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Le billet

[ 24 novembre 2010 ] Imprimer

Faut-il tirer sur les lampistes ?

Haro sur le parquet de Paris dans la presse et sur la toile en raison d’une décision de classement sans suite par laquelle il renvoie dans les cordes une association qui lutte contre la corruption ! En chœur, un des plus éminents constitutionnalistes français et le prince de la toile juridique dénoncent avec la dernière énergie la décision de ces magistrats, dont on sait désormais qu’ils ne sont pas des juges…

De quoi s’agissait-il ? Des sondages avaient été commandés pour les besoins de notre président de la République par son directeur de cabinet à une société dirigée par… un autre de ses conseillers… Autant dire que cela sentait un peu fort le conflit d’intérêt et le délit de favoritisme, sans compter que la somme perçue par ce conseiller occulte était plus que rondelette.

Pourquoi le parquet n’a-t-il pas jugé utile de donner suite à la démarche de l’association Anticor qui dénonçait la turpitude élyzéenne et considérer qu’il ne fallait pas chercher de poux dans la tête du directeur de cabinet qui avait conclu ce marché ? Parce que, selon les magistrats parisiens, l’immunité pénale dont bénéficie le président de la République doit être étendue « aux actes effectués au nom de la présidence de la République par ses collaborateurs ». D’où les protestations du professeur Beaud et de maître Eolas qui, fort justement, dénoncent le tour de passe auquel s’est livré le parquet pour créer une nouvelle et improbable catégorie d’intouchables… En effet, rien dans les textes n’autorise à faire bénéficier les conseillers du prince de l’irresponsabilité pénale qui lui a été accordée, afin de protéger la fonction présidentielle, de telle sorte qu’à son égard le glaive de la justice n’a même pas les apparences d’un sabre de bois. Au fond, la raison d’être de cette immunité, par nature exceptionnelle, exclut qu’elle puisse profiter à d’autres que le prince lui-même.

Peut-être est-il quand même permis d’exprimer un demi-bémol à l’opinion, pourtant juridiquement incontestable, évoquée ci-dessus. Serait-il juste, en effet, que la responsabilité à laquelle échappe le prince, en raison de sa haute fonction, puisse peser sur ses conseillers alors même que ceux-ci n’ont fait qu’obéir à son bon plaisir ? Ne serait-il pas immoral que l’on tire à vue sur les lampistes pour un fait délictueux commis pour le compte de leur prince qui en a tiré seul profit ?  

 

Auteur :D. M.


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