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Le billet

[ 3 mai 2011 ] Imprimer

La FFF lave plus blanc !

Oh non, « dites moi pas que c’est pas vrai ! » comme dirait l’autre, on nous aurait donc menti en 1998 ??? On nous avait pourtant tellement bien fait croire à la victoire de la France « Arc-en-ciel », au football comme reflet du pays réel, ferment de l’intégration social, modèle des vertus d’une société métissée et égalitaire…

On nous avait fait rêver avec cette équipe multicolore avec ses grands Blacks (Desailly, le roc ; Karembeu, le kanak qui chantait pas la Marseillaise ; Thuram qui chantait faux la Marseillaise), ses petits Blancs (Barthez le divin chauve ; Blanc le Président ; Dugarry, l’ami du chef, Petit, le gentil viking) et son Beur entre tous les Beurs, l’icône, l’intouchable, Zizou, période ante coup de boule, avec sa tronche d’ange irradiant l’Arc de triomphe le soir de la victoire contre les génies brésiliens. L’union des couleurs fait la force du foot français, nous avait-on dit pieusement, et c’est grâce à cette équipe black-blanc-beur que la France était entrée dans la légende du foot. Embrassons-nous folle ville !

Et puis, patatras… Voilà que le site Mediapart publie le verbatim d’une réunion qui a regroupé, il y a quelques mois, les principaux cadres techniques du foot français, notamment le directeur technique national et les entraîneurs des différentes équipes de France. Ces messieurs du foot national envisagent, lors de celle-ci, de mettre en place un système de discrimination dont seraient l’objet les joueurs de couleur. En effet, ces hauts responsables s’inquiètent, lors de cette discussion à bâtons rompus et qui devait rester off, de la proportion des jeunes joueurs ayant la double nationalité, qui sont entraînés dans les principaux pôles de formation français et qui optent ensuite, les ingrats, pour une autre sélection que l’équipe de France. Et ces messieurs ne parlent pas en l’air puisqu’ils ont entre les mains un audit sur le nombre de joueurs binationaux qui ont bénéficié du système de formation made in France et qui ont, par la suite (les félons), intégré d’autres sélections nationales. « Ça ne te choque pas que l’Institut national du football ait sorti 4 internationaux français et 26 internationaux étrangers ? » demande un des participants à un autre qui s’inquiète de la discrimination qui irrigue le projet discuté. « J’y suis tout à fait favorable » (au projet en question) affirme le sélectionneur actuel de l’équipe de France, Laurent Blanc… Soyons clairs, il ne s’agit pas de mettre en place des mesures discriminatoires pour limiter le nombre des joueurs blacks ou beurs sur les terrains de foot français ou en équipe de France. Il s’agit, de façon beaucoup plus pragmatique et franchouillarde, de faire en sorte que nos centres d’élevage footballistiques n’accueillent pas trop de jeunes joueurs qui risquent de déserter ensuite et de faire perdre ses précieux investissements à la Fédération française de football, au profit d’autres sélections parasites.

Une fois la stratégie discriminatoire projetée dévoilée, c’est évidemment panique à bord… On débarque sans ménagement le lampiste rêvé puisqu’il s’agit du directeur technique, ce qui évite de s’en prendre trop frontalement au charismatique sélectionneur national… La défense de celui-ci s’organise rapidement. On ne l’a pas compris, ses propos ont été sortis de leur contexte, déformés, etc. Le journal L’Équipe vole à son secours. Certes Laurent Blanc a répété à plusieurs reprises, lors de la réunion, « Grands costauds, puissants. Qu’est-ce qu’il y a actuellement comme grands, costauds, puissants ? Les Blacks ». Sortie de son contexte, la phrase inviterait au malaise. Pourtant Blanc cherche plutôt à ouvrir les horizons, à ne pas faire preuve d’une autre discrimination, celle qui consiste à fermer les portes aux gamins doués mais jugés trop petits, trop maigres ou pas assez rapides. Ah le saint homme !!! Ouf, on a eu peur… Rendez-vous compte, l’image d’un des héros de 1998 a failli être écornée par quelques journaleux en quête de scandale. Comme si on pouvait reprocher à qui que ce soit d’affirmer que les Noirs courent plus vite, sont plus grands et sont plus forts physiquement que les Blancs… Non, mais sans blague, qui pourrait nier que la couleur de la peau détermine les capacités d’une personne ??? Capacités physiques seulement, naturellement, parce que si on pensait aussi aux capacités intellectuelles, alors là ce serait du racisme, naturellement… « Dites moi pas que c’est pas vrai !!! »…

Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître, mais moi j’ai aimé le foot parce que, jadis, en équipe de France, il y avait deux Blacks fantastiques, Marius Trésor et Jean-Pierre Adams. On les appelait « la garde noire ». C’étaient mes idoles, c’était avant-hier. Aujourd’hui, j’ai honte.

 

Auteur :Denis Mazeaud


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