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Le billet
L’examen d’entrée au CRFPA
Il y a des légendes urbaines qui ont la vie dure. Récemment, la rumeur selon laquelle l’examen d’entrée au CRFPA serait, en réalité, un concours caché a refait surface, à l’occasion de quelques tweets regrettables.
L’objet de ce billet n’est pas de disserter sur la plus ou moins grande difficulté de cet examen, qualifié comme tel par l’article 51 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat.
Disons d’emblée qu’il s’agit d’un examen exigeant. Pour l’obtenir, les candidats doivent avoir de solides connaissances et une bonne maîtrise de la méthodologie, aussi bien du cas pratique que de la note de synthèse. Contrairement à ce que certains « influenceurs » affirment, il ne suffit donc pas d’avoir un master 1, demain sans doute un master 2, pour avoir les connaissances nécessaires à la réussite de cet examen. Un travail spécifique de préparation doit être fourni, ne serait-ce que pour actualiser ses connaissances, sans qu’il soit nécessaire, tant s’en faut, de passer par une préparation privée. Les Instituts d’Études Judiciaires fournissent, à des tarifs raisonnables, les outils nécessaires à la réussite. Quant à la motivation, chacun peut la puiser au fond de soi : nul besoin d’un « coach de vie » pour cela…
Dire que l’entrée au CRFPA se fait par un examen, et non un concours, ce n’est ni dévaloriser les candidats qui l’ont réussi, ni jeter l’opprobre sur ceux qui ne l’ont pas eu. Ce n’est pas non plus théoriser une prétendue supériorité des magistrats, dont la fonction est accessible par concours, sur les avocats. C’est simplement rétablir la vérité des faits, attestée par tous les enseignants et avocats qui ont participé activement à la préparation de cet examen et/ou aux délibérations du jury : un étudiant qui obtiendra au moins 10/20 à l’issue des épreuves (admissibilité et admission) recevra le précieux sésame.
Jamais les notes ne sont baissées au motif qu’il y aurait trop d’admis. Jamais.
Ceux qui sont persuadés, contre l’évidence que la profession d’avocat veillerait à limiter le nombre de nouveaux entrants, s’appuient parfois sur le nombre d’admis qui varierait trop peu d’une année sur l’autre. Pourtant, ces variations existent, souvent en raison de la difficulté de l’épreuve de droit des obligations d’ailleurs. Le sujet a-t-il dérouté les candidats ? Le nombre d’admis baissera. Le sujet était-il plus facile, le nombre d’admis augmentera.
Pourquoi les variations ne sont-elles pas plus importantes ?
Essentiellement pour deux raisons :
La première est que la commission nationale veille à maintenir une certaine constance dans la difficulté des exercices proposés. Le succès est certes relatif. Reste qu’il est difficile de varier le contenu des cas pratiques, sans que la difficulté de l’exercice ne s’en ressente.
La seconde est que, si les notes ne sont jamais baissées, elles sont parfois remontées ! Ce n’est absolument pas une spécificité de l’examen du CRFPA. C’est le droit souverain de tout jury d’examen de décider de remonter, ou non, les notes des étudiants qui sont arrivés, par exemple, juste sous la moyenne après les épreuves d’admissibilité ou d’admission. Tous ceux qui ont eu à corriger une copie savent que l’exercice est difficile, même lorsqu’une grille de correction objective la notation. Il faut avoir une confiance démesurée dans ses capacités d’évaluation pour être absolument certain de sa notation au demi-point ou au point près. Dès lors, lorsque les candidats sont dans la marge d’erreur, ils peuvent être remontés
Ce pouvoir souverain des jurys sert ainsi, en quelque sorte, à l’échelle nationale d’amortisseur. Si un ou des sujets ont été particulièrement difficiles, les jurys pourront se montrer plus magnanimes. Au contraire, face à des sujets classiques, qui ne présentaient pas d’aspérité particulière, ils seront alors économes des points dits « jurys » (qui n’apparaissent pas au CRFPA).
Là est sans doute la raison des oscillations relatives, mais réelles, du nombre d’admis d’une année sur l’autre.
Par ailleurs, certains se sont émus que l’article 10 de l’arrêté du 17 octobre 2016 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats énonce qu’« après avoir comparé les moyennes obtenues par les candidats et les prévisions de réussite avec celles des autres centres d'examen organisant l'accès au même centre régional de formation professionnelle d'avocats, le jury arrête le 1er décembre de l'année de l'examen ou le premier jour ouvrable suivant la liste des candidats déclarés admis ».
La phrase surlignée n’a pas vocation à dissimuler l’existence d’un numerus clausus, mais à maintenir l’égalité des candidats. L’idée est que les différents jurys se consultent afin d’adopter des positions, sinon identiques, au moins harmonisées à l’échelle d’un même centre régional. Certes, les différences de taux de réussite existent encore, moins que certains le disent toutefois. Elles devraient, lorsqu’elles se reproduisent d’année en année sur un même IEJ, entraîner une réaction de la commission ou du CNB.
Quoi qu’il en soit, comme de nombreux enseignants-chercheurs, le présent signataire peut attester qu’il n’a jamais subi aucune pression, en tant que membre ou président du jury d’admission, des instances locales ou nationales pour ouvrir ou, au contraire, « fermer les vannes » de la profession.
L’examen d’entrée dans un CRFPA est sans doute imparfait ; il s’agit toutefois d’un examen.
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