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Le billet
Au lit, on dort !!!
Les élections régionales s’approchant lentement mais sûrement, la pêche aux électeurs est ouverte et, ceci expliquant cela, la boîte à idées sécuritaires l’est aussi.
Le spécialiste gouvernemental de la blague maghrébine, ministre de l’Intérieur de son état, a fort logiquement proposé une stimulante mesure, propre à rallier les suffrages de la France qui ne demande qu’à avoir peur, mesure qui « aurait le mérite de la simplicité [ça c’est vrai, ça !], de la lisibilité [car ce qui est simple s’énonce lisiblement] et de l’efficacité [ça se discute…] : qu’un jeune de moins de treize ans qui aurait déjà commis un acte de délinquance ait une interdiction de sortie nocturne s’il n’est pas accompagné d’un adulte ». Parce qu’il est contre toute forme de discrimination, le désopilant auvergnat a précisé que ce couvre-feu pour les petits glandeurs du soir vaudrait aussi pour les beurettes…, heu, pardon, pour les demoiselles, dont la part « aurait » crû de 10 % en un an dans les crimes et les délits commis par des mineurs, lesquels, tous sexes confondus, « représenteraient » 18 % de la délinquance. Si l’usage du conditionnel lorsqu’on cite de tels chiffres, inquiétants sinon effrayants, est concevable c’est parce qu’en la matière, les chiffres opportunément brandis par les uns et les autres ne convergent pas vraiment… À cet égard, on citera juste cette édifiante statistique livrée par un modeste directeur de recherche du CNRS, selon lequel le pourcentage de mineurs de moins de treize ans condamnés par la justice pénale représente… 0,3 % de l’ensemble des personnes frappées d’une sanction pénale en 2007. On comprend mieux alors l’extrême urgence à légiférer dans ce domaine…
Mais foin de vaines querelles politiciennes ! Ce qui importe, ce ne sont pas les chiffres, ce sont les êtres, précisément ces sales gosses qui viennent, quand le soleil est bas, terroriser nos villes et nos campagnes… Et à leur propos, deux questions demeurent aujourd’hui en suspens pour que la mesure proposée par Brice d’Auvergne ne soit pas un simple coup d’épée dans l’eau. D’une part, comment reconnaître ce mauvais blé en herbe quand il déambule dans les rues de nos paisibles cités et de nos riantes bourgades ? Comment savoir que ces mômes qui arpentent chemins et boulevards à la nuit tombée ont déjà commis une bêtise qualifiée « d’acte de délinquance » ? Sans être un chantre du tout répressif, la réponse nous semble simple : le hochet électronique constituerait très certainement un moyen parfaitement approprié pour distinguer les jeunes pousses innocentes des bandits en couches culottes. D’autre part, que faire des noctambules juvéniles surpris en train de divaguer à l’air libre quand leur cahier judiciaire devrait les contraindre à rester confinés dans le pavillon familial ? De nouveau, la réponse est simple : les priver de dessert, leur supprimer leur album de coloriage, leur interdire de revêtir leur panoplie de Zorro pendant deux mercredis et à l’extrême limite, car la CEDH veille, une petite fessée bien sentie ! Mais au fond qu’importe la peine infligée, pourvu que l’insécurité baisse puis cesse!
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