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[ 17 septembre 2020 ] Imprimer

Les enseignants en droit : quelles différences entre Professeurs des universités, maîtres de conférences, chargés de TD ?

En présentiel ou en virtuel, ils sont là devant vous, pour vous, par vous en cette rentrée 2020-2021. Chargé d’enseignement à l’Université de Lorraine, Chloé Liévaux a bien voulu nous parler d’un métier passionnant : enseignant à l’université. 

Quels sont les différents enseignants qui se présentent devant les étudiants ?

C’est une très bonne question car cela n’est pas souvent présenté aux étudiants qui généralement, ne distinguent pas les enseignants qu’ils ont en face d’eux mais surtout, n’ont pas idée du cursus et de leur parcours. Sans entrer dans d’infinis détails, l’on peut résumer cette présentation de la sorte : les enseignants qui dispensent des cours magistraux ou CM sont généralement des maîtres de conférences ou des Professeurs des universités. Leur parcours pour l’accès à l’enseignement supérieur est assez similaire dans la mesure où ils ont effectué une thèse de doctorat puis ont obtenu la qualification aux fonctions de maître de conférences. Pour les Professeurs d’université ils ont ensuite passé puis obtenu le concours de l’agrégation. Qu’ils soient maîtres de conférences ou Professeurs, les universitaires sont enseignants mais pas uniquement : ils sont enseignants-chercheurs. Leur rôle, au-delà de la fonction d’enseignant, est de promouvoir le savoir universitaire par la recherche. Les productions scientifiques des universitaires sont variées : il peut s’agir de la rédaction d’un manuel ou d’un ouvrage, d’articles pour des revues juridiques, de notes et d’analyses d’arrêts ou encore de participation à des manifestations scientifiques telles les colloques. En ce sens, les universitaires par leur activité de recherche produisent la « doctrine ». 

Les étudiants ont également des travaux dirigés qui sont alors dispensés par les chargés de travaux dirigés. Là encore, le plus souvent, il s’agit de doctorants qui sont eux-mêmes dans la rédaction de leur thèse pour bien souvent accéder aux fonctions de maître de conférences. Plus ponctuellement, l’on peut trouver des vacataires qui ne sont pas universitaires mais professionnels. Ils peuvent alors dispenser des cours magistraux ou des travaux dirigés mais ils sont bien moins nombreux que les universitaires.

Quelles sont les différentes étapes pour enseigner à l’Université ?

Là encore, c’est une question intéressante qui n’est que rarement abordée ! Pour enseigner à l’Université, il est d’abord nécessaire de réaliser un cursus universitaire jusqu’au Master II qui se conclut par la production d’un mémoire, généralement mémoire de recherche. Ensuite, se présente l’aventure de la thèse qui est indispensable à l’accès à la voie universitaire. Il s’agit d’un exercice qui peut apparaître périlleux. Commence la question du choix du sujet, du directeur, de l’orientation à prendre puis, ces premières étapes passées, commence le long travail de recherche, d’élaboration progressive du plan puis de la rédaction. Il s’agit du premier travail de recherche dont la durée varie entre 3 à 6 ans. L’on s’y engage souvent par passion pour la recherche et par curiosité scientifique. Ces moteurs s’associent généralement avec l’envie de poursuivre par une carrière universitaire. La thèse est un exercice qui consiste dans le fait d’effectuer des recherches afin d’élaborer un travail scientifique porté par une solide méthode. Proposer une thèse, c’est avant tout proposer une lecture originale, personnelle et scientifiquement juste, d’un objet d’étude. L’aboutissement de la thèse est la soutenance qui consiste dans le fait de présenter ses travaux et d’échanger avec les membres du jury autour de ces travaux. Elle dure entre 2h30 et 3h. Le titre de docteur est donc associé au diplôme de doctorat qui est un diplôme de troisième cycle. Passé cette étape, il est nécessaire d’obtenir la qualification. La qualification est accordée par le Conseil national des universités. Cette instance accorde notamment la qualification aux fonctions de maître de conférences. Enfin, il faudra trouver un poste au sein d’une université. Passées ces étapes, il est possible de passer le concours de l’agrégation de droit pour devenir Professeur des universités ou encore l’habilitation à diriger des recherches qui permettra à son tour au maître de conférences de suivre des étudiants en thèse. 

Quelles recommandations pour devenir enseignant-chercheur ?

Il faut avant tout être passionné pour devenir enseignant-chercheur en droit ! Il faut avoir le goût de l’enseignement. Il faut aimer les étudiants, vouloir les éveiller en permanence à cette curiosité juridique. Enseigner le droit, cela n’est pas uniquement délivrer aux étudiants une somme d’informations qu’ils auront à leur tour à apprendre et à savoir restituer. C’est surtout leur transmettre le goût du droit, les questions qu’il pose, les enjeux qui s’y cachent, les controverses doctrinales. C’est également vouloir les éveiller à la recherche. Il faut bien évidemment avoir également une passion pour la recherche qui constitue une part très importante du travail de l’enseignant-chercheur. Pour devenir enseignant-chercheur, il faut alors être curieux de toute chose, dès les premières années. Il faut ensuite s’orienter vers un Master II afin de réaliser un mémoire de recherche. C’est réellement là que l’étudiant va pouvoir sentir son intérêt pour la recherche. Il lui faudra alors une solide culture juridique ainsi qu’une solide connaissance de la méthode en droit. Si l’on devait résumer : rigueur et curiosité !

NB: Le but de cette interview est de présenter les différents intervenants devant les étudiants ainsi que leurs statuts. Et non de faire une fiche métier détaillant l’ensemble des modes d’accès à ces statuts. Nous pouvons préciser qu’il est possible d’accéder à la fonction professorale par la voie longue selon certaines conditions. Par ailleurs, la réussite au concours de l’agrégation dispense les professeurs de la qualification délivrée par le CNU.

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

Mon parcours universitaire a été riche … c’est donc bien difficile de sélectionner un seul et unique souvenir ! Je pense notamment la rencontre d’un enseignant, Monsieur Éric Martinent à qui je dois mon éveil du droit mais aussi à mon entrée en Master II droit pénal fondamental à l’université Jean Moulin Lyon III. Il était dirigé par le professeur Xavier Pin, c’est à ce moment que j’ai décidé de m’engager dans la carrière universitaire. C’est ensuite la rencontre de mon directeur de thèse, le professeur Mistretta. Sa confiance m’a portée et permis de franchir bien des doutes dans cette aventure de thèse. Enfin, s’il ne devait en rester qu’un, cela serait sans doute la soutenance de thèse. C’est un moment que l’on imagine dès le début. On l’imagine toujours lointain. Parfois, on l’appréhende. Et le voilà qui se rapproche … et quand la soutenance commence, plus rien n’existe, ce moment est très riche car il permet la contradiction, le débat autour de ce travail si personnel qu’est la thèse. C’est aussi la fin d’une période et s’ouvrent alors une multitude de possibles. 

Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?

Pour ce qui est de l’héroïne, c’est sans hésiter Alice du Roman Les aventures d’Alice au pays des merveilles de Lewis Carroll. Je crois d’ailleurs que je ne citerai qu’elle pour pouvoir développer mon propos. Au-delà de l’aspect rêveur et merveilleux de l’ouvrage, Alice incarne à elle seule une multitude de questions philosophique. D’abord, parce qu’elle change en permanence d’état, passant de petite à grande par exemple. Cela questionne alors « qui elle est », et plus largement l’identité dont les métamorphoses apparaissent comme normales. L’identité même est remise en question, elle est une fiction car la seule chose réelle, ce sont les perceptions de la réalité (c’est d’ailleurs la théorie de David Hume). C’est alors l’absence d’unité de l’identité qui est ici expérimentée par le rêve. 

Alice est également ouverte au monde et curieuse. La chenille lui conseille à ce titre de ne jamais perdre son sang-froid ; c’est selon elle la seule façon de rester éveiller car l’émerveillement repose sur la surprise. Alice est questionnée par la temporalité qui n’est, dans cet univers, pas plus logique que les proportions. Elle est alors confrontée au « nonsense » qui l’oppose alors à toute rigueur et à toute logique. C’est d’ailleurs intéressant de se pencher sur son auteur qui, mathématicien, a développé certaines méthodes de logique intéressant le juriste. Il est à ce titre cité par M.-L. Mathieu-Izorche dans son ouvrage logique et raisonnement juridique. 

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

Je pense qu’il s’agit du droit à la liberté d’expression. 

 

Auteur :Marine Brillé-Champaux


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