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Le billet
En attendant le Père Noël …
Dans ce contexte marqué par une forte contestation sociale et l’expression d’un sentiment d’insécurité(s), les fêtes de fin d’année peuvent offrir un cadre propice à la réflexion sur notre vision du rôle de citoyen dans cet espace étatique renouvelé dont les différents acteurs manipulent, opposent et superposent rationalité politique et rationalité instrumentale. Une belle occasion en somme pour rédiger notre souhait le plus cher et participer à la construction de l’année à venir ...
On oublie souvent que le mot « sécurité » est apparu dans les articles 22 et 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 pour exprimer une notion de sécurité « sociale » illustrant l’avènement des droits dits de deuxième génération, les droits économiques et sociaux. Ce n’est que plusieurs années plus tard, lors des débats sur la loi dite « sécurité liberté » (loi n° 81-82 du 2 févr. 1981 renforçant la sécurité et protégeant la liberté des personnes), en 1981, que le Garde des Sceaux invoqua la sécurité comme « la première des libertés » et donna alors au terme une connotation bien différente des rédacteurs du texte international : une sécurité plus « civile » visant à être toujours protégé d’une certaine délinquance (V. d’Henri Leclerc, « De la sûreté personnelle au droit à la sécurité », Journal du droit des jeunes, 2006/5, n° 255, p. 7-10). Depuis lors, la sécurité est devenue une parole clef du discours politique et elle a infiltré la sphère juridique au point de se confondre – à tort – avec la notion de sureté.
Ce bref tableau dressé, nous pouvons nous interroger sur le sens et l’objectif de la mobilisation citoyenne contre le projet de réforme des retraites. En effet, si la contestation ne vise qu’à faire reculer l’exécutif sur ce projet, le Président dispose d’une solution pour la résorber. Politiquement délicate, une décision de retrait ou de report sera toutefois aisée à mettre en œuvre. En revanche, si la contestation est née face au projet de réforme mais se durcit pour exprimer la méfiance et le rejet d’un nouveau monde aux zones floues qui semble remettre en cause des droits que l’on croyait pourtant acquis, la décision présidentielle sera bien plus complexe.
C’est ainsi que se noue le rapport avec la notion de sécurité pris dans sa plus simple définition, un « état d’esprit confiant et tranquille qui résulte du sentiment, bien ou mal fondé, que l’on est à l’abri de tout danger ». Les cortèges de ces derniers jours expriment justement tout l’inverse : une insécurité à large spectre, aussi bien sociale que civile, et même, une absence de sureté puisque l’arbitraire pourrait se manifester partout. Ce sentiment est d’autant plus inacceptable que l’élection du président Macron a été vue comme l’émergence d’un vent nouveau sur la politique, porteuse d’espoir et de restauration des équilibres et que désormais, l’horizon quant à une alternance politique est extrêmement bouché.
En conséquence, et quel que soit notre positionnement dans ce conflit social, le climat est propice pour se demander quelles sont nos attentes vis-à-vis de l’État mais aussi quel rôle nous pouvons investir en notre qualité de citoyen et comment le jouer. Ce cheminement nous amènera à identifier ce que nous sommes prêts à perdre ou conserver ainsi que les valeurs que nous ne voulons pas renier. A défaut de résoudre tous les conflits du moment, cette introspection nous rendra plus clairvoyant, ce qui est tout de même un magnifique cadeau de fin d’année !
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