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[ 18 décembre 2025 ] Imprimer

Un beau livre sur l’histoire des avocats !

L’Histoire des avocats de l’Antiquité à nos jours paru en novembre 2025 est magnifiquement illustré ! Son auteur, Pierre-Louis Boyer, maître de conférences en histoire du droit et des institutions, habilité à diriger des recherches en Droit, ancien doyen de la faculté de Droit, des sciences économiques et de gestion de l'Université du Mans et ancien avocat nous fait le grand plaisir de répondre à nos questions sur cette profession en constante mutation.

Pourquoi un livre sur l’histoire des avocats ?

L'idée initiale de ce livre vient du fait que les étudiants ne connaissent plus la profession d'avocat, notamment ceux qui s'apprêtent à intégrer un IEJ (pour préparer les concours), un CRFPA (une fois le concours du barreau réussi), voire même le barreau. Les avocats constatent que les jeunes générations avaient du mal à se familiariser avec la culture professionnelle — et donc avec l'histoire de la profession —, ce qui m'a conduit à rédiger cet ouvrage. Par ailleurs, il est aussi à destination des avocats eux-mêmes qui ont parfois mis de côté les racines historiques de leur profession et de leur déontologie, et cet ouvrage peut intéresser aussi les universitaires, les magistrats, les juristes et tous les curieux !

Les avocats ont-ils toujours assuré les mêmes missions juridiques depuis l’Antiquité ?

Non, les avocats ont assuré des missions sensiblement différentes entre les premiers défenseurs de l’Antiquité et ceux du xxie siècle. Toutefois, on constate qu’il y a un fondement commun à toutes les pratiques professionnelles observées au cours de l’histoire : la défense. Celle-ci est un élément essentiel de la profession d’avocat, car à travers le mandat de représentation que reçoit un avocat, l’avocat défend tant son client – ce que l’on a l’habitude de voir au quotidien – que la paix sociale. En effet, comme « auxiliaire de justice » (du latin auxilium : l’aide, le soutien), l’avocat a, de tout temps, participé à défendre les droits des justiciables et, conséquemment, a assuré une œuvre de justice dans la société. Pour souligner, cependant, les différentes missions des avocats, il suffit d’observer aujourd’hui les importantes différences entre les activités de conseil pratiquées en bureau et principalement dans le monde économique et des affaires, et les activités relatives au contentieux que l’on observe dans les juridictions.

Quels sont les fondements de la déontologie des avocats et leurs rapports avec les déontologies des autres professions juridiques ?

Il est difficile d’être exhaustif car les fondements déontologiques sont très nombreux, tout comme leurs rapports avec les autres professions juridiques. Les « principes » déontologiques contemporains contenus dans le serment que prêtent tous les avocats sont la dignité, la conscience, l’indépendance, la probité et l’humanité ; mais la déontologie ne se limite pas à ces principes du serment. En effet, d’autres sont consubstantiels de la profession, évoqués par ailleurs dans le Règlement intérieur national de la profession : honneur, loyauté, égalité et non-discrimination (ajoutés en 2019), confraternité, délicatesse, modération, courtoisie et, un qui est essentiel, le désintéressement. L’ensemble de ces principes doivent être suivis pas l’avocat dans sa conduite publique comme privée, en ce compris dans ses rapports avec les autres professions juridiques.

Quelles sont les figures pivots de l’histoire de la déontologie ?

Il y a tellement d’avocats célèbres qui ont contribué à défendre leur profession et sa déontologie qu’il serait difficile d’en dresser une liste complète, au risque par ailleurs d’en oublier involontairement. Henri Ader et André Damien, les auteurs du célèbre ouvrage de déontologie Règles de la profession d’avocat, sont des personnalités éminentes du monde du barreau des xxe et xxie siècles. Leur ouvrage, mis à jour régulièrement, est une « Bible déontologique » pour tous les avocats. Mais, en remontant dans le temps, on pourrait citer des juristes, avocats ou légistes, qui ont éclairé et précisé la déontologie des avocats, voire en ont été les parangons : à l’époque médiévale Philippe de Beaumanoir, Pierre de Fontaines et Yves de Kermartin (le « Saint Yves » patron des juristes), à l’époque moderne Claude de Ferrière, au xixe Chaix d’Est-Ange ou le célèbre Berryer, puis Sophie Balachowsky-Petit, première femme à avoir prêté serment.

Quels sont les points d’achoppement entre les pratiques déontologiques des avocats et l’usage de l’Intelligence artificielle ?

Quand l’on observe certains principes fondamentaux de la déontologie, comme la loyauté et l’honneur, par exemple, on comprend que l’avocat se doit d’être lui-même l’auteur de son propre travail, que cela soit vis-à-vis de son client, de ses confrères ou des magistrats. L’utilisation d’agents conversationnels à IA, qui semble se répandre de plus en plus dans les pratiques des juristes, est une première entrave au respect de ces principes par le fait que ce n’est pas l’avocat qui est acteur, mais l’IA. De plus, le risque de déshumanisation de la justice, pointé du doigt depuis quelques années maintenant par les acteurs du monde judiciaire, s’accroît fortement avec l’arrivée de l’IA dans les cabinets d’avocat. Enfin, on observe de plus en plus de phénomènes d’hallucinations (inventions de réponse par l’IA) dans les écritures juridiques, le fonctionnement statistique des chatbots les conduisant à créer textes législatifs et des jurisprudences inexistants. Les devoirs déontologiques de diligence et de compétence des avocats sont alors clairement mis à mal. 

Le questionnaire de Désiré Dalloz

Quel est votre meilleur souvenir d’étudiant ?

Les cours en amphithéâtre. C’est cette transmission vivante du savoir au service des étudiants qui m’a donné envie de devenir enseignant-chercheur.

Quels sont votre héros et votre héroïne de fiction préférés ?

Mon héros, Cyrano de Bergerac, parce que c’est un gascon, entier, bretteur et poète.

Mon héroïne, Amanda, de la pièce de théâtre Vous serez comme des dieux de Gustave Thibon, car elle cherche ce qui est naturel à l’homme.

Quel est votre droit de l’homme préféré ?

Le droit à la vie.

 

Auteur :MBC


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