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La proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant
La famille est de retour au Parlement. Le gouvernement, échaudé par les débats interminables relatifs au mariage pour tous, avait fait le choix de reporter, aux calendes grecques, le « projet de loi famille ». Il faut dire que l’éventuelle ouverture de la procréation médicalement assistée aux femmes célibataires et/ou aux femmes mariées risquait de relancer la bataille et de monopoliser les énergies.
Reste que, dans ce projet de loi, ne figurait pas uniquement la PMA. Des députés Europe Écologie-Les verts, ainsi que des parlementaires socialistes, viennent ainsi de déposer une proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant. Dans cette proposition, étudiée en commission des lois le 6 mai dernier, point de PMA.
Les dispositions de ce texte concernent essentiellement l’autorité parentale. Les députés entendent ainsi tenir compte d’une part, de la multiplication des divorces et, plus généralement, des séparations des parents. Plusieurs pères ont en effet attiré l’attention du public, de manière spectaculaire, sur les difficultés qu’il peut y avoir à maintenir un lien avec les enfants en cas de séparation.
D’autre part, la proposition de loi entend, si ce n’est donner un statut légal aux beaux-parents, au moins préciser les conditions dans lesquelles ils peuvent accomplir des actes relatifs à leurs « beaux-enfants ».
Sur ces deux points, il y aurait beaucoup à dire.
S’agissant de l’autorité parentale, les députés souhaitent lui donner un contenu plus concret et préciser son fonctionnement en cas de séparation des parents. Afin de tenter de pacifier les situations, la proposition de loi entend notamment supprimer l’option entre résidence alternée et résidence au domicile d’un des parents. La résidence sera, en l’état de la proposition, fixée automatiquement au domicile de chacun des parents. Autrement dit, la résidence sera en principe alternée, les modalités pratiques devant être déterminées par les parents, d’un commun accord, ou par le juge à défaut. La résidence au domicile de l’un des parents ne pourra donc plus se faire qu’à « titre exceptionnel ».
Le changement se veut symbolique : il ne faut pas qu’un des parents ait l’impression d’avoir perdu. Mais il a également des conséquences juridiques. Actuellement, la jurisprudence décide que « la responsabilité de plein droit prévue par le quatrième alinéa [de l’article 1384 du Code civil] incombe au seul parent chez lequel la résidence habituelle de l'enfant a été fixée, quand bien même l'autre parent, bénéficiaire d'un droit de visite et d'hébergement, exercerait conjointement l'autorité parentale. » (Crim. 6 nov. 2012). Ainsi, le parent qui aura ses enfants le week-end, non plus au titre d’un droit de visite et d’hébergement, mais au titre du nouveau principe de « résidence en commun », sera responsable de plein droit du fait dommageable de son enfant.
S’agissant des beaux-parents, les députés « avancent à pas comptés ». Ce faisant, ils vont tout de même trop loin pour les tenants de la « manif pour tous », en intégrant un tiers dans la relation parents-enfant, qui se devrait d’être exclusive. Au contraire, pour les associations de beaux-parents, en se contentant de donner un cadre légal à des actes déjà accomplis en fait, la proposition n’aurait pas grand intérêt.
La proposition entend ainsi créer un nouveau type de contrat : « le mandat d’éducation quotidienne ». Ce contrat de mandat sera passé, par un parent, avec son concubin, partenaire ou conjoint avec lequel il réside de façon stable, mais avec l’accord de l’autre parent.
Ce contrat de mandat permettra au beau-parent concerné d’accomplir les actes usuels de l’autorité parentale.
Toutefois, ce contrat est limité « à la durée de la vie commune » ; il ne confère donc aucun droit au-delà de la séparation, même de fait, et il est révocable ad nutum par le mandant. Le mandat pourra-t-il être révoqué par l’autre parent, par retrait de son autorisation ? Le texte, dans sa version actuelle, ne le précise pas. Mais la concorde entre les différents adultes qui participent à la vie de l’enfant semble être une condition sine qua non de ce contrat de mandat.
Où l’on voit que les dispositions du texte ne visent que les situations non conflictuelles, qui ne sont pas celles qui posent véritablement problème en pratique…
Le lien entre l’enfant et le beau-parent, tel qu’envisagé par la proposition, est donc purement contractuel. Trop peu, ou pas assez, cette proposition marque, quoi qu’il en soit, une nouvelle étape de la contractualisation du droit de la famille....
Références
■ Dossier législatif : www.assemblee-nationale.fr/14/dossiers/autorite_parentale_interet_enfant.asp
■ Crim. 6 nov. 2012, n° 11-86.857, RTD civ. 2013. 106, obs. J. Hauser ; AJ fam. 2012. 613, obs. Fr. Chénedé.
« On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde.
Toutefois, celui qui détient, à un titre quelconque, tout ou partie de l'immeuble ou des biens mobiliers dans lesquels un incendie a pris naissance ne sera responsable, vis-à-vis des tiers, des dommages causés par cet incendie que s'il est prouvé qu'il doit être attribué à sa faute ou à la faute des personnes dont il est responsable.
Cette disposition ne s'applique pas aux rapports entre propriétaires et locataires, qui demeurent régis par les articles 1733 et 1734 du code civil.
Le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux.
Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés ;
Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et apprentis pendant le temps qu'ils sont sous leur surveillance.
La responsabilité ci-dessus a lieu, à moins que les père et mère et les artisans ne prouvent qu'ils n'ont pu empêcher le fait qui donne lieu à cette responsabilité.
En ce qui concerne les instituteurs, les fautes, imprudences ou négligences invoquées contre eux comme ayant causé le fait dommageable, devront être prouvées, conformément au droit commun, par le demandeur, à l'instance. »
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