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Le billet
Les étrangers en centre de rétention sont un « marché »
Évidemment le titre de ce billet est un peu racoleur pour rendre compte de la décision récente du Conseil d'État relativement au marché public de l'assistance administrative et juridique aux étrangers dans les centres de rétention. Des questions relatives au droit des marchés publics, on ne dira rien ici, renvoyant aux spécialistes de la matière de nous éclairer sur les subtiles avancées que contient cet arrêt.
Mais il faut ici constater plus fondamentalement que le Conseil d'État a validé implicitement mais nécessairement que le conseil aux étrangers sans papiers est bien une prestation de service « sur le marché », et qui par suite doit faire l'objet d'un marché public. Ainsi, cette aide apportée aux étrangers qui s'inscrivait dans un cadre humanitaire devient aujourd'hui une prestation comme une autre. Cela est tout à fait caractéristique de la marchandisation croissante des relations sociales à notre époque contemporaine, tendance avec laquelle on peut ne pas se sentir tout à fait à l'aise.
Cela d'autant plus que le Conseil d'État dans d'autres hypothèses a su faire preuve de moins de rigueur dans la qualification. Ainsi s'agissant de la mission d'appui aux partenariats publics privés chargée de conseiller les collectivités locales sur le recours au contrat de partenariat, il a jugé que ce conseil juridique n'était pas une prestation de services sur le marché. De même que dans le domaine culturel il a clairement affirmé que les associations qui géraient des festivals n'avaient pas à être mises en concurrence.
Troublantes contradictions qui en disent long sur la manière dont notre droit hiérarchise ses objets : aux missions nobles de l'État et des collectivités locales, une marge de manœuvre et une certaine indulgence pour qu'elles ne tombent pas sous la coupe du marché. Aux étrangers sans papiers le régime général des prestations de services, au même titre que la restauration collective ou le lavage de carreaux.
Référence
■ CE 16 nov. 2009, Ministère de l'immigration c. Association Collectif Repect, n° 328826.
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