi pour les étudiants de master. Ils sont plus nombreux à venir d’autres villes, si ce n’est de l’étranger, qu’en 1er cycle. Ils sont donc particulièrement touchés par l’isolement lorsqu’il n’y a plus de cours en présentiel. Mais ils ont aussi rapidement compris qu’ils allaient avoir du mal à trouver des stages, qu’ils n’allaient plus avoir un accès aussi simple aux intervenants professionnels, et en définitive qu’ils allaient finir leurs études devant un écran d’ordinateur, sans grandes perspectives professionnelles. Incontestablement les étudiants de master avaient perdu pied.

Comment s’organise ce parrainage ?

Au mois de janvier, la presse a mis en avant la détresse des étudiants. Cela a été tout particulièrement le cas à Lyon où plusieurs tentatives de suicide ont eu lieu. L’opération de parrainage s’est montée rapidement à l’initiative du président du tribunal judiciaire de Lyon, Michaël Janas, et du procureur de la République de Lyon, Nicolas Jacquet, qui ont tous deux des enfants dans l’enseignement supérieur. Soucieux de donner des perspectives aux étudiants et de les entourer comme on le ferait en famille, ils ont proposé d’instaurer un lien entre chaque étudiant volontaire et un professionnel du droit, également volontaire. C’est la famille du droit qui était appelée à se former pour faire face aux difficultés vécues par les étudiants. Emmené par le bâtonnier Serge Deygas et la vice-batonnière Joëlle Forest-Chalvin, le Barreau de Lyon s’est immédiatement lancé dans l’opération, ainsi que les trois facultés de droit (Lyon 3 que je dirige, Lyon 2 et la Catho), et les juridictions administratives. Par cette opération, la famille lyonnaise du droit a porté des valeurs fortes qui sont celles de la solidarité et de l’égalité.

A qui et comment s’adresse-t-il ?

L’opération de parrainage a été ouverte à Lyon 3 à tous les étudiants de master et aux étudiants de 3e année de licence. Elle a rencontré un grand succès qui témoigne bien des attentes des étudiants, mais aussi des professionnels du droit qui ont souhaité se rendre utile. Elle constitue une grande fierté pour nous tous.

Sur le plan pratique, les choses se sont passées très simplement. Les étudiants se sont portés volontaires en décrivant sommairement leur projet professionnel. Mon secrétariat les a mis en relation avec des professionnels du droit volontaires dont les listes ont été constituées au sein des juridictions judiciaires et administratives, ainsi qu’au sein du Barreau. Il appartenait ensuite à chaque parrain / marraine de prendre contact avec son/sa filleul et de lui apporter une aide adaptée à sa situation. Dans certains cas, il s’est agi d’une visite du tribunal, dans d’autres cas, des locaux ont été ouverts pour que les étudiants viennent y travailler. Dans tous les cas, la rencontre a permis de consolider l’orientation professionnelle des étudiants, de les guider et de les rassurer. C’est une opération qui fera date par son échelle, mais aussi par son utilité. Je suis d’ailleurs persuadé qu’elle mérite d’être pérennisé après la fin de la crise sanitaire car elle permet de pallier à bien des déterminismes sociaux qui touchent ici non pas la connaissance, au sens académique du terme, mais les connaissances résultant de l’entourage familial ou amical

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

J’ai commencé mes études à Aix-en-Provence. Je me sentais à l’étroit au lycée, et c’est la liberté que j’ai découverte en entrant à l’Université. Cette liberté, décriée par certains, je l’ai vécue pour ma part comme une libération. Ayant été un étudiant heureux, ce qui ne veut pas dire insouciant, j’aurais donc de nombreux bons souvenirs à raconter (quelques moins bons aussi, notamment pendant les périodes d’examen…). Le siège de l’Université par la police, trois jours durant, pour procéder à l’arrestation d’un professeur s’étant réfugié dans son bureau, en profitant de la franchise universitaire, fait incontestablement partie de ces bons souvenirs. Avoir eu ce professeur en cours de droit administratif, quelques mois plus part, à sa sortie de prison, en constitue un autre, tout aussi savoureux ! Je peux encore mentionner le spectacle des Rachimbourgs, tradition aixoise où les étudiants se moquent, sur le modèle d’un carnaval, de leurs propres travers et surtout de ceux de leurs professeurs. Et tous ces moments merveilleux de la vie étudiante parisienne lorsque j’ai rejoint Assas en maîtrise.

Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?

Arsène Lupin, que j’admirais adolescent, James Bond auquel j’ai été parfois tenté de m’identifier…, les frères Joffo qui m’ont tant ému enfant, ou encore Romain Kacew de la Promesse de l’aube me viennent immédiatement à l’esprit. Du côté des héroïnes de fiction, c’est incontestablement vers le personnage de roc joué par Simone Signoret dans l’Armée des ombres que je me tourne ou vers celui de Brigitte Bardot dans La vérité, bien plus fragile.

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

Le droit de jouir de la vie et de la liberté, comme on le trouve si bien exprimé dans la déclaration de Philadelphie de 1776. Les autres droits en découlent tous ! 

 

Auteur :Marina Brillé-Champaux


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