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Le saviez-vous ?

[ 25 juin 2021 ] Imprimer

De quelques spécificités juridictionnelles calédoniennes

En Nouvelle-Calédonie, il existe un statut civil coutumier kanak qui entraine quelques spécificités en matière juridictionnelle. 

Ainsi l’article 7 de la loi n° 99-209 du 19 mars 1999 organique relative à la Nouvelle-Calédonie prévoit que « les personnes dont le statut personnel, au sens de l'article 75 de la Constitution, est le statut civil coutumier kanak […] sont régies en matière de droit civil par leurs coutumes ».

L’article 19 de la même loi organique en tire les conséquences d’un point de vue juridictionnel. Ainsi, dans un alinéa 1er, il dispose que « la juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des litiges et requêtes relatifs au statut civil coutumier ou aux terres coutumières. Elle est alors complétée par des assesseurs coutumiers dans les conditions prévues par la loi ». 

L’alinéa 2 concerne l’action civile née de la commission d’une infraction, et il prévoit que « par dérogation au premier alinéa et sauf demande contraire de l'une des parties, après s'être prononcée sur l'action publique concernant des faits de nature pénale commis par une personne de statut civil coutumier à l'encontre d'une personne de même statut civil coutumier, la juridiction pénale de droit commun, saisie d'une demande de dommages et intérêts, statue sur les intérêts civils dans les conditions prévues par la loi ».

Un troisième et dernier alinéa précise enfin qu’« en cas de demande contraire de l'une des parties […] la juridiction pénale de droit commun ordonne le renvoi devant la juridiction civile de droit commun, siégeant dans les conditions prévues au premier alinéa, aux fins de statuer sur les intérêts civils », et que « la décision de renvoi constitue une mesure d'administration judiciaire qui n'est pas susceptible de recours ».

Ainsi, en Nouvelle-Calédonie, des assesseurs coutumiers, qui sont des citoyens de statut civil kanak, participent à la composition des juridictions civiles qui ont à connaître de conflits opposant des personnes dont le statut personnel est le statut civil coutumier. C’est l’ordonnance no 82-877 du 15 octobre 1982 qui les a institués ; leur participation au fonctionnement de la justice « est justifiée par le caractère très complexe des coutumes mélanésiennes dont la plupart sont orales et qui, de ce fait, demeurent d'accès difficile aux magistrats professionnels affectés dans le territoire ». La même ordonnance de 1982 précise cependant que les parties peuvent, d'un commun accord, choisir d'écarter ces dispositions particulières et demander l'application à leur différend des règles de droit commun relatives à la composition de la juridiction.

Si l’on conjugue ces dispositions avec celles précitées de la loi organique, on notera que la juridiction compétente pour statuer sur les intérêts civils dans le cadre de poursuites pénales est, par principe, la juridiction pénale de droit commun (soit, selon la gravité de l’infraction, la formation concernée du tribunal de première instance – TPI, nom porté par la juridiction judiciaire de droit commun de premier degré en Nouvelle-Calédonie – ou de la cour d’appel). Par exception, il peut être renvoyé à la juridiction civile de droit commun complétée par des assesseurs coutumiers, mais à la condition que l’une des parties en fasse la demande (estimant qu’une telle demande n’avait pas été formulée, V. récemment, Crim. 1er juin 2021, no 20-83.485). 

On signalera pour finir que la composition de la formation du TPI compétente pour juger les délits est elle-même originale puisqu’elle intègre des assesseurs mais « civils », recrutés à partir des listes électorales, et ce depuis la loi n89-378 du 13 juin 1989 (V. COJ, artL. 562-9 s.).

 


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