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Le cas du mois
Droit du travail - relations individuelles
Travailler sans compter
Désiré et Adhémar sont désolés des déboires professionnels que leur amie Valérie, qu’ils ont connue l’année dernière sur leur lieu de vacances, est en train de rencontrer…
Celle-ci avait été embauchée, sans période d’essai compte tenu de son expérience, comme serveuse dans un restaurant à la mode du 1er juillet au 31 août. Valérie était ravie d’y travailler, les clients l’appréciaient beaucoup, la félicitaient souvent pour la rapidité de son service et son amabilité constante, ce qui lui valait d’ailleurs de récolter de jolis pourboires ! Pourtant, le 25 août, à la fin de son service qui s’était comme toujours très bien passé, Valérie apprit de son employeur que ce dernier entendait rompre leur contrat, n’ayant plus « besoin d’elle », en cette fin de saison où les clients se font plus rares. Navrée, Valérie comprit toutefois sa décision mais lui demanda, logiquement, qu’il lui versât le salaire qu’elle aurait dû percevoir s’il n’avait pas décidé de mettre fin au contrat, ainsi que le paiement de ses congés payés. Ce dernier refusa catégoriquement, invoquant ses difficultés économiques liées à la baisse imprévue de la fréquentation de son restaurant et le fait qu’un salarié en CDD n’a pas droit à des congés payés. Désiré et Adhémar aimeraient pouvoir l’aider et réunir pour elle des éléments pour sa défense.
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Dans quel cas un employeur peut-il rompre avant le terme prévu un contrat conclu à durée déterminée et le cas échéant, quelles indemnités peut-il être contraint de verser à son ancien salarié ?
En principe, un contrat à durée déterminée ne peut être rompu avant le terme stipulé au contrat ; en effet, il prend normalement fin, de plein droit, à l’échéance du terme (C. trav., art. L. 1243-5). Cependant, cette règle connaît certaines dérogations : l’employeur, comme le salarié, peuvent exceptionnellement rompre le contrat avant l’échéance du terme.
Le premier cas est celui d’une rupture négociée, à l’amiable, donc d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. Cette situation est exclue en l’espèce, la décision de rompre le contrat ayant été unilatéralement prise par l’employeur de Valérie.
La faute grave du salarié permet également à l’employeur de rompre le contrat avant le terme prévu. Bien que l’hypothèse n’ait pas été expressément prévu par le code du travail, la jurisprudence a déduit de la combinaison des règles applicables au licenciement pour faute grave avec celles applicables en matière disciplinaire le régime de la rupture pour faute grave d’un CDD (V. Soc. 4 juin 2008, n° 07-40.126). La gravité de la faute rend alors impossible le maintien du salarié dans l’entreprise, ce dernier ayant par exemple, par des agissements ou négligences répétés, causé ou contribué à la désorganisation de l’entreprise au point d’en affecter les résultats ou de provoquer une forte baisse de clientèle. Efficace et particulièrement appréciée par les clients du restaurant, Valérie ne devrait en aucun cas pouvoir se voir imputer une telle faute, dont l’employeur aurait à rapporter la preuve, qui semble donc impossible à rapporter. De surcroît, la rupture d’un CDD pour faute grave obéit à une procédure bien précise, proche de celle applicable au licenciement pour faute grave - mise à pied à titre conservatoire, convocation à un entretien préalable à la rupture envisagée et lettre de notification de la rupture pour faute grave -, qui n’a manifestement pas été effectuée.
Un dernier cas justifiant la rupture anticipée d’un CDD est la force majeure, rendant impossible la poursuite du contrat de travail en raison de la survenance d’un événement extérieur, imprévisible et irrésistible. En l’espèce, prévisible, la baisse de fréquentation du restaurant ne peut constituer un cas de force majeure. Or, la rupture anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l'initiative de l'employeur, sauf accord du salarié et en dehors des cas de faute grave ou de force majeure, ouvre droit pour le salarié à des dommages et intérêts d'un montant au moins égal aux rémunérations qu'il aurait perçues jusqu'au terme du contrat (C. trav., art. L. 1243-4), sans préjudice de l'indemnité de fin de contrat prévue à l'article L. 1243-8 du Code du travail. Selon ce dernier texte, lorsque, à l'issue d'un contrat de travail à durée déterminée, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée, le salarié a droit, à titre de complément de salaire, à une indemnité de fin de contrat destinée à compenser la précarité de sa situation. Cette indemnité est égale à 10 % de la rémunération totale brute versée au salarié. Elle s'ajoute à la rémunération totale brute due au salarié. Elle est versée à l'issue du contrat en même temps que le dernier salaire et figure sur le bulletin de salaire correspondant. Ainsi, Valérie serait en droit de demander des dommages et intérêts devant le juge prud’homal pour rupture abusive de son contrat de travail.
De surcroît, un salarié embauché en CDD bénéficie des mêmes droits à congés payés qu’un salarié engagé en CDI et s’il ne peut prendre tous ses congés avant le terme de son contrat, il bénéficie d’une indemnité compensatrice de congés payés. Son montant, calculé en fonction de la durée effective du contrat, est au moins égal à 10% de la rémunération totale brute perçue par le salarié. La difficulté provient de ce que les congés payés peuvent être effectivement pris pendant la durée du contrat, à défaut de quoi ils doivent être payés au salarié. Faute de stipulation au contrat de travail, dans le règlement intérieur de l’entreprise ou dans la convention collective, le choix entre les deux solutions peut se révéler source de conflit, comme c’est le cas en l’espèce entre Valérie et son employeur, ce dernier, pour faire des économies, lui refusant qu’elle prenne ses congés payés à la fin de son contrat, évitant ainsi d’avoir à lui payer une indemnité de congés payés.
Référence
■ Soc. 4 juin 2008, n° 07-40.126 P : D. 2008. 1769.
Sur la méthodologie du cas pratique : V. vidéo Dalloz
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