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Le billet
Un éternel recommencement
La question migratoire est une nouvelle fois sur le devant de la scène médiatique européenne. Cette question est en réalité récurrente et ne semble pas pouvoir trouver de solutions.
Il suffit de reprendre, d’une part, le travail législatif opéré ces dernières années, d’autre part, les différentes crises liées à l’arrivée de nombreux migrants qui traduisent le caractère permanent du sujet. Concernant le cadre législatif, le 4 mai 2016, la Commission européenne déposait, une première fois, un ensemble de propositions visant à réformer le régime d'asile européen commun. Cette proposition n’aboutissant pas, la Commission a présenté, le 23 septembre 2020, un nouveau pacte sur la migration et l'asile, avec cinq nouvelles propositions législatives visant à réformer les règles de l'UE en matière d'asile. Ce pacte fait encore actuellement l’objet de discussions animées au sein du Conseil de l’Union européenne lui-même et avec le Parlement européen. En outre, le règlement relatif à l'Agence de l'UE pour l'asile a été adopté par le Conseil transformant le Bureau européen d'appui en matière d'asile (EASO) en une agence le 9 décembre 2021. Parallèlement, les crises se sont multipliées, notamment aux frontières turques, biélorusses, sans compter l’arrivée de nombreux migrants sur les îles grecques, espagnoles et italiennes. D’autres voies, dont celles des Balkans, moins médiatiques, posent également des difficultés et font l’objet d’une attention particulière. Toutes ces crises migratoires amènent à des tensions internes au sein des États et entre États membres. Elles ont sans doute également des incidences sur les équilibres électoraux, la Slovaquie en constituant a priori un dernier exemple. Les flux migratoires sont ainsi omniprésents depuis de nombreuses années.
Omniprésents également dans la recherche de solutions et à l’agenda du Conseil européen. Afin de faire face à ces crises, l’Union européenne a renforcé son contrôle aux frontières avec Frontex, a choisi de passer des accords contestés avec la Turquie (2016), la Libye (2017) ou encore la Tunisie (2023) dans le but que ces États contrôlent mieux les départs vers l’Union et qu’ils acceptent de réadmettre un certain nombre de migrants sur leur territoire. Ces accords ont en outre un volet financier conséquent, créant des relations déséquilibrées, qui sont empreintes de pressions politiques au détriment de l’Union.
La question migratoire est vraisemblablement pour partie sans solution. Tout d’abord, les frontières ne peuvent pas être totalement contrôlées. Le Royaume-Uni, malgré des moyens conséquents en lien avec la France, s’y essaie, mais ne peut empêcher les traversées de la Manche. La géographie insulaire ne la protège pas des flux. Le passage par les Balkans met lui en évidence que toutes les voies sont sollicitées, même celles éloignées des routes. L’installation de clôture ne rend pas davantage hermétique les frontières. Ensuite, la possibilité d’un retour vers l’État d’origine se heurte à deux principaux écueils, l’acceptation du retour de la personne par l’État d’origine et surtout l’identification de l’État d’origine. Enfin, le continent européen demeure attractif au regard de la situation économique, politique ou climatique de nombreux États.
Cette situation crée des crispations et surtout cette question reste très passionnelle. Il n’est pas aisé de l’aborder sous d’autres angles, dont celle de l’évolution démographique du continent européen, qui devrait pourtant être pleinement intégrée au débat public et qui est connue des autorités. De nombreux États de l’Union font face à une population vieillissante avec des taux de natalité en recul. Celui de l’Union européenne s’établissait à 1.5 en 2020 (source INSEE), taux qui ne cesse de baisser depuis de nombreuses années, quand le renouvellement des populations est fixé à 2.1 enfants par femme. Cette situation a déjà dans certains États des conséquences, comme le manque de main-d’œuvre et de personnes qualifiées. Les conséquences sont aussi à plus long terme quant à la capacité à générer des richesses et à innover. Or ce débat semble impossible, car non souhaité dans une Union européenne qui ne sait pas toujours comment diffuser ses valeurs et qui est fortement marquée par les questions d’identité. Angela Merkel, chancelière allemande avait tenté de provoquer ce débat, elle en est sortie fragilisée. Cette situation mène à des impasses. A titre d’exemple peut être pris celui des universités. L’État encourage les universités à l’internationalisation, notamment en accueillant des étudiants étrangers prometteurs. Des étudiants sont alors identifiés par les équipes pédagogiques aux termes de processus de sélection exigeant. Pour autant, une fois sélectionnée, il est difficile pour ces étudiants d’obtenir les visas pour venir étudier en France au moment de la rentrée universitaire. Sans doute cette difficulté n’est pas sans lien avec la controverse nationale sur le nombre de titre de séjour accordé à des étudiants.
Les injonctions apparaissent contradictoires à ce niveau plus local des universités et rendent finalement difficilement compréhensibles les politiques. Ces mêmes contradictions existent au niveau européen avec une ampleur plus forte liée à la médiatisation, mais qui ne disent rien des solutions qui devront être choisies au regard de cette courbe démographique. Et pourtant gouverner, c’est prévoir.
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