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Le billet
Le droit et l’apprentissage, un mariage réussi, préservons-le
Cette année universitaire a su une nouvelle fois mettre en évidence les bénéfices de l’alternance pour mes étudiants en droit. Certes fatigués par le rythme, ils ont gagné en sérénité, en confiance et ils sont devenus des membres à part en entière des services dans lesquels ils travaillent : collectivités territoriales, ministères, société d’économie mixte.
Pendant très longtemps, la proposition de formations par apprentissage a été marginale au sein des facultés de droit. Au cours des dernières années, sous l’impulsion de collègues, l’offre s’est étoffée tant en droit privé qu’en droit public, toutes les spécialisations étant visées : le droit social, le droit des affaires, le droit bancaire, le droit de l’immobilier, le droit de la santé, le droit des collectivités territoriales, le droit du contentieux public. L’existence de ces parcours est sans doute incomplètement appréhendée par les pouvoirs publics, ce qui ne favorise pas la stabilité de leurs financements et leur ancrage dans l’offre de formation.
Les formations juridiques par apprentissage au sein des universités constituent à la fois une réelle opportunité pour les étudiants et un facteur de réussite et d’épanouissement indéniable qui mériterait davantage de stabilité au niveau des acteurs publics. Cette perception s’appuie sur mon expérience depuis plusieurs années, puisque j’ai eu la chance de diriger un master 2 de droit public, d’accompagner le développement d’autres parcours et de bénéficier du partage d’expériences avec les autres facultés de droit.
Les motivations amenant l’ouverture de parcours en apprentissage sont celles tout d’abord de répondre à des besoins du territoire pour accompagner les réformes juridiques et le développement local. Ensuite, il s’agit de mieux guider les étudiants dans le passage de l’insertion professionnelle, en les amenant à prendre conscience de leurs capacités et de leurs compétences, tout en conservant leur humilité et leur curiosité. L’année universitaire aboutit souvent au recrutement de l’apprenti dans la structure pour la satisfaction de tous. Le nouveau collaborateur a pu faire ses preuves, s’insérer progressivement dans une équipe et assimiler le fonctionnement et les objectifs de la structure d’accueil, ce qui garantit une collaboration fructueuse. Cette réussite est possible grâce à l’investissement des tuteurs professionnels, qui ont envie de transmettre leur savoir et donnent une magnifique image du monde professionnel.
Ces atouts ne masquent pas des fragilités qui sont principalement :
■ l’absence de stabilité dans les montants de financement des contrats d’apprentissage pour les universités. Les montants versés aux universités, par l’intermédiaire des CFA, sont réévalués chaque année par France compétences avec une volonté de les réduire pour mieux contrôler les dépenses de l’État. Or les formations sont créées pour plusieurs années à partir de choix pédagogiques concertés, en plus de contraintes législatives et réglementaires. Leur contenu ne peut être systématiquement modifié, sans évaluation sur la qualité de la formation, afin de prendre en compte le nouvel équilibre financier ;
■ le modèle de financement des contrats dans les établissements publics et les collectivités territoriales reste perfectible n’ayant pas été envisagé par la loi « Pour la liberté de choisir son avenir professionnel » du 5 septembre 2018. Tardivement une solution avait été trouvée pour un cofinancement concernant les collectivités territoriales avec le CNFPT, tout en ignorant le secteur hospitalier. Ce modèle a été remis en cause pour l’année 2024-2025, en limitant les cofinancements des contrats et en les priorisant sur des secteurs autres que le droit. Certaines collectivités territoriales se désengagent déjà.
C’est ainsi que la pérennité des formations existantes n’est plus interrogée, l’équilibre économique n’étant pas assuré, sachant que les coûts à la charge des universités sont constamment en augmentation. Or ces formations sont bénéfiques pour l’État, les étudiants ainsi formés apportent des connaissances actualisées, participent à renforcer la sécurité juridique des actions publiques, là où les équipes étaient incomplètes. Ce sont autant de moyens de prévenir les contentieux, évitant la surcharge d’autres services de l’État. Sans un financement pérenne, le cercle vertueux ne pourra se poursuivre.
■ Enfin il est décevant que l’État ne valorise pas mieux et différemment les formations en apprentissage opérées dans les universités. Ces dernières se distinguent par leur attachement au service public, par la qualité des formations portées par des enseignants-chercheurs reconnus, par un réel accompagnement des étudiants, par la proposition de contrats d’apprentissage pertinents, tout en se soumettant à des évaluations par des autorités publiques indépendantes afin de répondre efficacement aux politiques publiques de l’État. Les universités ne sont pas et ne seront pas des organismes de placement, la réussite de l’étudiant est cœur de leurs préoccupations.
Dès lors, un soutien plus constant et stable serait bénéfique pour chacun, à commencer par nos étudiants qui sont des acteurs essentiels du maintien de l’État de droit et de l’application des lois.
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