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Le billet

[ 15 juin 2020 ] Imprimer

Carnet du site : Nicole Belloubet, Garde des sceaux, n’a apparemment pas la grande tristesse de vous annoncer la disparition future de la Cour d’assises…

Ainsi que l’a annoncé, dans un grand quotidien du soir, Maître Denis Fayolle, avocat aux barreaux de Marseille et de Paris, très familier de la cour d’assises, la garde des Sceaux a entamé la chronique d’une mort annoncée du jury populaire, lequel sera remplacé par des cours criminelles lesquelles seront débarrassées de celui-ci dans le monde d’après. Ceci permettra que la justice rendue au nom du peuple français ne le soit plus par le peuple éponyme.

Les questions de l’existence et de la légitimité du jury populaire ne sont pas récentes. 

Dès l’époque de l’Athènes classique, le jury populaire était considéré comme un instrument essentiel de la démocratie. En France, la sinistre mémoire de la terreur et des tribunaux révolutionnaires ont, pendant un certain temps, constitué un obstacle à ce genre de jury. Sous la Révolution, le jury populaire fût institué en matière criminelle. Il reposait sur l’idée que, dans un système démocratique, ce type de jury est censé opportunément accorder au peuple un pouvoir de contrôle sur l’exercice de la justice. 

Au fond, le jury populaire était considéré comme l’expression de la souveraineté populaire dans l’univers de la justice et un comme un mode légitime de contrôle de l’exercice du pouvoir judiciaire. Il permettait, en effet, au peuple d’être placé au cœur du fonctionnement de la justice.

On peut craindre que, si l’on veut bien admettre que le jury populaire constitue une avancée dans une perspective démocratique, sa disparition annoncée en hauts lieux, emportera fatalement un recul de la démocratie. Éloigner ainsi le peuple de sa justice est évidemment l’expression d’un choix politique. Certes, éloigner ainsi le peuple de sa justice présenterait un intérêt : cela permettrait de soulager les juridictions de la surcharge d’affaires qu’elles supportent, en matière criminelle, en raison de la pandémie.

Reste qu’il ne semble pas impossible de penser que la disparition des cours d’assises et la suppression des jurys populaires qui en font la singularité, mettra à mal l’idée même de justice en matière criminelle et affaiblira notre démocratie. Rendue au nom du peuple français, il est souhaitable que la justice puisse encore l’être par le peuple éponyme.

 

 

 

Auteur :Denis Mazeaud


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