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L’acte d’avocat : un nouveau garant de la sécurité juridique des particuliers et des entreprises ?
Le contreseing de l’avocat ou acte d’avocat est la disposition phare qu’il faut retenir de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées (JO 29 mars 2011).
Issu du rapport Darrois, ce nouveau mécanisme vise à apporter une sécurité juridique aux particuliers et professionnels dans les actes de la vie courante passés sous seing privé et qui ne nécessitent pas l’intervention obligatoire d’un professionnel du droit (signature d’un bail, prêts, etc.). Les conséquences en étaient principalement l’absence de compréhension par les signataires de toute l’étendue de leur engagement (malgré tous les impératifs de mentions manuscrites exigées parfois par la loi ayant pour vocation la prise de conscience du signataire sur le contenu de l’acte) et … de multiples contestations ultérieures (v. jurisprudence sous l’art. 1322 C. civ. Dalloz).
En raison de ses compétences et du devoir de déontologie qui pèse sur lui, l’avocat devrait donc ainsi devenir le professionnel du droit le plus proche du concitoyen : son conseil. Cette proximité va se traduire par le fait que l’avocat, en apposant sa signature à l’acte sous seing privé, va attester « avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte » (art. 66-3-1), les parties étant de ce fait, sauf dispositions contraires, dispensées « de toute mention manuscrite exigée par la loi » (art. 66-3-3).
Aussi, du point de vue de la force probante, l’acte d’avocat se placerait dans la hiérarchie entre l’acte sous seing privé « simple » et l’acte notarié : il fait « pleine foi de l’écriture et de la signature » des parties. Ainsi une partie ne pourra plus désavouer son écriture ou sa signature aussi facilement puisque l’avocat aura préalablement procédé aux vérifications qui se doivent, sauf à engager une procédure de faux en écriture privée (art. 66-3-2 in fine ; art. 299 C. pr. civ.).
Petit bémol toutefois sur l’importance à donner à la force probante de ce nouvel acte : comme le souligne Félix Rome, « Qu’il soit constaté par acte authentique, par acte SSP contresigné par avocat, ou par simple acte SSP, un contrat peut toujours être contesté quant à sa validité, sauf à confondre acte instrumentaire et acte juridique » (v. aussi le point de vue de C. Jamin).
Devons-nous alors nous réjouir de la naissance de ce nouvel instrument comme un réel garant de la sécurité juridique de l’usager ? Pouvons-nous prédire de son succès auprès du grand public ? Le particulier va-t-il franchir plus souvent la porte d’un cabinet d’avocat pour signer le moindre acte ? Quel prix sera-t-il prêt à payer pour un acte qui peut toujours se conclure sans les services d’un professionnel du droit ? Le conseil éclairé précontractuel n’excluant pas les risques de contentieux notamment quant à la validité de l’acte et ses suites, le particulier aura-t-il le réflexe de l’anticipation ou attendra-t-il l’arrivée concrète des ennuis pour recourir à un avocat ? De patience il faudra faire preuve avant que la pratique réponde à toutes ces interrogations…
Références
■ F. Rome, « L’acte sous seing privé nouveau est arrivé : so what ? », D. 2011. 937.
■ C. Jamin, « L’acte d’avocat », D. 2011. 960.
■ Loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques modifiées par la loi du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées
« Chapitre Ier bis : Le contreseing de l'avocat
Article 66-3-1, créé par Loi n°2011-331 du 28 mars 2011 - art. 3
En contresignant un acte sous seing privé, l'avocat atteste avoir éclairé pleinement la ou les parties qu'il conseille sur les conséquences juridiques de cet acte.
Article 66-3-2, créé par Loi n°2011-331 du 28 mars 2011 - art. 3
L'acte sous seing privé contresigné par les avocats de chacune des parties ou par l'avocat de toutes les parties fait pleine foi de l'écriture et de la signature de celles-ci tant à leur égard qu'à celui de leurs héritiers ou ayants cause. La procédure de faux prévue par le code de procédure civile lui est applicable.
Article 66-3-3, créé par Loi n°2011-331 du 28 mars 2011 - art. 3
L'acte sous seing privé contresigné par avocat est, sauf disposition dérogeant expressément au présent article, dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi. »
« L'acte sous seing privé, reconnu par celui auquel on l'oppose, ou légalement tenu pour reconnu, a, entre ceux qui l'ont souscrit et entre leurs héritiers et ayants cause, la même foi que l'acte authentique. »
■ Code civil Dalloz 2011 sur www.dalloz-bibliotheque.fr.
■ Article 299 du Code de procédure civile
« Si un écrit sous seing privé produit en cours d'instance est argué faux, il est procédé à l'examen de l'écrit litigieux comme il est dit aux articles 287 à 295. »
« Écrit établi par un officier public (notaire par ex.), sur support papier ou électronique, et dont les affirmations font foi jusqu’à inscription de faux et dont les grosses, revêtues de la formule exécutoire, sont susceptibles d’exécution forcée. »
« Acte écrit, généralement instrumentaire, plus rarement nécessaire à l’existence de la situation juridique, rédigé par un particulier et comportant la signature des parties. »
« Procédure principale ou incidente dirigée contre un acte authentique pour montrer qu’il a été altéré, modifié, complété par de fausses indications, ou même fabriqué. Une procédure analogue peut être utilisée à titre principal ou incident contre un acte sous seing privé ayant déjà été l’objet d’une vérification d’écriture si la partie soutient que l’acte a été matériellement altéré ou falsifié depuis sa vérification. »
Lexique des termes juridiques 2011, 18e éd., Dalloz, 2010.
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