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Le billet
L’Europe contractuelle à marche forcée ?
Dans un des derniers numéros de la Gazette du Palais, une « brève » avec un titre qui attire l’attention de tous les amateurs de droit des contrats : « Droit européen des contrats : un texte à l’automne 2011 ». Ce qui interpelle, avec cette annonce, ce n’est pas la énième tentation d’européanisation contractuelle ; aucun scoop, en effet, sur ce point, puisque depuis le début du XXIe siècle, plusieurs groupes d’universitaires européens ont déjà entrepris, officieusement ou officiellement, d’harmoniser les droits des contrats des 27 pays membres de l’Union européenne.
Le moins que l’on puisse dire c’est que cette initiative n’a pas toujours suscité l’enthousiasme général… Dans la communauté juridique française, notamment, des voix très fortes et très écoutées se sont fait entendre pour dire, (que dis-je, pour « hurler »), tout le mal qu’elles pensaient de ce projet que ce soit sous l’angle institutionnel, politique, économique ou culturel. En somme les réticences et les résistances doctrinales étaient telles qu’on avait quand même un peu le sentiment que l’Europe contractuelle avait du plomb dans l’aile.
Et puis, près de 10 ans après une première consultation lancée par la commission européenne, celle-ci a récidivé en 2010 en organisant un nouveau sondage à grande échelle sur la création d’un instrument de droit européen du contrat.
Cette nouvelle initiative suscite plusieurs observations, étant entendu que celui qui tient la plume n’est pas hostile, loin s’en faut, à l’idée même d’une harmonisation européenne du droit des contrats.
D’abord, en ce qui concerne la méthode utilisée par la commission, elle laisse quelque peu perplexe. En effet, la commission a une nouvelle fois sacrifié à la mode de la démocratie participative pour sonder les reins et les cœurs des juristes européens. Disons le tout net, la méthode n’est guère enthousiasmante. On a en réalité le sentiment que les jeux sont déjà faits et que la commission essaie de donner le change en organisant une pseudo-consultation, les réponses expédiées de tous les coins de la vieille Europe étant promises à un intérêt assez peu soutenu…
Ensuite, quant au délai annoncé, on nous annonce un texte pour… l’automne prochain. Autrement dit, en 9 mois, la commission entend :
- lire les 181 réponses qui lui ont été envoyées ;
- décider quelle sera, parmi les options offertes, l’option choisie quant au domaine du futur instrument ;
- concocter la substance de l’instrument en question…
Certes, l’entreprise ne date pas d’hier et de nombreux travaux ont déjà été réalisés mais quand même, neuf mois pour une entreprise aussi monumentale tant sur le plan juridique que politique, c’est quand même un peu bref, non ? On risque de donner des armes à ceux qui sont résolument hostiles à ce projet et qui auront beau jeu de reprocher à la commission de confondre vitesse et précipitation.
Enfin, pour finir sur une note optimiste, on relèvera que, cette fois-ci, les juristes français se sont mobilisés et ont envoyé moult bafouilles extrêmement argumentées à la commission afin de faire connaître leurs opinions sur la future Europe du contrat. Et, constater que la plupart des juristes français n’ont pas succombé à la tentation de la chaise vide constitue une vraie bonne nouvelle, enfin !
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