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[ 2 juin 2016 ] Imprimer

L’évasion fiscale

Début avril 2016 éclatait le fameux scandale des Panama Papers, dans lequel des milliers de documents publiés par de grands journaux internationaux révélaient le recours à l’évasion fiscale de centaines de personnalités publiques et politiques au cours des quarante dernières années. C’est l’occasion pour nous de revenir sur la question de l’évasion fiscale en France et en Europe avec Hippolyte d’Albis, économiste et professeur à l’Université Panthéon-Sorbonne (Paris 1).

Évasion fiscale, optimisation fiscale ou fraude fiscale, comment faire la différence ?

Le cadre juridique est tout à fait précis en la matière. Par exemple, un particulier résidant en France peut placer son argent à l’étranger, détenir des comptes à l’étranger ou encore percevoir des revenus à l’étranger mais il doit le déclarer. Sinon, il est en situation d’évasion et de fraude fiscale. En revanche, une personne ayant décidé de vivre à l’étranger et qui y transfert ses capitaux, est dans son bon droit, même si cette décision est motivée par des raisons d’optimisation fiscale, c’est-à-dire afin de réduire le montant de son impôt. 

Pensez-vous qu’il faudrait harmoniser les politiques fiscales européennes afin d’éviter la fuite des capitaux ?

Dans le cas où les résidents déclarent leurs revenus, la question ne se pose pas vraiment tant que le lieu de résidence du déclarant détermine le lieu de taxation. On peut même dire dans ce cas que les capitaux ne « fuient » pas ! Ils vont simplement se placer là où, selon leur détenteur, les opportunités de rendement et de risque sont les meilleures. Un impôt unique sur le capital peut permettre d’éliminer les stratégies d’optimisation mais doit être mis en place au niveau mondial pour être efficace. Ce qui est aujourd’hui assez utopique. 

Selon vous, les sanctions face à l’évasion fiscale sont-elles suffisamment répressives pour en empêcher ou en dissuader ? 

L’efficacité des pénalités financières en cas d’évasion fiscale est difficile à évaluer. Mais on sait que les mesures d’amnistie, partielles ou totales, et les mesures de régularisation donnent de bons résultats. Une autre mesure efficace, en particulier pour les personnes publiques et les entreprises, consiste en ce que les anglais appellent le « name and shame », c’est-à-dire la dénonciation publique. Enfin, si c’était réalisable, il serait optimal d’établir un recensement mondial des capitaux — un véritable cadastre du capital. 

Le récent scandale sur les Panama Papers, relance le débat sur les lanceurs d’alerte. Pensez-vous qu’ils font actuellement l’objet d’une protection suffisante ?

Je ne pense pas que l’on puisse mettre dans le même panier les personnes qui alertent sur la dangerosité d’un médicament ou d’un pesticide, celles qui révèlent des secrets stratégiques ou militaires et celles qui dénoncent des fraudes fiscales. Parmi ces dernières, celles qui dénoncent les agissements frauduleux de leur propre employeur doivent évidemment être protégées et, au minimum, leur fournir une assistance juridique efficace lorsque leur employeur se retourne contre elles. 

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ? Ou le pire ?

Je me rappelle d’un professeur qui enseignait la macroéconomie en première année à Assas. Il arrivait à tenir — et à passionner — un amphithéâtre de 1 000 étudiants plein à craquer : du grand art pédagogique et oratoire ! Mes choix professionnels lui doivent beaucoup.

Quel est votre héros de fiction préféré ?

Cyrano, pour l’indépendance, la générosité et parce qu’il « n'abdique pas l'honneur d'être une cible. »

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

Ils sont difficiles à hiérarchiser car ils forment un tout. Mais l’actualité et le bafouement systématique de la Convention de Genève de 1951 me font amèrement regretter que l’on ait oublié que l’article 14 stipule que « Devant la persécution, toute personne a le droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres pays ».

 

Auteur :M. A.


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