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Le billet

[ 27 juin 2016 ] Imprimer

A propos du contrôle des comptes de l’Association française contre les myopathies (Téléthon)

Les associations ont la possibilité, pour financer leur objet associatif, de solliciter la générosité des particuliers voire des entreprises. Dans ce cadre, et sous réserve d’obtenir les autorisations nécessaires pour faire appel aux dons, les associations doivent pouvoir justifier de l’emploi fait de ces dons qui leur ont été accordés.

Cette obligation a été introduite par la loi n° 91-772 du 7 août 1991 suite au scandale de l’ARC (Association pour la recherche sur le cancer) au sein de laquelle de nombreux détournements de fonds avaient eu lieu, au profit notamment de son président.

Depuis, il revient à la Cour des comptes d’examiner les comptes de ces associations faisant appel public à la générosité, d’identifier les problématiques de financement et de fonctionnement et, le cas échéant, de formuler des recommandations (CJF, art. L. 111-8). 

C’est dans ce cadre que les comptes de l’Association française contre les myopathies (Téléthon) ont été examinés par la Cour des comptes (Rapport du 13 juin 2016) – pour la 4e fois depuis 1991 ( 1er contrôle en 1996, 2e en 2004 et 3e en 2007). L’AMF est ainsi l’association qui a été le plus souvent contrôlée par la Cour des comptes.

L’objectif est de s’assurer de la conformité des dépenses réalisées par cette association aux objectifs poursuivis par l’appel à la générosité du public. 

A défaut, le risque encouru est la suspension des avantages fiscaux liés aux dons. Il faut concevoir que ces associations présentent un avantage indéniable pour les donateurs : les dons consentis sont, partiellement, déductibles de l’impôt sur le revenu (voire de l’impôt de solidarité sur la fortune).

Cet avantage permet aux associations qui peuvent en faire bénéficier leurs donateurs, de capter une grande partie des dons consentis.

Or, si au terme de son contrôle, la Cour des comptes relève l’absence de conformité, elle peut préconiser la suspension de cet avantage fiscal. Il revient alors au ministre des finances d’en prendre la décision. 

Une décision financièrement préjudiciable à l’association lorsque l’on sait que 80 % des dons réalisés le sont au profit d’associations permettant au donateur de bénéficier de cet avantage.

Ce contrôle est vécu par les associations comme une véritable contrainte , la même impression que celle ressentie par un conducteur automobile, contrôlé par la police, amené à produire ses papiers, qui n’a rien à se reprocher mais qui demeure toutefois fébrile tout le temps que dure le contrôle.

C’est donc avec fébrilité que l’Association française contre les myopathies a pris connaissance du contenu du rapport de la Cour des comptes avec soulagement alors que la Cour des comptes a conclu à la conformité de la dépense aux objectifs poursuivis par l’appel à la générosité publique. 

Mais avec néanmoins une liste établie d’améliorations à apporter à son fonctionnement et à sa gouvernance – liste à laquelle l’association devra porter toute son attention car, bien évidemment, à l’occasion de son prochain contrôle, la Cour des comptes aura à cœur de vérifier que ses préconisations ont été suivies d’effets.

Ont ainsi et notamment été ciblés :

-l’amélioration de l’information adressée aux donateurs afin qu’ils puissent disposer tout à la fois des données concernant l’association en tant que telle mais également sur les organismes qui contribuent directement à ses missions, qu’elle contrôle et finance le plus souvent majoritairement (laboratoires) ; 

- la relative dégradation financière de l’association avec une baisse constatée du montant des dons révélant « la fragilité du mode de financement de l’association qui finance des structures pérennes de recherche et des programmes scientifiques pluriannuels grâce à une émission annuelle de télévision » (p. 20). A ce sujet, la Cour des comptes a toutefois pu souligner les actions entreprises par l’association pour développer ses ressources (p. 22) ;

- les contrôles internes de l’association « permettant de garantir la rigueur et l’efficacité des fonds qui lui sont confiés » pour lesquels la Cour des comptes regrette quelques insuffisances (p. 34) ;

-la problématique des conflits d’intérêt alors que d’anciens membres de l’association peuvent établir des liens commerciaux avec elle (également par le biais des laboratoires) (p. 36) ;

-le coût de l’appel aux dons avec notamment la charge supportée pour l’organisation du Téléthon et, dans le même temps, les progrès réalisés par l’association pour informer ses donateurs sur ses frais de collecte (p. 63 s.) ;

-l’identification de ses postes de dépenses (missions sociales et fonctionnement) avec le constat d’une baisse des dépenses réalisées au titre de ses missions sociales (p. 79 s.).

Indéniablement, la Cour des comptes contribue, dans le cadre de ces rapports, à orienter la gouvernance associative. La lecture de ce rapport dévoile l’incontestable influence qui peut être celle de la Cour des comptes (qu’elle se présente sous un aspect contraignant ou pas) sur la gouvernance de l’association, sur les décisions qu’elle est amenée à prendre. 

L’instant de fébrilité dépassé, l’association peut alors prendre appui sur cette analyse extérieure. Alors que les associations se trouvent confrontées, de plus en plus, à des difficultés de financement, les orientations données par la Cour des comptes, au-delà du simple cas de l’association contrôlée, dévoilent un tableau de bord associatif qu’il est alors possible de transposer, de valoriser par les dirigeants associatifs : un panorama des erreurs à ne pas commettre, des remèdes à apporter, un guide des bonnes pratiques, encore trop méconnu du monde associatif.

Car en effet, si les rapports de la Cour des comptes sont librement consultables sur son site internet, il faut concevoir que peu, sont les citoyens et à travers eux, les dirigeants associatifs, à en prendre connaissance.

Il revient pourtant à la Cour des comptes, ainsi que le prévoient les dispositions de l’article 47-2 de la Constitution de contribuer, par ses rapports publics, à l’information des citoyens…

 

 

 

 

 

 

Auteur :Stéphanie Damarey


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